Faire ou défaire la ville sont deux facettes instituées de la production urbaine, passée d’une logique prédominante d’extension à un renouvellement urbain orchestré autour de projets. Plutôt que de décortiquer l’évolution des territoires, l’ouvrage collectif « Urbanisme et changement », paru cette année aux Presses universitaires du Midi, détaille la manière dont la rhétorique du changement et de l’innovation infuse les pratiques et les représentations des élus ainsi que des professionnels, tant dans la conception que la construction et la gestion des espaces.
A fortiori dans un contexte où la galaxie d’acteurs investis s’élargit et se diversifie, notamment pour mieux prendre en compte les enjeux climatiques et énergétiques. Sous la codirection des urbanistes Nadia Arab, Amandine Mille et Antoine Pauchon, les auteurs nourrissent leur réflexion sur la conduite du changement en s’appuyant sur des études de cas en France et à l’étranger, dépassant souvent les cadres et les modes d’action des acteurs plus conventionnels.
Polysémique, parfois flou et instable, le changement n’a pourtant jamais été autant valorisé. Sur le terrain, dans des aménagements urbanisés, il s’opère aussi en installant une tension avec ce qui le précède, parce que des logements sont déjà habités, parce que des espaces publics ont créé des usages pérennes, etc. « Il y a un effet de juxtaposition, de composition et d’hybridation entre les nouveaux enjeux et outils que l’on introduit et ceux qui étaient déjà là », observe Nadia Arab. Un questionnement opportun qui brasse une analyse des discours, des méthodes et d’une recherche orientée vers l’action.
Comment la valorisation du changement en urbanisme se manifeste-t-elle ?
Par l’emploi inflationniste des termes d’évolution, de renouveau, de transformation et d’innovation. Nous avons retenu celui de changement, qui nous paraissait plus neutre. S’il y a une relation consubstantielle entre le changement et l’histoire et l’évolution des villes, la pratique et les perceptions qui en découlent ont été finalement peu étudiées. Dès l’après-guerre, le changement a consisté en un fort alignement des acteurs publics et privés sur la modernisation du pays, avec la construction d’infrastructures et de logements. Ce système efficace de production de la ville a ensuite été remis en question par une succession de crises à partir des années 1970. La désindustrialisation, la dégradation de l’habitat social, la décroissance urbaine, les crises immobilières et l’habitabilité des métropoles ne sont pas uniquement des nouveaux problèmes à affronter, mais introduisent des changements de paradigme, d’expertises, d’instruments et de cadres réglementaires. Bref, un nouveau référentiel.
Le changement n’est pas uniquement l’introduction d’une nouveauté. La rénovation énergétique des logements est
[60% reste à lire]
Article réservé aux abonnés
Gazette des Communes
Thèmes abordés