D’après une étude obtenue par EurActiv et issue du département scientifique interne de la Commission, il est peu probable que la politique européenne de promotion des biocarburants contribue à réduire les gaz à effet de serre, dans la mesure où les coûts impliqués surpassent largement les bénéfices potentiels.
Contexte:
Dans un contexte d’inquiétudes sur les prix du pétrole, la sécurité énergétique et le changement climatique, les dirigeants européens se sont engagés, en mars 2007, à augmenter la part de l’utilisation des biocarburants dans les transports d’un niveau actuel de 2% à 10% en 2020.
La production en masse de biocarburants entraîne un certain nombre de risques en matière de déforestation, d’augmentation des prix de l’alimentation et de pénurie d’eau. C’est pourquoi les objectifs pour 2020 doivent seulement devenir contraignants si la production de biocarburants est durable et si les biocarburants dits «de seconde génération» deviennent disponibles, c’est-à-dire produits à partir de matériaux issus du bois -feuilles, écorce- qui ne font pas concurrence à la production alimentaire.
La Commission doit présenter le 23 janvier des propositions détaillées destinées à promouvoir le développement et l’utilisation de ces carburants alternatifs.
Enjeux:
Dans un document de travail non publié, le Centre Commun de Recherche de la Commission (Joint Research Centre, JRC) dresse un bilan accablant des plans européens de promotion des biocarburants.
Selon une analyse coût-bénéfice, qui n’a pas été formellement approuvé par la Commission, cette politique sera excessivement coûteuse et ne conduira ni à une réduction substantielle des émissions de gaz à effet de serre ni à une création d’emplois.
1.Réduction des émissions de gaz à effet de serre
«L’incertitude est trop grande pour pouvoir déterminer si l’objectif de 10% de biocarburants développé par l’UE conduira ou non à une économie en gaz à effet de serre», affirme cette étude. Les émissions indirectes causées par la conversion de terres arables ou boisées pour la production de biocarburants et le déplacement de la production agricole alimentaire en dehors de l’UE pourraient même venir contrebalancer les avantages apportés par les biocarburants. «Les plans de certification aident mais ne peuvent empêcher le problème», ajoute le document.
Il est également précisé que «la décision de viser spécifiquement la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports réduit les bénéfices qui pourraient être atteints différemment avec les mêmes ressources». En effet, en termes de réduction des gaz à effet de serre par hectare de terrain, «il est substantiellement plus efficace d’utiliser la biomasse à la production d’électricité plutôt que de produire des biocarburants conventionnels».
2.Emploi
Le rapport souligne qu’attendre une création substantielle d’emplois d’une augmentation de la production de biocarburants consiste à «prendre ses désirs pour des réalités». Il est en effet probable que les bénéfices attendus soient compensés par une destruction d’emplois dans d’autres secteurs, si bien que le programme aura un effet net «insignifiant» sur l’emploi.
3.Coût-bénéfice
«Les coûts [de l’objectif de 10% de biocarburants] l’emporteront presque certainement sur les bénéfices», affirme l’analyse qui calcule que «la diminution du bien-être causé par l’imposition d’un objectif de biocarburants est entre 33 et 65 milliards d’euros avec une probabilité de 80%».
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