L’entreprise publique Eau de Paris fait figure de bon élève, avec des indicateurs de performance au vert et l’un des prix les plus bas en France. Pour la régie, il ne s’agit pas de calculer les kilomètres de conduites à renouveler, mais plutôt de questionner les stratégies patrimoniales sur le long terme. Fondée sur un juste équilibre entre entretien, rénovation et renouvellement, une politique d’investissement raisonné se traduit par une trajectoire financière sincère, avec un niveau de prix suffisant pour autofinancer le renouvellement courant des équipements. A Paris, l’ère des grands travaux semble révolue. Le patrimoine peut être optimisé sans faire porter aux usagers d’aujourd’hui et de demain le poids d’une politique de surinvestissement.
Ailleurs, en France, certains réseaux accusent le poids des ans. Conséquences ? Des fuites importantes, représentant en moyenne 20% de l’eau mise en distribution à l’échelle nationale, un gâchis d’énergie et de réactifs. Une minorité de territoires souffrent d’un retard dans le renouvellement de leurs canalisations. De petits services, structurellement défavorisés, ne disposent pas en effet des capacités techniques et financières pour de tels investissements.
La solidarité territoriale pallie cette situation : c’est l’une des missions des agences de l’eau. Eau de Paris contribue à ce système qui fait ses preuves en versant chaque année 150 millions d’euros de redevances à l’agence de l’eau Seine-Normandie contre 12 millions d’euros d’aides reçues. Or la loi de finances 2018 n’a pas ménagé ces établissements en limitant leurs recettes, alors que leurs missions ont été élargies au financement des politiques de biodiversité. Pour Eau de Paris, le gouvernement devrait cesser ces prélèvements.
D’autres solutions techniques et financières existent. Pourquoi ne pas aider les collectivités à bénéficier des fonds européens et des taux de la banque européenne d’investissement ? Pourquoi ne pas reconduire l’enveloppe ″Prêt à croissance verte″ de la Caisse des dépôts et consignations ? Intercommunalité, assistance technique des départements, mutualisations public/public : avec une organisation plus souple, les collectivités optimiseront également leurs coûts.
Un éventail d’outils peut être déployé pour que chaque collectivité exerce au mieux ″sa″ compétence eau et réponde aux enjeux de gestion patrimoniale, sans obérer les défis à venir. Nos enfants seront confrontés aux conséquences majeures du dérèglement climatique. A cela s’ajoutent les enjeux de préservation de la qualité de la ressource et des milieux, ainsi que la future directive eau potable : exigences de traitement renforcées, de transparence et de traçabilité. Et une mise en œuvre concrète du droit d’accès à l’eau pour les plus démunis.
Nous, territoires, écrivons ensemble une politique résolue au service du développement durable. L’eau, bien commun de l’humanité, doit être gérée de façon responsable et solidaire. Espérons que cette préoccupation sera au cœur de la deuxième phase des Assises.
Thèmes abordés