Menée par les députés Julien Aubert (LR), Laure de La Raudière (UDI-Agir) et Jean-Michel Mis (LREM), la mission d’information sur les usages des blockchains a présenté un rapport d’information devant la commission des lois de l’Assemblée nationale mercredi 12 décembre. Il devrait bientôt être accessible depuis le site de la Chambre basse.
Pour les auteurs, un constat s’impose : la France ne doit pas passer à côté de ce phénomène. « Alors que nos économies connaissent une transformation accélérée grâce à la dématérialisation croissante des échanges, la France ne saurait demeurer à l’écart de l’étonnant foisonnement d’initiatives et d’innovation que suscite aujourd’hui l’affirmation du secteur des blockchains, » est-il écrit dans le rapport.
Finalement, ce texte contient vingt propositions. La dernière intéresse tout particulièrement les collectivités territoriales.
Des services publics sur blockchain ?
Pour la mission d’information, les administrations doivent être des moteurs et se saisir de ce levier possible de modernisation des administrations et des services publics. A travers leur 20e et dernière proposition, ils invitent ainsi à la poursuite de la réflexion sur les chantiers de la transformation qui pourrait être conduite « dans l’amélioration des services publics grâce au potentiel de certification, de reconnaissance de l’identité numérique et d’archivage des blockchains, par exemple pour favoriser la participation citoyenne (organisation de consultations locales dématérialisées et sécurisées), pour délivrer plus rapidement des titres administratifs (carte grise, dossier médical partagé…) ou pour archiver en confiance des diplômes universitaires ».
Une conviction qu’elle tire de plusieurs exemples à travers le monde où la blockchain est déjà utilisée dans l’exercice de certaines prérogatives publiques.
Un remède à l’absence de cadastre
La blockchain est utilisée pour remédier à l’absence ou à la déficience d’un cadastre dans différents pays. En Géorgie, le recours à un protocole de blockchains a permis de certifier des propriétés immobilières dans des circonstances historiques troublées. De même, la tenue du registre des terres appartenant à l’État du Honduras repose aujourd’hui sur cette technologie. On signalera enfin l’initiative d’une organisation non gouvernementale au Ghana, pays dans lequel près de 90 % des terres rurales ne sont pas enregistrées sur des bases de données officielles, et où de nombreux citadins n’ont pas encore d’adresse officielle, qui a abouti à la mise en place un cadastre.
Pour une identité numérique
Autre exemple d’utilisation de la blockchain : l’Estonie, où l’apport de la blockchain est utilisé pour la simplification des relations entre les usagers et les services publics. Cette ex-république soviétique a en effet engagé, dès le début des années 2000, « une politique fondée sur l’émission d’une carte d’identité électronique et l’interconnexion progressive de l’ensemble des bases de données numériques des services de l’État. Elle offre aujourd’hui, par l’interconnexion de 170 bases de données publiques, plus de 2 000 services à plus de 900 organisations (institutions, ministères et entreprises privées). » Depuis 2008, ces services reposent sur des blockchains, ce qui permet de vérifier la consultation ou le changement éventuel d’une donnée.
La délivrance automatique d’actes certifiés
Le canton de Genève a recours depuis 2017 à une blockchain afin d’assurer la certification des données contenues dans le registre du commerce et la délivrance d’actes certifiés de façon automatique. Le protocole Ethereum permet la délivrance d’un nombre illimité d’actes administratifs pour un coût de « production » annuel très modique, estimé à l’équivalent de 17,54 euros. Il est désormais envisagé d’employer la technologie afin d’« industrialiser » la délivrance de nombreux actes administratifs (actes de naissance, de décès, etc.).
Le canton entend par ailleurs développer l’usage de la signature électronique et de permettre l’obtention d’une identité numérique afin de rendre possible des échanges entre les résidents et ses services.
Des prémisses en Bretagne
La mission estime que ces exemples invitent « à considérer l’apport possible de la technologie des blockchains à l’organisation, ainsi qu’au fonctionnement des services publics et des administrations en France en termes de coût, d’efficacité des ressources allouées et de simplification des démarches de l’usager. »
D’ailleurs, ils ne sont pas les seuls à le penser puisqu’un atelier de travail a été lancé avec le Secrétariat général pour les affaires régionales (SGAR) de Bretagne pour réfléchir à la traçabilité des aides publiques.
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