Mégots et filière REP
Il y a en moyenne en France 1,3 mégot abandonné tous les 10 mètres de voirie, allant de 0,8 mégot en milieu rural jusqu‘à 4,5 mégots en zone urbaine dense, selon l’étude de gisement Alcome. Une bombe toxique, composée de plastique et de substances nocives, pour la biodiversité et un coût pour les collectivités qui doivent assurer le nettoiement .
Face à cette problématique , une question a longtemps persisté : comment en venir à bout ? Une première réponse est apparue, avec la mise en place des filières à Responsabilité Élargie du Producteur (REP) et notamment celle dédiée aux produits du tabac. Le principe est simple : les fabricants et metteurs en marché doivent désormais financer la gestion des déchets issus de leurs produits.
C’est dans ce cadre qu’a été créé Alcome en 2021. L’éco-organisme a pour mission d’accompagner les collectivités en leur apportant un soutien financier et matériel pour le nettoiement, l’installation de cendriers et un soutien en communication à travers par exemple, des campagnes de sensibilisation. Pour les mairies, c’est un changement de paradigme : la lutte contre les mégots n’est plus un coût subi, mais un projet accompagné et une opportunité de rendre son territoire plus vert et plus propre.
Un enjeu touristique et psychologique
Cette pollution constitue aussi un handicap majeur pour l’attractivité touristique, surtout dans un contexte de « surtourisme » où l’expérience visiteur est scrutée à la loupe. Un environnement dégradé par les déchets impacte directement l’image d’une destination. Diarra Barry, chercheuse en sciences comportementales pour Alcome, décrypte le relâchement souvent observé chez les vacanciers : « Loin de chez eux, les fumeurs entrent dans un mode « détente » où les normes sociales habituelles peuvent s’assouplir. L’anonymat social joue aussi un rôle, car on se sent plus libre, moins jugé. Cependant, les facteurs contextuels, comme la présence ou l’absence de cendriers adaptés, jouent un rôle crucial ».
Sur le terrain, un élan collectif
À Banyuls-sur-Mer, la menace est prise très au sérieux. Afin de protéger sa biodiversité marine, la ville, soutenue par Alcome et intégrée au programme de site pilote a mis en place toute une série d’actions : distribution de cendriers individuels, installation de bornes de collecte, charte d’engagement avec les restaurateurs, agence de communication, interventions devant les écoles et même le recrutement de deux jeunes en service civique pour booster les actions de sensibilisation. Des actions, oui, mais aussi un esprit collaboratif dans l’ADN de l’éco-organisme qui permet une coopération durable avec les parties prenantes : « Alcome nous a vraiment accompagné financièrement et techniquement avec de nombreuses préconisations. Nous avons bénéficié du soutien d’une agence de communication mise à disposition par Alcome. Nous avons pu également échanger avec d’autres villes de dimension différentes mais avec des problématiques communes. Pour nous, c’est très précieux », explique Hélène Ferrer, chargée de mission développement durable pour la ville.
D’autres villes, soutenues par Alcome, ne ménagent pas leurs efforts pour réduire la présence des mégots par terre, comme Strasbourg ou encore Tours. Là-bas, ce sont les « nudges » (coups de pouce) qui font évoluer les mentalités : des marquages au sol ludiques ou des cendriers de sondage qui transforment le geste de jeter en une interaction positive. Résultat, aujourd’hui, les Strasbourgeois peuvent se targuer d’avoir des rues plus propres. La ville a constaté, en quelques mois, une forte diminution des jets de mégots dans les lieux dit statiques.
« Bien sûr, les outils ne suffisent pas toujours ! C’est un combat qui se mène avec toutes les parties prenantes ». « Il faut embarquer tout le monde et agir à tous les niveaux pour créer des résonances. C’est la clé du succès », résume ainsi Hélène Ferrer.