C’est entendu : chaque contrat est unique et les conditions de l’équilibre économique lui sont propres. Mais les renégociations, comme les conclusions de nouveaux marchés, se heurtent aux mêmes points sensibles.
1- Les frais financiers
Grand classique du rafraîchissement des relations contractuelles : la révision des taux d’intérêt que l’opérateur applique aux emprunts qu’il a contractés et, le cas échéant, à la dette qu’il a rachetée à la collectivité. La Fédération professionnelle des entreprises de l’eau se montre de bonne volonté. « Les taux ont baissé depuis les années 90, il est normal que nous les corrigions », admet Igor Semo, président de la commission économique. Dans l’avenant conclu fin 2007, le Grand Lyon a obtenu une baisse des taux d’intérêt pratiqués par ses opérateurs d’eau potable : de 9,94 % à 4,63 % pour Veolia et de 11,43 % à 6,3 % pour SDEI.
Concernant le coût de la dette reprise en 1986 par Veolia – qui l’a depuis renégociée –, l’ajustement est jugé insatisfaisant. « En 2006, 26 millions d’euros entraient dans les caisses de l’entreprise, qui ne remboursait que 9 millions, indique Gérard Claisse, vice-président chargé de la participation citoyenne. Pour les prochaines années, la dette continuera à générer des recettes sensiblement supérieures aux charges de remboursement. »
2- Le besoin en fonds de roulement
C’est généralement le délégataire d’eau potable qui adresse à l’abonné la facture, incluant le coût de l’eau du robinet, de l’épuration ainsi que les taxes et les redevances prélevées par l’Etat et les agences de l’eau. Les deux derniers éléments, perçus pour compte de tiers par le premier maillon de la chaîne, ne sont pas reversés immédiatement à leur destinataire. La collectivité peut trouver là matière à rogner sur les frais financiers. « L’opérateur collecte des sommes qu’il fait fructifier sans que cela apparaisse dans les comptes, c’est du “hors-bilan”, décrypte Sébastien Guénégou, de Finance Consult. Ce produit financier masqué relativise les prétendus inconforts de trésorerie. Un apparent besoin en fonds de roulement ne signifie pas qu’il n’y a pas de l’argent qui travaille, source de produit indu sur l’exploitation. »
3- Les charges de structure
La mutualisation des dépenses entre plusieurs contrats – impossible en régie – est dans l’intérêt des collectivités, affirment les majors. Difficile à vérifier dès lors qu’il est « impossible de retracer les flux dans l’organigramme d’un groupe », note Alain Hue, PDG de Finance Consult. Ainsi, les opérateurs ne raisonnent pas en effectifs affectés à un service, mais en équivalents temps plein. « Or, rien ne dit qu’une personne affectée à un contrat ne travaille pas sur un autre, à mi-temps. Idem pour les véhicules. »
Attention aussi à la répartition des charges au prorata de la valeur ajoutée du contrat. Avant renégociation, Lyon payait « 50 % des charges du centre régional, pour 25 % des abonnés », indique Gérard Claisse. Pour recaler les frais généraux, on invoquera le meilleur sort fait aux collectivités de la même zone et de taille équivalente. Selon Patrice Lavisse, directeur du pôle « eau » de DE Conseil, le rapport entre charges de structure et charges d’exploitation devrait tendre vers 15 %.
4- La formule de révision
Le prix est annuellement indexé sur une formule devant refléter le coût du service dans ses diverses composantes (énergie, personnel, travaux, etc.). Ce « coefficient k », qui fera évoluer la rémunération du délégataire, doit être le moins inflationniste possible. Celui renégocié par le Grand Lyon aurait contenu à 1,8 % la hausse moyenne de 4 % par an observée de 2000 à 2006. La communauté urbaine a, en outre, obtenu que la part fixe de la rémunération de l’opérateur soit portée de 15 % à 30 %.
5- Les provisions de renouvellement
Inutile d’espérer récupérer un chèque sur les provisions non dépensées par l’opérateur, mieux vaut viser la réinjection de celles-ci dans un programme de travaux, conseillent les assistants à maîtrise d’ouvrage. Les délégataires ont accumulé des montants appréciables grâce à ces sommes non réinvesties. « Il s’agissait d’une garantie que l’équipement serait remis à la collectivité en bon état, le suivi de la dépense n’était pas juridiquement précisé par le passé », justifie-t-on à la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau. Où la polémique est jugée exagérée : « L’opérateur, qui veut être reconduit, ne laisse pas se dégrader l’outil dont il a la charge », assure Igor Semo. La loi sur l’eau du 30 décembre 2006 impose désormais un chiffrage annuel des provisions, accolé à un programme de renouvellement, et la restitution à la collectivité des sommes non dépensées en fin de contrat.