Depuis le 1er janvier 2010, les collectivités locales sont soumises à de nouvelles obligations en matière de dématérialisation des marchés publics. 95 % d’entre elles n’envisageaient pas de changer leurs pratiques à cette date, note Jean-Marie Héron, président de l’AACT, puisqu’elles avaient déjà mis en place le minimum légal.
Plateformes externes.
Les collectivités se servent généralement de plateformes de dématérialisation externes mises en place par des prestataires privés, plus rarement par les régions, ou par des intercommunalités. Une plateforme nationale serait ce qu’il y a de plus intéressant pour dynamiser la concurrence et notamment les prix, souligne Jean-Marie Héron. Les services délivrés par ces plateformes – le profil d’acheteur, la mise en ligne des marchés et, parfois, le parafeur électronique – constituent un réel appui pour les collectivités, mais engendrent parallèlement un coût, même s’il se substitue à celui des annonces légales.
Parmi les avantages de la dématérialisation , Jacqueline Borel, responsable de la commande publique de la communauté de communes de l’Autunois, cite la rapidité et les gains financiers en matière de reprographie. Ce sont en effet les entreprises qui téléchargent et impriment les documents relatifs aux marchés.
La concurrence est sensiblement améliorée, la qualité des offres s’en ressent et le choix des pouvoirs adjudicateurs est élargi. Ainsi, le conseil général de la Côte-d’Or a reçu des réponses, pour ses marchés de prestations intellectuelles, venant de sociétés implantées dans d’autres pays européens.
Pour autant, les entreprises renvoient encore souvent leurs offres sur papier. Selon Christophe Alviset, animateur de l’atelier « dématérialisation » de l’Observatoire économique de l’achat public (OEAP), les réponses dématérialisées représentent de 3 à 4 % des offres. Avec environ 20 % de réponses dématérialisées, la plateforme « e-bourgogne » est une exception.
Les entreprises se plaignent souvent de l’hétérogénéité des plateformes – il en existe une trentaine de modèles. Or, les chambres de commerce et les fédérations professionnelles ont un rôle certain à jouer pour former les entreprises dans ce domaine.
Formation des entreprises.
La chambre régionale de commerce et d’industrie (CRCI) Rhône-Alpes, par exemple, les accompagne pour certains appels d’offres en leur expliquant comment répondre sur les plateformes, tandis que la CCI Sud Alsace Mulhouse a organisé une journée sur la signature électronique. De son côté, la CRCI Paris-Ile-de-France organise régulièrement des démonstrations et des formations sur l’utilisation des plateformes, les dispositifs de veille, mais les collectivités ne communiquent pas assez, estime Frédéric Desclos, responsable de l’échangeur PME Paris -Ile-de-France.
La dématérialisation fait pourtant gagner du temps, à terme, aux entreprises, constate Catherine Lambert, directrice de la commande publique en Côte-d’Or. Le conseil général de la Moselle, lui, ne leur laisse pas toujours le choix : Le fait d’imposer les réponses dématérialisées pour certains marchés n’a pas fait augmenter de façon très significative le nombre d’offres que l’on reçoit, constate Stéphanie Laurant, chef du service des marchés publics. Mais les entreprises n’ont pas toujours confiance dans les procédés et continuent à considérer que la confidentialité de leurs offres n’est garantie que sous pli. Pour contrer cet obstacle, le ministère de l’Economie avait envisagé un système de labellisation des plateformes. Cependant, met en garde Catherine Bergeal, directrice des affaires juridiques, on n’est pas sûr d’avoir exploré toutes les solutions, il ne faut pas risquer de figer les expérimentations.
Outils à déployer.
L’ensemble de la chaîne n’est pas encore dématérialisé et les collectivités doivent généralement imprimer le marché lorsqu’elles le transmettent au contrôle de légalité, puis à la trésorerie. Les outils existent. Ils ont été développés, comme le programme Actes, mais ils ne sont pas encore déployés, relève Christophe Alviset, de l’OEAP. Il existe cependant des accords locaux entre la collectivité et la préfecture, voire le trésorier payeur général. Ainsi, la Moselle envoie les marchés conclus à la suite d’une offre dématérialisée par cédéroms au contrôle de légalité. Le conseil général de l’Aube organise, lui, son passage au langage XML, ce qui va lui permettre d’automatiser la présélection des offres.
Mais toutes les collectivités ne sont pas aussi avancées en matière de dématérialisation . Pour les y inciter, Bercy a publié, au mois de juillet 2010, un guide pratique.
« Le processus n’est pas complet »
Marie-Caroline Broussaud, attachée au pôle finances et marchés publics de la commune d’Aixe-sur-Vienne (5 535 hab., Haute-Vienne)
Le nombre de procédures dématérialisées est en forte augmentation dans notre petite collectivité. Pour le profil d’acheteur, nous utilisons une plateforme externe puisqu’elle n’a pas été développée en interne. Mais, cela ajoute un coût supplémentaire à la publicité. La dématérialisation nous permet de ne plus avoir à gérer les retraits des dossiers : les entreprises téléchargent et impriment leurs documents ; les candidats ont accès en ligne à l’ensemble des questions-réponses. Aujourd’hui, la difficulté est que le processus n’est pas complet sur l’ensemble de la chaîne. Après avoir dématérialisé, il faut “rematérialiser” les documents pour la signature et la transmission au contrôle de légalité qui, elles, ne le sont pas. Quand tout le monde utilisera cette procédure – entreprises, collectivités et services de l’Etat -, on en sentira pleinement les avantages.
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