LES TROUBLES PSYCHIQUES touchent environ 11 % des citoyens de l’Union européenne et leur incidence, du fait notamment de la crise économique et des pertes de revenus liés à celle-ci, devrait augmenter dans les années à venir. Parmi les troubles psychiques, cinq pathologies psychiatriques sont plus particulièrement préoccupantes : la schizophrénie, les troubles bipolaires, la dépression, les troubles liés à l’alcool et les lésions autoinfligées. 3 à 5 % de la population française souffrent de troubles psychiques sévères. 1 % de la population souffre de schizophrénie. Une personne sur cinq connaîtra au cours de sa vie des problèmes de dépression. 75 % des malades rechutent dans l’année, s’ils ne bénéficient pas d’une prise en charge et d’un accompagnement adaptés. Les troubles psychiques sont la première cause d’hospitalisation en France(1).
DU NORMAL AU PATHOLOGIQUE
Une organisation psychique devient maladie quand elle entraîne pour une personne une souffrance intérieure excessive. La maladie pousse alors les personnes à investir plus d’énergie dans leurs conflits psychiques internes que dans l’intérêt pour le monde extérieur, entraînant un déséquilibre. La personne décompense dans la maladie.
DÉFINITION
Le handicap psychique est la conséquence d’une maladie psychique (psychose, schizophrénie…). Il a pour conséquence des troubles du comportement et du jugement et entraîne des difficultés à s’adapter à la vie en société.
Si le handicap psychique peut être consécutif à certains troubles cognitifs d’origine neurologique (autisme, maladie d’Alzheimer, épilepsie), il est, le plus souvent, la résultante d’une maladie psychiatrique du domaine de la névrose grave ou d’une psychose. Il a pour conséquence des troubles du comportement et du jugement, des troubles relationnels de l’individu vis-à-vis de lui-même et de son entourage et, de ce fait, entraîne des difficultés à s’adapter à la vie en société. Il peut être durable (on dit qu’il est chronique) ou bien épisodique (on parle alors d’épisode aigu).
Les capacités intellectuelles peuvent être soit conservées, soit affectées. Le handicap psychique peut apparaitre à tous les âges de la vie.
LES DIFFÉRENTES FORMES DE TROUBLES PSYCHIQUES
Les troubles psychiques peuvent prendre des formes très diverses selon les personnes. Ils peuvent toucher :
- la perception quand apparaissent des hallucinations, mêmes légères ;
- la pensée, à travers ce qu’on appelle des obsessions ou des délires ;
- le comportement quand apparaissent des manifestations d’agitation, de tension ou de peurs excessives ;
- l’humeur, dans le cas par exemple de la dépression.
Le handicap psychique est la conséquence de diverses maladies tels que :
- les psychoses, et en particulier la schizophrénie ;
- certains troubles névrotiques graves comme les TOC (troubles obsessionnels compulsifs) ;
- les troubles graves de la personnalité tels que la personnalité border line ;
- les troubles bipolaires (ou trouble maniaco-dépressif, anciennement appelé psychose maniaco-dépressive (PMD)) ;
- certaines pathologies telles que les traumatismes crâniens, les pathologies vasculaires cérébrales et les maladies neurodégénératives.
Nous développerons dans cet ouvrage les formes les plus courantes de troubles ou handicaps psychiques :
- les différentes psychoses : psychoses infantiles, psychoses adultes (bouffée délirante aigüe, psychoses schizophréniques, psychoses non-schizophréniques) ;
- les névroses de l’adulte.
L’autisme est assimilé au handicap psychique selon la loi du 11 février 2005. Nous préférerons, dans cet ouvrage, l’assimiler aux troubles envahissant du développement (TED) définis dans la classification internationale des maladies (CIM10) éditée par l’Organisation mondiale de la santé (1993).
Suggestions de sites internet
http://psychiques.forumactif.com : portail d’informations sur le handicap psychique et les maladies invisibles.
http://www.mnasm.com/ : site de la mission nationale d’appui en santé mentale.
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/024000350/0000.pdf : rapport de Michel Charzat à Mme Ségolène Royal, ministre déléguée à la famille, à l’enfance et aux personnes handicapées, mars 2002,« Pour mieux identifier les difficultés des personnes en situation de handicap du fait de troubles psychiques et les moyens d’améliorer leur vie et celle de leurs proches ».
http://www.unafam.org/-Accompagner-les-personnes-malades-.html : site sur les besoins des personnes handicapées psychiques.
http://www.psychisme.org/ : site sur la psychopathologie destiné aux professionnels de la santé.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Personnalit%C3%A9_borderline : définition des troubles de la personnalité borderline.
http://www.reseau-pic.info/?dest=medicaments/Guide/guide.htm : site sur les médicaments psychotropes-psychiatrie et santé mentale.
http://www.fondation-fondamental.org : réseau de coopération scientifique en santé mentale
Éléments de bibliographie
ARVEILLER J.P. (2006), Psychiatrie et folie sociale, Paris, Érès.
AZOULAY C., CHABERT C., GORTAIS J., JEAMMET PH. (dir.) (2000), Processus de la schizophrénie, Paris, Dunod.
DE KERVASDOUE J. & LEPOUTRE R. (dir.) (2002), La santé mentale des français, Paris, Odile Jacob.
GODFRYD M. (2002), Les maladies mentales de l’adulte, Paris, PUF.
GRANGER B. & NAUDIN J. (2006), La schizophrénie, Paris, Éd. Le cavalier bleu.
LIBERMANN R. (2007), Handicap et maladie mentale, Paris, coll. Que sais-je ?, PUF.
PROUTEAU A. (dir.) (2011), Neuropsychologie de la schizophrénie – Enjeux et débats, Paris, Dunod.
RUFO M. (2007), La vie en désordre – Voyage en adolescence, Paris, Éditions Anne Carrière.
LE TERME PSYCHOSE reste général et s’accompagne le plus souvent d’un qualificatif précisant l’évolution (aiguë ou chronique), l’étiologie (organique, affective, etc.) ou la nature (schizophrénique, dépressive, etc.). Il a été créé par le psychiatre autrichien E. Feuchtersleben, qui l’utilisa pour la première fois dans son cours de pathologie mentale, inauguré à Vienne en 1884.
Les psychoses sont les maladies psychiatriques les plus graves.
Elles se caractérisent pour l’essentiel par la perte du contact avec la réalité, qui se manifeste par un symptôme essentiel : le délire.
Selon l’approche psychanalytique, dans le cas des psychoses, une défaillance a eu lieu dans les premiers moments de la vie dans la construction de la personnalité. La psychose correspond à une impossibilité, pour l’enfant, de se différencier complètement de sa mère pour devenir une personne distincte. Un conflit s’exerce alors entre le Ça et la réalité. Le Surmoi est mal structuré et ne joue pas son rôle de « filtre » entre le Moi (principe de réalité) et le Ça (principe de plaisir). Le Moi du psychotique, faible, est alors soumis aux exigences du Ça. La manifestation la plus spectaculaire se traduit par les hallucinations : le psychotique prend ses rêves (issus du Ça prédominant) pour des réalités (le Moi étant soumis au Ça).
Ce Moi est morcelé et les limites entre soi et non-soi, entre son corps et la réalité extérieure sont mal définies. Le psychotique est alors sujet à des angoisses de morcellement. Sa crainte profonde est d’être détruit, de mourir par éclatement ou morcellement. L’accompagnement thérapeutique du psychotique va d’ailleurs s’appuyer sur ce concept en visant à être contenant et ainsi diminuer ces angoisses.
1. LES PRINCIPALES MANIFESTATIONS DES PERTURBATIONS PSYCHOTIQUES
Avant toute démarche, quand une personne présente un comportement délirant, il convient de se demander s’il n’y a pas une cause organique au délire. Celui-ci n’est pas forcément « psychiatrique », les tumeurs cérébrales ou les fortes fièvres peuvent en être la source notamment. En outre, certains délires chroniques peuvent être liés à une détérioration mentale due à un état démentiel progressif chez la personne âgée. Cette hypothèse étant vérifiée, apparaissent les manifestations suivantes :
- Le délire. Issu du latin delirare, signifiant littéralement « sortir du sillon », c’est-à-dire s’exclure du sens commun. Le sens de l’expression populaire « dérailler » semble le mieux se rapprocher de cette signification. Ainsi pour celui qui délire (le « délirant »), les relations avec le monde extérieur sont extrêmement perturbées. Le délire entraîne l’adhésion et la conviction totale du sujet à ses idées délirantes, le malade préférant sa réalité intérieure plutôt que celle, extérieure, des autres. Délirer, c’est sortir de la réalité extérieure, sans le savoir et sans pouvoir s’en rendre compte.
- Le déni. C’est le refus de reconnaître une réalité dont la perception est traumatisante. Le déni est lié au clivage du Moi. En clivant son Moi, le psychotique permet à une partie de son Moi de s’adapter à la réalité tandis que l’autre partie peut y échapper.
On observe chez la personne psychotique :
- des troubles de la mobilité générale (ralentissement ou agitation) ;
- des stéréotypies(2) et activités de type agressif ;
- une alternance d’attraction et de répulsion pour toute relation ;
- une impossibilité d’accéder au registre symbolique qui lie la communauté.
2. LES PSYCHOSES ADULTES
Les psychoses adultes désignent les psychoses apparaissant au moment de l’entrée dans le monde adulte ou à l’âge adulte. Les relations avec le monde extérieur sont extrêmement perturbées. Le délire entraînant la conviction totale du sujet à ses idées délirantes, le psychotique adulte en crise est difficile d’approche et a souvent besoin d’être traité contre son gré en prenant des mesures autoritaires légales (hospitalisation d’office ou hospitalisation à la demande d’un tiers), particulièrement quand le sujet peut sembler dangereux pour lui-même ou pour d’autres personnes.
Nous distinguons dans les psychoses adultes :
- la psychose délirante aiguë ou bouffée délirante aiguë (BDA) ;
- les psychoses chroniques avec :
- la schizophrénie ;
- les psychoses non schizophréniques : la paranoïa, la psychose hallucinatoire chronique (PHC), la paraphrénie.
3. LES PSYCHOSES INFANTILES
On parle de psychoses infantiles pour désigner les psychoses apparaissant dès l’enfance. Les mécanismes sont les mêmes que ceux que nous avons préalablement présentés : l’enfant psychotique a une vague conscience de sa séparation d’avec le corps maternel. La séparation est au coeur de sa problématique.
On observe un désinvestissement massif du langage, voire un mutisme.
Les enfants en capacité de parler, ont souvent un langage peu élaboré qui n’utilise pas le « je ».
Il y a, le plus souvent, présence de troubles majeurs de la fonction intellectuelle : apprendre, c’est se confronter à la réalité et donc aux frustrations.
Cette confrontation est intolérable car source de trop d’angoisse. Cela se traduit également par une incapacité à jouer.
Les variations d’humeur sont importantes avec de grands moments d’angoisse.
Les frustrations, les changements environnants leur font vivre une rupture dans le sentiment d’exister. Les angoisses de morcellement alors en jeu les amènent à adopter des positions de repli (symptôme autistique), des crises de colère hétéro (violences dirigées vers autrui) ou auto violente (automutilation).
Nous distinguons dans les psychoses infantiles :
- les psychoses symbiotiques ;
- les psychoses précoces à expression déficitaire ;
- les dysharmonies évolutives de structure psychotique.
Suggestions de sites internet
http://psychiques.forumactif.com : portail d’informations sur le handicap psychique et les maladies invisibles.
http://www.troubles-comportement.fr/ : site d’informations sur les troubles du comportement et les thérapies comportementalistes et cognitives.
http://www.psychosis.ch/fr/ : site d’informations pour les personnes vivant avec une psychose schizophrénique.
http://www.aqppep.com/ : site de l’association québécoise des programmes pour premiers épisodes psychotiques.
Éléments de bibliographie
BARANES J.-J. (dir.) (1991), La question psychotique à l’adolescence, Paris, Dunod.
BERGERET J. (1996), La personnalité normale et pathologique, Paris, Dunod, 3e éd.
BESANÇON G. (2005), Manuel de psychopathologie, Paris, Dunod.
BOUTINAUD J. (2009), Psychomotricité, psychoses et autismes infantiles, Paris, In Press.
CHABERT C. (2010), Les psychoses – traité de psychopathologie de l’adulte, Paris, Dunod.
CORDIÉ A. (1993), Un enfant psychotique, Paris, Le Seuil.
DUMESNIL F. (1993), Au coeur des psychoses précoces : le traitement relationnel, Paris, PUF.
GRUNBERGER B. & CHASSEGUET-SMIRGUEL J. (dir.) (1985), Les psychoses – la perte de la réalité, Paris, Ed. Tchou Sand.
LEMAY M. (1987), Les psychoses infantiles (Contenant déserté, contenant envahi), Paris, Fleurus, 2 tomes.
ROSENFELD D. (2005), Le patient psychotique – Aspects de la personnalité, Paris, Ed. Hublot.
Thèmes abordés
Notes
Note 01 Conseil économique et social, Monsieur Pierre Joly, Prévention et soins des maladies mentales - Bilan et perspectives, juillet 1997. Retour au texte
Note 02 Répétition automatique de mêmes gestes ou de mêmes actes. Retour au texte