Sept régions françaises se sont rendues à Bruxelles, le 1er février, pour soutenir le nouveau classement des régions bénéficiaires des fonds européens imaginé par la Commission. Elles ont remis une contribution commune au commissaire à la Politique régionale, Johannes Hahn.
Aujourd’hui, l’argent européen est attribué aux territoires classés en deux catégories. Ceux dont le produit intérieur brut (PIB) dépasse 75% de la moyenne européenne sont considérés comme les plus avantagés et touchent une petite partie des fonds. Les autres, plus pauvres, profitent à plein des financements de la politique régionale.
La négociation sur le budget de l’UE pour la période 2014-2020 présente des risques pour les régions. Les Etats ont décidé de ne pas augmenter leur contribution. Et les financements alloués aux territoires européens pourraient diminuer.
Objectif dit « intermédiaire » – Dans son cinquième rapport de cohésion, Bruxelles propose de créer une troisième catégorie de régions bénéficiaires des fonds. Elle viserait les régions dont le PIB est compris entre 75 et 90% de la moyenne européenne. Une manière de rassurer certains territoires, notamment français, qui craignent de voir réduire les financements européens dont ils disposent. Ceci leur permettrait de maintenir le niveau des subventions auxquels ils ont droits.
Selon les chiffres de 2007, les sept régions signataires (Basse Normandie, Corse, Languedoc Roussillon, Limousin, Lorraine, Nord-Pas de Calais, Picardie) pourraient bénéficier de ce nouvel objectif dit «intermédiaire».
«La mise en place de cette troisième catégorie de régions (…) favorisera la mise en place de conditions optimales pour que nos régions atteignent les objectifs de croissance durable, d’emploi, d’inclusion sociale et de compétitivité», peut-on lire dans le texte.
Deux catégories pour 300 régions – «Ces régions ont encore des difficultés de développement», plaide le président (PS) de la région Basse Normandie, Laurent Beauvais, qui a mené la délégation à Bruxelles. Il réclame du gouvernement français qu’il «clarifie» sa position.
«On ne peut pas rester avec deux catégories pour 300 régions européennes», juge pour sa part le vice-président (PS) du Conseil régional de Basse Normandie, Alain Tourret.
«Les régions intermédiaires seront un problème très grave et très difficile pour les Etats membres», a expliqué la présidente de la commission du développement régional du Parlement Danuta Hübner, au cours d’une rencontre avec les Français, à Bruxelles.
L’ancienne commissaire à la Politique régionale a encouragé les élus locaux à «faire pression» auprès de leur gouvernement pour avoir gain de cause. «Cette catégorie a été créée pour la France, pour les régions françaises», estime l’eurodéputée polonaise. «Si votre gouvernement ne soutient pas clairement cette proposition, elle peut disparaître», a-t-elle tranché.
Clarifications – Mais pour Danuta Hübner, la Commission doit aussi «clarifier» son idée. Quelles seront les régions concernées ? Se verront-t-elles attribuer des objectifs spécifiques ? Pourront-elles bénéficier de tous les types de fonds ? Autant de questions qui restent pour le moment en suspens.
Les régions françaises plaident pour que cette catégorie intermédiaire ne soit pas uniquement réservée à d’anciennes régions «pauvres». «Il est clair que l’on ne doit pas avoir à regarder l’histoire de la région. Pour vous, c’est la question-clé», a estimé Mme Hübner. En tout, une quarantaine de territoires européens pourrait être concernée par cet objectif.
«Les priorités que vous défendez à sept, il faut les défendre à quarante», a affirmé l’eurodéputée (Europe écologie – Verts ALE) Karima Delli. De son côté, son collègue François Alfonsi (Europe écologie – Verts ALE) a plaidé pour une organisation «durable» de la politique de cohésion entre 2014 et 2020. «Pour la période actuelle, nous avons mis sur pied une architecture dans l’urgence, pour faire face à l’intégration des 10 nouveaux Etats membres. Ce n’est plus le cas aujourd’hui», a-t-il jugé.
Schizophrénie – De son côté, le président du comité des régions, Michel Delebarre, est revenu sur le rôle du ministre Bruno Le Maire, à la fois responsable de la politique régionale et de la politique agricole commune. «La PAC et la politique de cohésion sont deux éléments auxquels la France doit être très attentive», a affirmé M. Delebarre. «Un ministre schizophrène, c’est toujours difficile à accompagner dans le mouvement», a-t-il ironisé.
Au cours de sa rencontre avec les élus, le commissaire à la Politique régionale, Johannes Hahn, s’est montré plutôt favorable aux demandes des Français. A condition qu’il dispose d’un «budget constant» après 2013.
En attendant, il se dit «stupéfait» par la frilosité de Paris sur ce point. Au cours de la réunion, Johannes Hahn s’est étonné que «la France renonce sans même se battre» à cet objectif intermédiaire, rapportent des participants.
Mais cette attitude n’est pas gravée dans le marbre. La France n’a pas encore arrêté sa position officielle. Un haut fonctionnaire s’est même montré favorable, fin novembre, à la proposition de la Commission. Paris devrait rendre sa copie à Bruxelles d’ici à la fin février.
Références
Contribution des régions françaises pour défendre une catégorie intermédiaire, 1er février 2011
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