Les collectivités resteront – pour le moment – spectatrices du plan France 2030. Les propositions des associations Régions de France et Intercommunalités de France sont restées à la porte du premier comité de lancement organisé le 1er février bien qu’elles aient pu assister à la réunion.
Les deux associations n’ont en effet eu ni le temps ni l’écoute nécessaire « durant cette longue succession de présentation de tous les acteurs impliqués », explique un participant. Et bien que le Premier ministre ait lancé à la salle qu’il « fallait territorialiser ce plan », la sélection des projets se fera par appels à projet via des opérateurs nationaux et internationaux, selon « un processus très vertical », souligne-t-on chez Régions de France. « La stratégie n’est, à ce stade, pas illogique et ce plan visant à faire émerger des pépites nationales est très intéressant, mais ce qui est contestable, c’est l’absence de réflexion territoriale pour le déployer », regrette Jules Nyssen, délégué général de Régions de France.
Une lettre de rappel
Les présidents des deux associations, Carole Delga et Sébastien Martin, ont donc décidé de se voir, le 9 février, pour rappeler au Premier ministre dans une lettre commune de « s’engager résolument dans une coopération volontariste et constructive avec les acteurs locaux et les forces vives de nos écosystèmes territoriaux ». Pour eux, la clé du succès réside dans la capacité de tous les acteurs à « jouer collectif et instaurer un partage des responsabilités ».
courrier PS signé Carole Delga et Sébastien Martin by Cédric Néau on Scribd
Les intercos et les régions souhaiteraient surtout s’appuyer sur des méthodes qui ont fait leur preuve : « On pourrait partir, au moins, de ce qui a été fait avec les PIA », explique Jules Nyssen. « Ce serait la moindre des choses de nous associer, car c’est nous qui iront ensuite au charbon », appuie Claire Delpech, conseillère « finances, fiscalité et habitat » d’Intercommunalités de France. « Mais c’est la méthode Bercy, les choses devraient s’arranger par la suite », pronostique-t-elle. Compte tenu de l’enjeu, Bercy et son locataire principal, Bruno Le Maire, maîtrisent à la fois les moyens financiers, le montage et l’agenda industriel gouvernemental. « On peut comprendre qu’ils souhaitent contrôler toute la chaîne », glisse un proche du dossier.
Centralisme et verticalité
A l’heure où la loi 3DS vient d’être définitivement votée et malgré l’appel du Premier ministre à privilégier la « logique bottom-up » (ascendante) lors du comité de lancement, ignorer les propositions d’associations des territoires à France 2030 n’est pas seulement une mauvaise manière infligée à des acteurs clés du développement économique et de la formation professionnelle. C’est aussi la preuve que la culture centralisatrice de Bercy prévaut toujours sur les aspirations décentralisatrices d’autres ministères, voire de Matignon lui-même. Aussi bien an niveau local que national, c’est bien celui qui paie qui décide.