Depuis le port de l’Arcouest (Côtes d’Armor), il est bien difficile de percevoir le nouveau parc éolien offshore de Saint-Brieuc, qui a été officiellement inauguré le jeudi 18 septembre. Pourtant, certains autochtones estiment qu’il est possible de l’apercevoir depuis certains endroits de la côte, par beau temps, par exemple à Paimpol (Côtes-d’Armor) ou Saint-Malo (Ille-et-Vilaine).
62 éoliennes de 207 mètres
Situé à 16,3 km de la plus proche côte (le Cap Fréhel), ce parc est constitué de 62 éoliennes de 207 mètres de hauteur (soit l’équivalent de la tour Montparnasse à Paris, avec ses 59 étages). Elles sont réparties sur une superficie de 75 km2, suivant 7 lignes espacées chacune de 1300 mètres. Sur une même ligne, l’éloignement est de 1 000 mètres. Chaque éolienne repose sur une fondation à trois pieds immergée (appelée « jacket »), qui dépasse du niveau de la mer d’une hauteur oscillant entre 29 et 49 m.
Construit en moins de deux ans, ce parc est entré en activité en juillet dernier. Il affiche une puissance de 496 Mégawatts (soit la moitié d’un réacteur nucléaire), et produira l’équivalent de la consommation électrique (chauffage compris) de 835 000 habitants. Par rapport aux éoliennes terrestres, celles situées en mer peuvent fonctionner en quasi continu – il est prévu qu’elles tourneront 90% du temps -, du fait de vents plus constants, et ont des capacités de production bien supérieures.
Le 4e parc éolien marin
C’est l’espagnol Iberdrola qui a remporté, en 2012, cet appel d’offre du 4e parc éolien français, après l’attribution de ceux de Saint-Nazaire, Fécamp et Courseulles-sur-Mer (il existe en tout 12 projets de parcs).
Grâce au lancement successif de ces appels d’offres, les industriels du secteur ont fini par répondre présent et créer une filière locale. C’est le cas de Siemens Gamesa Renewable, qui a ainsi installé un site de production au Havre (employant 750 personnes) et qui a fourni les nacelles et pales du parc de Saint-Brieuc. Les mâts et les éléments internes des 62 éoliennes ont été assemblées par la société Haizea, en association avec la société française SPIE, sur le polder construit à Brest avec le soutien de la région Bretagne. Au total, Iberdrola estime que le développement et la construction du parc ont mobilisé plus de 1700 emplois en France, dont plus de 500 emplois en Bretagne.
Des actions pour minimiser l’impact sur la pêche
Mener à bien ce projet n’aura pas été simple, comme c’est le cas pour tout parc éolien, et peut-être même désormais pour toute grande infrastructure. A son lancement, il a fallu faire face à des tirs croisés des riverains, élus locaux, et surtout des acteurs de la pêche. Pour minimiser l’impact du parc sur cette activité, le projet a été aménagé par Iberdrola. « L’Etat avait défini une zone, et nous avons choisi de nous installer à 6 km au nord de cette zone, bien que les sols y soient plus durs, ce qui a compliqué l’installation des jackets qui soutiennent les éoliennes », explique Marie Tabar, directrice du développement offshore d’Iberdrola France.
Au final, la surface du parc éolien représentant 3% du gisement de pêche du bulot sur l’ensemble de la baie de Saint-Brieuc, et 1,5% du gisement de coquilles Saint-Jacques (1).
Le nombre de mats a été réduit à 62, contre 100 initialement prévus. L’espacement entre ces mats (sur une même ligne) a été augmenté, de 1000 à 1300 m, afin de faciliter le passage des bateaux. Depuis juillet dernier, les pêcheurs ont le droit de venir au sein du parc – tout comme les plaisanciers -, dans la mesure où ils respectent une distance minimale de 50 mètres avec les éoliennes.
« Les lignes d’éoliennes ont été orientées selon le cap 314°, pour donner la possibilité de pêcher aux ars trainants (au chalut par exemple) dans le parc. Il est aussi possible d’y pêcher aux arts dormants, à l’aide de casiers ou filets », explique Ailes Marines – nom de la société créé par Iberdrola pour ce projet.
Enfin, tous les câbles électriques ont été ensouillé (enterrés), ce qui a été facile lorsque le sol était sableux, mais plus compliqué – et donc coûteux – lorsqu’il était rocheux.
9 M€ de retombées fiscales
Pour faciliter l’acceptation d’un tel parc par le territoire, les retombées fiscales jouent bien sûr un rôle important. Et elles sont d’être négligeables, puisqu’elles devraient s’élever cette année à 9 M€. Rappelons que la taxe sur les éoliennes marines est fixée par l’Etat et que sont montant varie chaque année. Il est actuellement de 19 890 € € par mégawatt installé, selon le code général des impôts. La moitié de cette manne revient aux collectivités. Plus exactement aux communes situées à moins de 12 milles, selon une règle (liée à l’impact visuel) fixée par l’État. Seules 5 communes (2) vont en bénéficier, tandis que celles situées au-delà (Bréhat, Saint-Quay-Portrieux, Plouha, …) ne toucheront rien, tout comme l’intercommunalité de Saint-Brieuc Armor Agglomération (32 communes, 115 000 hab.). Sur ce dernier point, l’association Intercommunalités de France est monté au créneau en proposant un amendement en ce sens, lors du projet de loi de finances 2024. En vain.
A noter que les autres bénéficiaires de cette manne sont les pêcheurs (30%, pour leurs instances départementales, régionales et nationales, dont 800 000 euros pour les structures locales), tandis que l’OFB et la SNSM bénéficient des 20% restants.
Thèmes abordés
Notes
Note 01 Il ne se situe pas dans le gisement principal qui représente 85% du total, mais dans une partie du gisement secondaire (15% du total) Retour au texte
Note 02 La répartition se fait fonction de la population : Erquy, 27,18 % ; Fréhel, 17,01 % ; Pléneuf-Val-André, 25,65 % ; Plévenon, 14,11 % ; Plurien, 16,05 %. Retour au texte