La France et l’Allemagne sont sur le point de dévoiler leur alternative à la séparation patrimoniale des opérateurs énergétiques verticalement intégrés. Le projet prévoit que le réseau de transport soit strictement séparé des activités de production et de fourniture, mais que le tout soit maintenu sous la propriété des mêmes actionnaires. De vifs débats en perspective.
Contexte:
Les bouleversements structurels que la Commission souhaite provoquer chez les opérateurs historiques encore verticalement intégrés, tels qu’EDF ou GDF en France, suscitent les plus vives controverses en Europe, depuis la présentation par l’exécutif européen du troisième paquet énergie, le 19 septembre dernier (lire le dossier d’EurActiv).
En vue d’achever la libéralisation des marchés européens de l’électricité et du gaz, la Commission laisse en effet deux options aux Etats membres.
1. Obliger les grandes compagnies énergétiques à se défaire de leurs actifs de transport, d’électricité et de stockage du gaz afin de séparer ces activités de la production et de la commercialisation d’énergie («séparation de la propriété»),
2.Permettre aux entreprises de conserver la propriété de leurs actifs de distribution, mais en confier la gestion à un opérateur indépendant de système (ISO) chargé des décisions d’investissement et des décisions commerciales.
La France et l’Allemagne se sont vivement opposées à ces propositions et ont été suivies par un groupe d’Etats suffisant pour former une minorité de blocage, incluant le Luxembourg, la Grèce, l’Autriche, la Bulgarie, Chypre et la Slovaquie.
Enjeux:
La Commission a donc invité ces Etats membres à formuler le plus rapidement possible une alternative. Le commissaire européen à l’Energie, Andris Piebalgs, a toutefois précisé que cette «troisième voie» devrait «nécessairement être proche des propositions de la Commission», puisque «toute solution nécessiterait de toute façon des changements de structure semblables à ceux proposés».
La France et l’Allemagne se sont attelées à la formulation d’une proposition commune, qui devrait être dévoilée avant la fin du mois. Sa teneur en est néanmoins déjà connue. Un document de travail obtenu par EU Observer suggérerait que le réseau de transport soit strictement séparé des autres activités (production et fournitures) des entreprises énergétiques, mais puisse être détenu par les mêmes actionnaires.
Ce document préciserait que «tous les actifs de transport seront détenus par le gestionnaire de réseau de transport (GRT)», qui «aura sa propre identité, différente de celle de l’entreprise verticalement intégrée avec une politique de communication et de marque différente». Le projet franco-allemand imposerait également que le personnel du GRT soit strictement distinct de celui du reste de l’opérateur historique.
Avant de la rendre publique, la France et l’Allemagne devraient soumettre leur proposition aux autres Etats opposés aux plans de la Commission.
En maintenant l’ensemble des activités sous la propriété des mêmes actionnaires, cette alternative franco-allemande se distingue très clairement de la dissociation complète du réseau de transport voulue par la Commission, et soutenue par un nombre significatif d’Etats membres. Même si l’exécutif européen souhaite que son troisième paquet énergie soit définitivement adopté en juin 2008, les débats s’annoncent donc difficiles et pourraient se poursuivre au deuxième semestre lors de la présidence française de l’Union européenne.
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