La Ville de Paris a voté une hausse historique de son taux de taxe de foncier bâti en novembre : de 13,5 % à 20,5 % soit une hausse de 52 %. Cette hausse, aux conséquences à priori très locales, pourrait cependant avoir des conséquences sur la gestion publique de tout le secteur local. C’est l’effet dit Papillon.
L’ampleur historique de cette hausse a forcément polarisé l’attention médiatique avec tout ce que cela emporte de vérités et contre-vérités. D’autant qu’elle s’inscrit dans une promesse électorale de stabilité fiscale.
La ville de Paris a largement contribué à la confusion du débat en justifiant sa hausse par la faiblesse historique de son taux d’imposition comparativement aux autres communes françaises et plus particulièrement aux grandes villes (plus de 100 000 habitants, hors DOM). Jouer du prisme déformant du taux a entraîné, en creux, la stigmatisation des autres villes françaises méritant un tri du bon grain de l’ivraie.
La vraie pression fiscale parisienne
Paris a effectivement le taux de foncier bâti le plus modeste de France : il est au tiers de la moyenne nationale (40 %) et après la hausse atteindra la moitié.
Or, une fiscalité est le rapport entre un taux et une base (une assiette fiscale) et la seule appréhension du taux ne permet donc pas de mesurer le niveau de pression fiscale supporté par les redevables puisqu’il ne tient pas compte de l’importance des bases d’imposition des ménages.
Celles-ci sont nettement plus élevées dans la capitale en raison notamment du niveau du marché immobilier. Plus précisément, la valeur locative moyenne de Paris (dit autrement l’assiette fiscale) est de 6 630 euros alors que la moyenne nationale est de 3 600 euros.
La pression réelle se mesure avant tout en rapportant le produit à l’habitant ce qui permet de prendre en compte l’ensemble des éléments constitutifs de la fiscalité (assiette, exonérations, abattements, taux). Le produit de TFB prélevé par habitant par la ville de Paris (488 euros/hab.) se situe au-dessus de la moyenne nationale (473 euros/hab.) et légèrement en dessous de la moyenne des communes de plus de 100 000 habitants (547 euros/hab.). Paris dépassera largement la moyenne de la strate en 2023 à la suite de l’augmentation du taux (753 euros/hab.).
La pression fiscale parisienne, actuellement dans la moyenne, sera donc une des plus fortes de France si la hausse historique de 52 % est adoptée et appliquée.
Un choix assumé
Augmenter de manière record la fiscalité est un choix éminemment politique et plus encore en l’espèce. D’abord car la maire de Paris contredit la candidate Anne Hidalgo qui s’était engagée à ne pas augmenter les taux d’imposition durant la campagne des municipales 2020.
Ne pas tenir un des principaux engagements de campagne est un acte politique fort qui dans ces temps de désamour de la chose publique par les citoyens, n’est pas de nature à les rassurer.
Même si la force politique de cette décision est immense, Paris sait que sa latitude politique est plus large qu’ailleurs. En effet, la capitale se distingue par un nombre très élevé de résidences secondaires (9,5 % soit quasi le double de la moyenne de la strate) et par un taux de propriétaires occupants inférieur à la moyenne de la strate (33 % contre 36 %). Les conséquences politiques directes auprès des électeurs peuvent apparaître amoindries.
L’autre conséquence politique et ce n’est pas la moindre est la relation immédiate faite avec la perspective de la nouvelle contractualisation financière. Jusque-là avant tout légitimée par le redressement des comptes publics, il sera dorénavant aisé d’y greffer une vocation de bouclier fiscal.
L’argument est servi sur un plateau à Bercy : contenir la progression des dépenses de fonctionnement, c’est contenir l’irresponsabilité des collectivités et ainsi protéger les contribuables…