On retrouve des interprétations différentes aux sein des administrations centrales comme dans les instances départementales. C’est une réalité dans le domaine de l’éducation, dans les aides apportées par les départements mais aussi et particulièrement au niveau de l’Etat, sur les dotations aux communes.
Dans nombre de départements la notion de commune rurale est plus restrictive pour la Direction Académique des Services de l’Education Nationale que pour le Département. Le DASEN qui est aux manettes pour les ouvertures et fermetures de postes d’enseignants a tout intérêt à ce que ne nombre de communes rurales, sur lesquelles les seuils sont plus contraignants soit le moins élevé possible. Le Département qui finance largement les projets communaux aura une autre perception, plus large cette fois car soucieux du développement de l’ensemble du territoire.
Sur les dotations, l’impression est que la notion de ruralité est une variable d’ajustement, au détriment des communes rurales. On bouge le curseur de population et on peut ainsi utiliser la dotation à autre chose que ce pour quoi elle était destinée à l’origine.
La Dotation de Solidarité Rurale en est l’exemple caricatural. Elle est en principe destinée aux communes rurales comme son nom l’indique, mais une grande partie est affectée aux communes urbaines, celles de plus de 3 500 habitants. Ainsi, comme le note le rapport de l’Observatoire des Finances et de la Gestion Locale, 67% de ces communes urbaines, soit 3 360 d’entre elles perçoivent de la Dotation de Solidarité Rurale, et sur des montants importants puisqu’elle est liée au nombre d’habitants. Ou alors on s’attache au mot solidarité et la cohérence voudrait que la solidarité fonctionne également dans l’autre sens. Mais la Dotation de Solidarité Urbaine est intégralement réservée aux communes urbaines.
Toujours sur l’aspect financier, la Dotation d’Equipement des Territoires Ruraux est une autre curiosité, à dénoncer aussi. On entend tous résonner le mot « rural » dans cette dotation. Or une bonne partie de la DETR est affectées aux communes non rurales.
Ainsi les communes urbaines de plus de 3 500 habitants et de moins de 20 000 habitants peuvent percevoir de la DETR, sur des projets en général plus imposants et donc plus consommateurs de DETR puisqu’attribuée en pourcentage du coût global.
Plus fort encore, des communes de plus de 50 000 habitants voire plus de 100 000 habitants peuvent percevoir de la DETR si ce sont des communes nouvelles composées notamment d’au moins une commune auparavant éligible à la DETR.
La réalité est que les dotations qualifiées de « rurales » sont en bonne partie détournées au profit de communes qui n’ont aucune caractéristique rurale et cela au détriment de l’ensemble des 31 608 communes rurales. D’autant qu’actuellement La Dotation Globale de Fonctionnement pénalise les communes rurales, la dotation de base étant de 64 € par habitant pour celles-ci alors qu’elle monte à 128 € par habitant pour les villes les plus importantes.
Il conviendrait donc de redéfinir ce qu’est la ruralité mais aussi de préciser ce qu’est une commune rurale. L’Association des Maires Ruraux de France attend impatiemment les conclusions des travaux de l’INSEE sur le sujet.
Il conviendrait d’appeler également un chat, un chat et d’en finir avec l’utilisation du qualificatif « rural » à des « objets » qui n’ont aucun trait à la ruralité.
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