La loi du 11 février 2005 initie un changement majeur de politique en matière de scolarité et de formation des enfants et adolescents handicapés.
Le modèle jusque-là à l’œuvre reposait sur un raisonnement de type « intégratif », c’est-à-dire reposant sur la capacité de l’enfant ou adolescent handicapé à « faire avec » le système scolaire mis en œuvre par l’Éducation nationale. Il en découlait un régime à double vitesse pour la scolarité : les enfants « intégrés » bénéficiant d’une scolarité à temps partiel ou complet dans un dispositif ordinaire ou adapté de l’Éducation nationale, les autres relevant d’une scolarité (ou absence de scolarité) dans un établissement médico-social.
La loi du 11 février 2005 modifie ce modèle en postulant que c’est à l’environnement scolaire de s’adapter, que tout enfant handicapé, où qu’il soit, se doit d’avoir un projet personnalisé de scolarisation (PPS) projet — personnalisé de scolarisation (PPS). Ce projet de scolarité est partie prenante d’un projet plus large formalisé dans le plan personnalisé de compensation plan — personnalisé de compensation.
Il en découle un changement majeur d’organisation, les commissions antérieures spécifiquement chargées d’évaluer et d’orienter la scolarité, jusque-là pilotées par l’Éducation nationale, ont été supprimées(1)et fondues dans la CDAPH. Par ailleurs, on assiste à un renforcement des scolarités mises en œuvre directement par l’Éducation nationale.
Les dispositifs pédagogiques proposés aujourd’hui s’inscrivent dans la continuité de ceux élaborés ces vingt dernières années mais l’état d’esprit et les critères présidant à la ligne de partage entre la scolarité « ordinaire », la scolarité « adaptée dans un dispositif de l’Éducation nationale » et la scolarité « adaptée dans un établissement médico-social » sont en train de rapidement évoluer.
Historique de la scolarité avant la loi du 11 février 2005
La loi du 30 juin 1975 posait le principe d’une obligation scolaire pour les enfants handicapés et précisait que l’État en assurait les dépenses selon trois formules hiérarchisées :
- dans une classe ordinaire ou spécialisée de l’Éducation nationale ;
- par la mise à disposition d’enseignants spécialisés de l’Éducation nationale dans les établissements médico-sociaux ;
- en passant avec les établissements médico-sociaux un contrat (simple ou d’association) dans le cadre plus général, défini par les lois du 31 décembre 1959 et du 2 août 1960 sur l’enseignement privé sous contrat.
Par ailleurs, selon la loi de 1975, l’État participe à la formation professionnelle et à l’apprentissage des jeunes handicapés.
Le principe d’une scolarité adaptée, mais la plus intégrative possible, est donc posé dès 1975. Le ministère de l’Éducation nationale mettra une vingtaine d’années pour le traduire dans les faits par des évolutions successives de son dispositif. Le point de départ en est :
- une première circulaire du ministère de l’Éducation nationale du 29 janvier 1982 qui amorce une meilleure mise en œuvre d’une politique d’intégration en faveur des enfants et adolescents handicapés ;
- une deuxième circulaire du 29 janvier 1983 qui met en place des actions de soutien et de soins spécialisés en vue de l’intégration dans les établissements ordinaires des enfants et adolescents.
La loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989, de portée généraliste, viendra confirmer cette orientation puisqu’il est prévu, en son article 1, que « l’intégration scolaire des jeunes handicapés est favorisée. Les établissements et services de soins et de santé y participent ».
Entre 1990 et 2003, de nombreuses circulaires viendront concrétiser et organiser la mise en œuvre de ces orientations(2).
Les principes relatifs à la scolarité dans la loi du 11 février 2005
La loi du 11 février 2005 aménage, par rapport à la logique antérieure, une rupture pour partie symbolique et pour partie opératoire. La notion d’éducation spéciale disparaît et celle d’intégration intégration marque le pas au profit de celle de « scolarité de l’élève handicapé». Le principe d’une scolarité privilégiée en milieu ordinaire est posé. Par ailleurs, la situation des étudiants handicapés est prise en compte.
En effet :
- la responsabilité de l’État est rappelée pour la mise en œuvre des moyens humains et financiers nécessaires à la scolarité des enfants handicapés ;
- tout enfant handicapé est inscrit de droit dans l’école ou établissement scolaire le plus proche de son domicile et qui constitue son établissement de référence. S’il a besoin de recevoir une formation dans un dispositif adapté, l’enfant peut alors être inscrit avec l’accord de ses parents, dans une autre école. S’il est scolarisé dans un établissement médico-social, une convention est passée entre cet établissement et l’autorité académique ;
- une évaluation des compétences et des besoins de l’enfant est réalisée par l’équipe pluridisciplinaire de la maison départementale des personnes handicapées. Un parcours de formation est alors élaboré faisant l’objet d’un projet personnalisé de scolarité (PPS). Ce projet est un des éléments du plan de compensation arrêté par la commission des droits et de l’autonomie ;
- un enseignant référent est nommé auprès de chaque élève handicapé afin d’assurer, sur l’ensemble du parcours de formation, la permanence des relations avec l’élève, ses parents, de réunir l’équipe de suivi de scolarisation et de favoriser la continuité et la cohérence du PPS ;
- la scolarité est complétée, autant que de besoins, par des actions pédagogiques, psychologiques, éducatives, sociales, médicales et paramédicales, coordonnées dans le cadre du projet individualisé ;
- les parents sont étroitement associés à la décision d’orientation et peuvent se faire aider par la personne de leur choix. À défaut d’accord un recours au conciliateur de la maison départementale des personnes handicapées est possible ainsi que le recours contentieux ;
- lorsqu’une scolarité en un milieu ordinaire a été décidée et qu’elle est rendue impossible pour des raisons d’accessibilité, la collectivité concernée finance le surcoût des transports pour se rendre dans un établissement plus éloigné ;
- les établissements d’enseignement supérieur sont tenus d’inscrire les étudiants handicapés et de mettre en place les aménagements nécessaires. Les assistants d’éducation peuvent intervenir auprès des étudiants.
Entre 1995 et 2010 de nombreux décrets, arrêtés et circulaires seront pris, dont les principaux, encore applicables ce jour, sont :
– Circulaire du 17 mai 1995 : établissements régionaux d’enseignant adaptés (EREA)
– Circulaire du 19 juin 1998 : mise en œuvre de la rénovation des enseignements généraux et professionnels adaptés dans le second degré (SEGPA)
– Circulaire du 17 juillet 1998 : l’assistance pédagogique à domicile en faveur des enfants et adolescents atteints de troubles de santé évalue sur une longue période
– Circulaire du 10 novembre 1999 : accueil des enfants et adolescents atteints de troubles de santé évoluant sur une longue période dans le 1er et le 2e degré
– Circulaire du 19 novembre 1999 : intégration scolaire. Mise en place des groupes départementaux de coordination « handiscol »
– Circulaire du 30 avril 2002 : adaptation et intégration scolaire des ressources au service d’une scolarité réussie pour tous les élèves
– Circulaire du 30 avril 2002 : adaptation et intégration scolaire ; les dispositifs de l’adaptation et de l’intégration scolaire dans le 1er degré ; CLIS
– Circulaire du 11 juin 2003 : scolarisation des enfants et adolescents présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant : accompagnement par un auxiliaire de vie scolaire
– Décret du 21 décembre 2005 et circulaire du 26 décembre 2006 : les aménagements des examens et concours de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur
– Décret du 30 décembre 2005 : le parcours de formation des élèves présentant un handicap
– Arrêté du 17 août 2006 relatif aux enseignants référents et leurs secteurs d’intervention
– Circulaire du 17 août 2006 : mise en œuvre et suivi du projet personnalisé de scolarisation
– Circulaire du 29 août 2006 : enseignements généraux et professionnels adaptés dans le 2e degré (EGPA)
– Décret n◦ 2009-378 sur la coopération entre les établissements scolaires et les établissements et services médico-sociaux et arrêté du 2 avril 2009 sur les unités d’enseignements
– Circulaire du 17 juillet 2009 : scolarisation des élèves handicapés à l’école primaire ; actualisation de l’organisation des classes de l’inclusion scolaire (CLIS)
– Circulaire du 5 octobre 2009 : la continuité de l’accompagnement scolaire des élèves handicapé
– Circulaire du 18 juin 2010 : scolarisation des élèves handicapés ; dispositif collectif au sein d’un établissement du 2e degré (ULIS)
Les dispositifs intervenant dans le cadre de la scolarité des élèves handicapés
Les dispositifs et classes spécialisées de l’Éducation nationale
Le réseau d’aides spécialisées aux enfants en difficulté (RASED)réseau d’aides spécialisées aux enfants en difficulté (RASED)
Il intervient dans l’enseignement primaire. Il a une vocation plus large que le seul domaine du handicap, mais il y participe en termes de repérage préalable et d’accompagnement des intégrations scolaires.
L’équipe est composée de psychologues scolaires et de maîtres spécialisés à dominante rééducative ou pédagogique (cf. circulaire du 9 avril 1990).
À l’école maternelle et primaire
La scolarisation primaire des enfants handicapés peut se faire sous deux formes :
- la scolarisation dans une classe ordinaire ;
- l’inscription dans une classe d’intégration scolaire (CLIS) classe d’intégration scolaire (CLIS) . Les CLIS, classes spécialisées, se sont substituées aux anciennes classes de perfectionnement (cf. circulaire du 18 novembre 1991). Les CLIS sont spécialisés selon une nature de handicap (mental, auditif, visuel, moteur) et participent à la vie du groupe scolaire.
Au collège
La scolarisation en collège peut se faire sous trois formes :
- d’une intégration individuelle au dispositif ordinaire ;
- de l’inscription dans une section d’enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) section d’enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) qui s’adresse à des élèves présentant des difficultés scolaires graves. Les SEGPA ont remplacé les sections d’enseignement spécialisé (SES)(3);
- de l’inscription dans une unité pédagogique d’intégration (UPI) unité — pédagogique d’intégration (UPI) et s’adressant à des élèves ayant un handicap mental (cf. circulaire du 21 février 2001). Les UPI ont vocation à prolonger l’action des CLIS.
Au lycée
Il n’y a pas de dispositif particulier propre au lycée s’agissant des lycéens handicapés. Les mesures sont par définition individualisées (suivi personnalisé par les professeurs, recours à un auxiliaire de vie scolaire, aménagement des locaux, moyens d’enseignement, etc.).
La scolarisation d’un adolescent handicapé est également possible dans un établissement régional d’enseignement adapté (EREA) établissement — régional d’enseignement adapté (EREA) dont les missions sont proches de celles d’une SEGPA. Les EREA ont remplacé les écoles nationales de perfectionnement (ENP) et, pour certains, se transforment en lycée d’enseignement adapté (LEA). Beaucoup d’EREA disposent d’un internat. Certains sont spécialisés pour la scolarisation d’élèves ayant un handicap moteur ou sensoriel.
À l’université
La loi du 11 février 2005 prévoit que les établissements de l’enseignement supérieur sont tenus d’inscrire les étudiants handicapés ou présentant un trouble de santé et d’assurer leur formation en mettant en place les aménagements nécessaires en termes d’organisation, de déroulement et d’accompagnement des études. Le dispositif des assistants d’éducation leur est ouvert.
Les assistants d’éducation – auxiliaires de vie scolaire auxiliaire de vie scolaire
Une partie des assistants d’éducation de l’Éducation nationale est dédiée à l’accompagnement particulier des enfants ou adolescents handicapés, selon la quadruple fonction :
- intervention dans la classe en concertation avec l’enseignant (aide pour écrire et manipuler du matériel) ou en dehors des temps d’enseignement (interclasse, repas, etc.) ;
- participation aux sorties de classes en apportant à l’élève l’aide nécessaire dans tous les actes qu’il ne peut réaliser seul ;
- accomplissement de gestes techniques ne requérant pas une qualification médicale ou paramédicale ;
- collaboration ou suivi des projets d’intégration.
Par ailleurs l’Éducation nationale répond à cette fonction par le canal des emplois « aidés » de type « contrat d’accès à l’emploi » (CAE).
L’apprentissage(4)
Afin de faciliter la formation d’un jeune handicapé certaines règles de contrat d’apprentissage apprentissage peuvent être aménagées, portant notamment sur la durée du contrat (qui peut être prorogée d’un an), l’âge de l’apprenti (possibilité d’y entrer jusqu’à 30 ans) et sur le déroulement de la formation, à savoir :
- des aménagements pédagogiques et un soutien individualisé au sein du CFA ;
- la spécialisation du CFA pour un public handicapé ;
- des cours par correspondance.
Les classes et dispositifs des établissements médico-sociaux
Les dispositifs scolaires internes aux établissements médico-sociaux sont désignés par la loi du 11 février 2005 par le vocable « unité d’enseignement ».
Ces « écoles internes » se sont constituées dans le temps sous trois formes :
- d’enseignants publics mis à disposition,
- d’enseignants de l’enseignement privé sous contrat avec l’Éducation nationale,
- d’enseignants et d’éducateurs techniques dont les postes sont financés par la dotation de l’établissement.
Un arrêté et un décret (en attente de publication au 15 avril 2008) sur les unités d’enseignement unité — d’enseignement en précisent le fonctionnement et les modalités de contractualisation avec l’Éducation nationale.
Formule choisie majoritairement par les établissements spécialisés gérés par le secteur associatif, les classes spécialisées internes aux établissements privés ne se développent plus guère compte tenu des orientations générales de l’Éducation nationale qui favorise désormais les classes intégrées à ses propres dispositifs.
La coopération entre les structures scolaires et les établissements médico-sociaux
Un décret et une circulaire d’application (en attente de publication au 15 avril 2008) précisent les modalités de coopération entre les structures scolaires et les établissements médico-sociaux. Ce décret devrait préciser des éléments touchant à :
- la contractualisation entre acteurs scolaires et médico-sociaux ;
- la coopération entre ceux-ci (complémentarité des interventions, formation, concertation) ;
- l’adaptation des méthodes pédagogiques ;
- les responsabilités respectives ;
- les schémas d’organisation ;
- les réseaux locaux et médico-sociaux ;
- la création d’un comité départemental de la scolarisation ;
- les unités d’enseignement ;
- le parcours de formation de l’élève (articulation entre le projet personnalisé d’accompagnement – médico-social – et le projet personnalisé de scolarisation) ;
- l’orientation en établissement ou service médico-social ;
- les missions de l’enseignant référent.
L’aménagement des examens
Pour garantir l’égalité des chances entre candidats, des aménagements aux conditions de passation des examens en raison d’un handicap ou d’un trouble invalidant de la santé sont prévus.
Les aménagements peuvent inclure notamment l’octroi d’un temps supplémentaire, la présence d’un assistant, un dispositif de communication adapté, le recours à un équipement adapté.
Les candidats handicapés peuvent bénéficier d’aménagement portant sur les conditions de déroulement des épreuves, une majoration du temps, la conservation pendant cinq ans des notes obtenues, l’étalement sur plusieurs sessions, des adaptations ou dispenses d’épreuves.
La formation et la recherche : l’INS HEA
L’Institut national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés (INS HEA) institut — national supérieur de formation et de recherche pour l’éducation des jeunes handicapés et les enseignements adaptés (INS HEA) est un établissement public placé sous la tutelle du ministre chargé de l’Enseignement supérieur et du ministre chargé de l’Éducation nationale(5). Par ses activités d’enseignement et de recherche, l’institut contribue notamment à l’éducation et à la formation des enfants, adolescents et adultes qui présentent des besoins éducatifs particuliers en lien avec un handicap ou une maladie invalidante. À ce titre :
- il apporte son concours à la définition et à la mise en œuvre des politiques d’éducation et de formation correspondantes ;
- il dispense une formation supérieure initiale et continue à visée professionnelle destinée aux personnels enseignants, non enseignants et d’encadrement ;
- il participe à l’animation et à la coordination des formations développées dans les instituts universitaires de formation des maîtres ;
- il assure la formation des formateurs ;
- il conduit des études et des recherches en éducation, notamment à des fins pédagogiques ;
- il est un centre de ressources scientifiques, pédagogiques et humaines ;
- il contribue à l’information, à la documentation, à l’édition et à la diffusion d’outils en liaison avec le Centre national de documentation pédagogique (CNDP).
La prise en charge des frais de transport frais de transport scolaire
Le régime de droit commun indique que le département a la responsabilité de l’organisation et du financement des transports scolaires dont ceux concernant les élèves et étudiants gravement handicapés. Les transports scolaires constituent un service public (L. 231-11 du Code de l’éducation, loi du 13 août 2004). Par aménagement de cette règle, en Île-de-France exclusivement, l’organisation et le financement des transports scolaires en général ainsi que les transports individuels des élèves handicapés vers des établissements scolaires rendus nécessaires du fait de leur handicap sont supportés par le Syndicat des transports d’Île-de-France (L. 213-13 et 14 du Code de l’éducation).
Notes
Note 01 Les commissions issues de la loi du 30 juin 1975 chargées d'évaluer et orienter la scolarité des enfants suivis par un dispositif de l'Éducation nationale s'appelaient respectivement : CCPE (Commission de circonscription pré-élémentaire et élémentaire) et CCSD (Commission de circonscription du second degré). Retour au texte
Note 02 L'ensemble des circulaires de l'Éducation nationale concernant les enfants handicapés sont consultables sur le site de l'INSHEA http://www.inshea.fr/ à la rubrique « Ressources » puis « Documentation » puis « Textes réglementaires ». Retour au texte
Note 03 Les SEGPA s'adressent à un public plus large que les seuls élèves handicapés. L'orientation en SEGPA est assurée par une Commission départementale d'orientation placée sous la responsabilité de l'Éducation nationale. Retour au texte
Note 04 Le site de l'AGEFIPH met à disposition un guide de l'apprentissage propre à la situation d'apprenti en situation de handicap. Retour au texte
Note 05 Pour plus d'information consulter le site de l'INSHEA : http://www.inshea.fr/. Retour au texte