Quelques bases juridiques clés
- Article L. 2211-1 et suivants du Code de la Santé publique.
- Article R. 2212-1 et suivants du Code de la Santé publique.
Il y a eu en France en 2007 plus de deux cent mille IVG (non médicale).
L’interruption volontaire de grossesse interruption volontaire de grossesse trouve sa source dans une loi du 17 janvier 1975 dite loi « Veil » du nom du ministre de la Santé de l’époque. Cette loi a été modifiée à plusieurs reprises. On peut citer, par exemple, la loi du 4 juillet 2001 dont les apports ont été majeurs : allongement du délai de l’IVG IVG à la fin de la douzième semaine de grossesse grossesse au lieu de dix semaines auparavant ; la consultation sociale préalable devient facultative pour les majeures ; pour les mineures non émancipées, le principe du consentement du titulaire de l’autorité parentale autorité parentale ou du représentant légal représentant légal est aménagé (1). On remarque qu’une ordonnance du 4 septembre 2003 est venue aussi modifier la loi du 17 janvier 1975.
Le législateur a voulu faire de l’atteinte à la vie une exception comme en témoigne le Code de la santé publique. En effet, on peut lire ainsi que « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ».
De la loi du 17 janvier 1975 il ressort que l’on trouve aujourd’hui deux sortes d’interruption de grossesse : l’interruption volontaire de grossesse interruption volontaire de grossesse d’une part, et, d’autre part, l’interruption de grossesse pour raison médicale interruption de grossesse pour raison médicale .
Les différentes formes d’interruption de grossesse
L’interruption volontaire de grossesse
La loi vient nous donner un certain nombre d’informations dans ce domaine, notamment en ce qui concerne les conditions dans lesquelles une telle interruption est possible.
La femme enceinte doit, dans un premier temps, se trouver dans « un état de détresse » afin de demander à un médecin l’interruption de sa grossesse. La jurisprudence jurisprudence a pu préciser qu’il appartenait à la personne elle-même d’apprécier si sa situation justifiait une IVG (CE, ass., 31 octobre 1980, Lahache ).
Cette interruption ne peut pas être pratiquée après les douze semaines de grossesse (vingt-deux semaines aux Pays-Bas et vingt-quatre semaines en Angleterre).
L’interruption de grossesse ne peut être effectuée que par un médecin médecin . Elle ne peut, en outre, avoir lieu que dans un établissement privé ou public. La question s’est posée de savoir qu’elle était la responsabilité d’un médecin du fait de l’échec d’une interruption de grossesse non thérapeutique. La jurisprudence a pu considérer que l’existence d’un enfant même après l’échec d’une tentative d’IVG ne peut à elle seule permettre de mettre en cause la responsabilité d’un médecin (Cass., civ., 25 juin 1991). La jurisprudence a également posé le principe selon lequel la naissance d’un enfant après l’échec d’une IVG n’est pas génératrice d’un préjudice permettant d’engager la responsabilité responsabilité d’un hôpital sauf circonstances particulières pouvant être invoquées par la mère (CE., 2 juillet 1982, Dlle Riou , Lebon 266). Cela signifie, a contrario , qu’en cas de circonstances particulières une telle responsabilité est possible. Il en a été ainsi, par exemple, de la malformation d’un enfant due à l’échec d’une tentative d’IVG (CE., 27 septembre 1989, Mme Karl , Lebon, 176) ou encore des dommages subis par la mère au cours d’une IVG (CE 4 mars 1988, Mme P , Lebon P. 109).
Un médecin peut-il refuser de faire une IVG ? Un médecin n’est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse mais il doit alors informer, sans délai, l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette intervention. Aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu’il soit, n’est tenu de concourir à une interruption de grossesse. Un établissement de santé privé peut refuser que des interruptions volontaires de grossesse soient pratiquées dans ses locaux. Toutefois, dans le cas où l’établissement a demandé à participer à l’exécution du service public hospitalier service public hospitalier ce refus ne peut être opposé que si d’autres établissements sont en mesure de répondre aux besoins locaux. Il faut savoir qu’un décret du 27 septembre 1982 est venu préciser que tous les hôpitaux publics disposant d’un service de maternité ou de chirurgie doivent se doter de moyens permettant la pratique correcte des IVG. La jurisprudence est venue consacrer plusieurs idées : la clause de conscience d’un chef de service médecin hospitalier ne peut faire obstacle à la création d’un service autonome d’interruption de grossesse (CE 8 janvier 1982, Lambert ) ; un pharmacien ne peut se prévaloir d’une clause de conscience pour refuser de délivrer des produits contraceptifs produit contraceptif .
Certaines obligations pèsent sur le médecin lors de la procédure. Le médecin sollicité par une femme en vue de l’interruption de sa grossesse doit, dès la première visite, informer celle-ci des méthodes médicales et chirurgicales d’interruption de grossesse et des risques et des effets secondaires potentiels. Il doit lui remettre un dossier-guide dossier-guide (2), mis à jour au moins une fois par an, comportant notamment le rappel des dispositions des articles L. 2212-1 (3) et L. 2212-2 (4), la liste et les adresses des organismes mentionnés à l’article L. 2212-4 (5) et des établissements où sont effectuées des interruptions volontaires de la grossesse. Il faut savoir que la non-observation de ces obligations constitue une faute disciplinaire faute disciplinaire (CE, 8 février 1980, Maugard , D. 1981, IR, 254, P. 1). Si la femme renouvelle, après les deux consultations (médecin et conseiller conjugal conseiller conjugal par exemple) sa demande d’interruption de grossesse, la loi précise que le médecin doit alors lui demander une confirmation écrite. Il ne peut accepter cette confirmation qu’après l’expiration d’un délai d’une semaine suivant la première demande de la femme. Cependant, on remarque que dans le cas où le délai légal des douze semaines risquerait d’être dépassé le médecin peut accepter avant la semaine de carence la confirmation. Cette confirmation ne peut intervenir qu’après l’expiration d’un délai de deux jours suivant le premier entretien avec le médecin. Une fois la décision confirmée alors le médecin pourra pratiquer lui-même l’IVG. S’il ne la fait pas lui-même, il a alors obligation de restituer à la femme sa demande tout en lui remettant un certificat justifiant qu’il s’est conformé aux différentes prescriptions touchant la procédure (c’est-à-dire qu’il y a bien eu d’une part, un premier entretien avec la personne et ; d’autre part, une consultation avec une personne qualifiée personne qualifiée telle que, par exemple, une conseillère familiale conseiller familiale ). Avec ce certificat, la femme pourra se présenter devant le médecin de son choix. Quel que soit le médecin pratiquant l’IVG, celui-ci devra informer les autorités de l’État. En effet, la loi souligne que toute interruption de grossesse doit faire l’objet d’une déclaration établie par le médecin et adressée par l’établissement où elle est pratiquée au médecin inspecteur régional de santé publique. Cette déclaration ne doit faire aucune mention de l’identité de la femme.
Il est systématiquement proposé avant l’interruption volontaire de grossesse, à la femme majeure, une consultation avec une personne (6) ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre personne qualifiée dans un établissement d’information, de consultation ou de conseil familial, un centre de planification ou d’éducation familiale, un service social ou un autre organisme agréé. Cette consultation préalable comporte un entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés à la situation de l’intéressée lui sont apportés. Les personnels des organismes mentionnés ici sont soumis aux dispositions des articles 226-13 et 226-14 du Code pénal. Les textes viennent nous préciser les lieux où doit être donnée cette consultation. Il est précisé ainsi qu’elle doit être donnée : soit dans un établissement d’information, de consultation ou de conseil familial, créé en application de l’article L. 2311-2 ; soit dans un centre de planification ou d’éducation familiale agréé en application de l’article L. 2311-2 ; soit dans un service social relevant d’un organisme public ou privé et dont la qualité de service social a été reconnue par décision du préfet prise en application de l’article 9 du décret n° 59-146 du 7 janvier 1959 relatif à la liaison et à la coordination des services sociaux ; soit dans un organisme agréé dans les conditions fixées aux articles R. 2212-2 et R. 2212-3 du CSP (Code de la santé publique).
Postérieurement à l’IVG : il doit être systématiquement proposé à la femme majeure une consultation avec une personne qualifiée (par exemple conseiller conjugal) ; une consultation avec un médecin, ayant notamment pour but une nouvelle information sur la contraception, est obligatoirement proposée aux mineures ; tout établissement dans lequel est pratiquée une interruption de grossesse doit assurer, après l’intervention, l’information de la femme en matière de régulation des naissances.
La question des mineurs
- Si la femme est mineure non émancipée, le consentement de l’un des titulaires de l’autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal doit être recueilli. Ce consentement est joint à la demande qu’elle présente au médecin en dehors de la présence de toute autre personne.
- Si la femme mineure non émancipée désire garder le secret, le médecin doit s’efforcer, dans l’intérêt de celle-ci, d’obtenir son consentement pour que le ou les titulaires de l’autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal soient consultés ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de l’entretien avec une personnalité qualifiée dans un établissement de conseil familial par exemple.
- Si la mineure ne veut pas effectuer cette démarche ou si le consentement n’est pas obtenu, l’interruption volontaire de grossesse ainsi que les actes médicaux et les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la demande de l’intéressée. Dans ce cas, la mineure doit se faire accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix.
- Pour la femme mineure non émancipée, la consultation préalable avec une personne qualifiée telle que, par exemple, une conseillère conjugale, est obligatoire et l’organisme concerné doit lui délivrer une attestation de consultation. Si elle exprime le désir de garder le secret à l’égard des titulaires de l’autorité parentale ou de son représentant légal, elle doit être conseillée sur le choix de la personne majeure susceptible de l’accompagner dans sa démarche. Il s’agira d’une personne qu’elle choisira.
L’interruption de grossesse pour raison médicale
L’interruption volontaire d’une grossesse peut, à toute époque, être effectuée pour raisons médicales. Cependant la loi vient encadrer très strictement une telle intervention.
L’interruption ne peut être pratiquée que si deux médecins membres d’une équipe pluridisciplinaire équipe pluridisciplinaire attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, soit que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, soit qu’il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.
Dans le cas où l’interruption de grossesse est envisagée au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, l’équipe pluridisciplinaire chargée d’examiner la demande de la femme comprend au moins trois personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, un médecin choisi par la femme et une personne qualifiée tenue au secret professionnel qui peut être un assistant social ou un psychologue. Les deux médecins précités doivent exercer leur activité dans un établissement de santé. Lorsque l’interruption de grossesse est envisagée au motif qu’il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, l’équipe pluridisciplinaire chargée d’examiner la demande de la femme est celle d’un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal. Lorsque l’équipe du centre précité se réunit, un médecin choisi par la femme peut, à la demande de celle-ci, être associé à la concertation. Dans les deux cas, préalablement à la réunion de l’équipe pluridisciplinaire compétente, la femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par tout ou partie des membres de ladite équipe.
Les dispositions des articles L. 2212-2 et L. 2212-8 à L. 2212-10 du Code de la santé publique sont applicables à l’interruption volontaire de la grossesse pratiquée pour motif médical.
L’IVG et le droit pénal
Le droit pénal intervient de façons diverses lorsque l’on aborde la question de l’IVG.
Le droit pénal comme garant des règles de procédure
L’interruption de la grossesse sans le consentement de l’intéressée est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
L’interruption de la grossesse d’autrui est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende lorsqu’elle est pratiquée, en connaissance de cause, dans l’une des circonstances suivantes : après l’expiration du délai dans lequel elle est autorisée par la loi, sauf si elle est pratiquée pour un motif médical ; par une personne n’ayant pas la qualité de médecin ; dans un lieu autre qu’un établissement d’hospitalisation public ou qu’un établissement d’hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par la loi, ou en dehors du cadre d’une convention conclue selon les modalités prévues à l’article L. 2212-2. Cette infraction est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende si le coupable la pratique habituellement. La tentative des délits prévus au présent article est punie des mêmes peines.
Le fait de procéder à une interruption de grossesse après diagnostic prénatal diagnostic prénatal sans avoir respecté les modalités prévues par la loi est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
Le fait de fournir à la femme les moyens matériels de pratiquer une interruption de grossesse sur elle-même est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Ces peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende si l’infraction est commise de manière habituelle. En aucun cas, la femme ne peut être considérée comme complice de cet acte (la prescription ou la délivrance de médicaments médicament autorisés ayant pour but de provoquer une interruption volontaire de grossesse ne peuvent être assimilées au délit délit susmentionné).
Le droit pénal comme garant du droit à l’IVG
Le droit pénal sanctionne les faits consistant à entraver une IVG. C’est ainsi qu’est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher une interruption de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8 : soit en perturbant de quelque manière que ce soit l’accès aux établissements établissement mentionnés à l’article L. 2212-2, la libre circulation des personnes à l’intérieur de ces établissements ou les conditions de travail des personnels médicaux et non médicaux ; soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d’intimidation à l’encontre des personnels médicaux et non médicaux travaillant dans ces établissements, des femmes venues y subir une interruption volontaire de grossesse ou de l’entourage de ces dernières.
On remarque qu’afin de faciliter l’engagement des poursuites le législateur a donné une place particulière aux associations. En effet, toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, dont l’objet statutaire comporte la défense des droits des femmes à accéder à la contraception contraception et à l’interruption de grossesse, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions infraction prévues par l’article L. 2223-2 lorsque les faits ont été commis en vue d’empêcher ou de tenter d’empêcher une interruption volontaire de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8 du CSP.
Thèmes abordés
Notes
Note 01 La mineure pourra bénéficier d'une IVG sans le consentement des parents même si le principe est de tout faire afin de recueillir l'autorisation des parents. Retour au texte
Note 02 Il revient aux directions départementales des affaires sanitaires et sociales d'assurer la réalisation et la diffusion des dossiers-guides destinés aux médecins. Retour au texte
Note 03 « La femme enceinte que son état place dans une situation de détresse peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse. Cette interruption ne peut être pratiquée qu'avant la fin de la douzième semaine de grossesse. » Retour au texte
Note 04 « L'interruption volontaire d'une grossesse ne peut être pratiquée que par un médecin. Elle ne peut avoir lieu que dans un établissement de santé, public ou privé, ou dans le cadre d'une convention conclue entre le praticien ou un centre de planification ou d'éducation familiale ou un centre de santé et un tel établissement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ». Retour au texte
Note 05 « Il est systématiquement proposé, avant et après l'interruption volontaire de grossesse, à la femme majeure une consultation avec une personne ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre personne qualifiée dans un établissement d'information, de consultation ou de conseil familial, un centre de planification ou d'éducation familiale, un service social ou un autre organisme agréé. Cette consultation préalable comporte un entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés à la situation de l'intéressée lui sont apportés [...]. Chaque fois que cela est possible, le couple participe à la consultation et à la décision à prendre. » Retour au texte
Note 06 Cette personne sera dans ce cas soumise au secret professionnel dont la violation est susceptible d'entraîner des sanctions pénales (art. L. 226-13 CP). Retour au texte