C’est l’une des propositions-phares de la plateforme sur la fonction publique des Républicains dévoilée le 9 mars. Le non-remplacement d’un agent sur deux partant à la retraite était déjà, côté Etat, la pierre angulaire de la révision de la révision générale des politiques publiques (RGPP) mise en place sous la mandature Sarkozy. Il doit, selon le parti présidé par l’ancien chef de l’Etat, être désormais étendu aux collectivités.
Pour ce faire, Les Républicains prônent une révision de la Constitution. Si, parmi les principaux candidats à la primaire pour la présidentielle, la proposition fait consensus, qu’en est-il des maires LR ? Sur le terrain, le propos est plus contrasté.
Réflexe girondin
Jacques Pélissard, ancien président de l’Association des maires de France et toujours premier magistrat ainsi que député LR de Lons-le-Saunier (Jura), ne cache pas son scepticisme. « Un coup de rabot général et impersonnel n’est pas du tout adapté à la réalité des collectivités », tranche-t-il.
« Je m’oppose à ce qu’on nous impose la gestion de notre personnel par la loi, renchérit Stéphane Beaudet, président de l’Association des maires d’Ile-de-France et premier magistrat LR de Courcouronnes (Essonne). Je préfèrerais que l’on réforme le statut des fonctionnaires afin que nous devenions leur véritable patron. »
« On ne fait pas de la politique avec une règle à calcul. Arrêtons de tout imposer d’en haut ! », avait, pour sa part, mis en garde, le 23 février sur France Inter, Xavier Bertrand, président (LR) de la nouvelle région « Hauts-de-France », nom improbable donné à la fusion entre le Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie.
Totalement acquis à la mesure, le député-maire LR de Châlons-en-Champagne (Marne) Benoist Apparu pointe un faux débat : « Lors de la RGPP, l’Etat a épargné certains ministères, comme l’Intérieur, aux dépens d’autres, les collectivités doivent pouvoir faire pareil. »
« Il faut imposer une réduction en faisant attention aux collectivités qui sont engagées dans ce processus depuis plusieurs années : on ne peut pas leur demander les mêmes efforts », abonde un autre partisan de la disposition, Gil Avérous, maire LR de Châteauroux (Indre). Et l’élu sarkozyste de vanter son exemple : dans sa ville, on remplace seulement un départ sur trois. Cette année, sont supprimés 30 équivalent-temps plein, dont 28 départs à la retraite non remplacés (sur 35 au total).
Syndrome du fast-food
À Courcouronnes, 20 % des équivalents temps plein ont été supprimés en l’espace de cinq ans. « Cela donne plus de travail à ceux qui restent. Nous augmentons donc les salaires », se réjouit le maire de la commune, Stéphane Beaudet.
Jacques Pélissard, de son côté, a regroupé en un seul bâtiment les personnels de la ville et de l’intercommunalité. Une source d’économie en personnels d’accueil, agents chargés de l’informatique et autres appariteurs. En 2016, la masse salariale va baisser de 1,5 % pour la ville et de 5 % en ce qui concerne la communauté d’agglomération. Le résultat d’une politique cousu main. « Les collectivités s’administrent librement ! On ne peut pas leur imposer la gestion de leur personnel », insiste l’ancien premier maire de France.
Chez certains cousins centristes, on tient volontiers le même discours. « Je suis meurtri quand on fait un procès aux agents de la fonction publique. Les élus locaux ne sont pas non plus inconscients. Ils savent adapter le nombre de personnels en fonction des services rendus à la population », juge le maire (UDI) d’Annecy (Haute-Savoie), Jean-Luc Rigaut pour qui « la recette de monsieur Sarkozy relève plus du fast-food que de la gastronomie ».
Eric Ciotti joue les bons élèves
Le président du conseil départemental des Alpes-Maritimes n’a pas les états d’âme de ses collègues. Pour Eric Ciotti, le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite est une mesure de salut public. Lui, naturellement, va déjà plus loin… « Nous en sommes à un remplacement sur trois agents partant à la retraite », s’est félicité Eric Ciotti lors de la journée de travail des Républicains consacrée le 9 mars 2016 à la fonction publique et à la réforme de l’Etat. En l’espace d’un septennat à la tête de sa collectivité, le tableau des effectifs a fondu de 700 emplois, passant de 5 100 à 4 400. Un effort qu’il ne constate pas partout… « Je vois certains élus, dans notre famille politique – et j’en connais pas très loin de chez moi – qui considèrent que, plus ils ont d’agents publics, plus ils ont de pouvoir », dénonce volontiers Eric Ciotti.