Chaque année, huit milliards de déplacements sont réalisés en transports collectifs (TC) dont un tiers sur le réseau d’Ile-de-France qui concentre à lui seul les deux tiers des actes de délinquance. Près d’un vol sur six et 13 % des vols violents ont lieu dans les TC, et les agressions sexuelles ont bondi en 2018 « sous l’effet de la libération de la parole depuis l’affaire Weinstein », tempère Fabrice Fussy, chef de l’Observatoire national de la délinquance dans les transports.
Tout juste quatre ans après la loi « Savary » du 22 mars 2016, portant sur la prévention et la lutte contre les incivilités, les atteintes à la sécurité publique et les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, la donne a-t-elle changé en matière de sûreté ? La loi a élargi les prérogatives des agents de sûreté de la SNCF (3 000 agents Suge) et de la RATP (1 000 agents GPSR), sous tutelle du ministère de l’Intérieur, équipés de caméras-piéton, pouvant travailler en civil et être armés, fouiller, palper, interdire l’accès au train. Elle a durci les sanctions pour les fraudeurs (un an de prison et 15 000 euros pour entrave au contrôle), abaissé le seuil de fraude d’habitude (la loi « mobilités » de décembre 2019 a enfoncé le clou avec le délit de multirécidive qui se traduit par l’interdiction d’accès au réseau). « Ce qui n’a pas fonctionné, c’est la faible mobilisation des parquets », regrette Gilles Savary, auquel la loi doit son nom.
Boîte de Pandore
Enfin, en matière de lutte antiterrorisme, la loi « Savary » aborde le criblage du personnel sensible avec l’ouverture d’enquêtes administratives avant embauche dans les entreprises de transport. Quatre ans plus tard, Valérie Pécresse (LR), présidente d’Ile-de-France Mobilités, prône aussi la reconnaissance faciale comme arme antiterroriste… et antifraude.
« Le discours se polarise sur le risque terroriste avec des réponses technologiques. On parle finalement peu de prévention de la délinquance », juge une spécialiste du secteur. Pourtant, la loi avait ouvert une boîte de Pandore, celle du recours aux services de sécurité privés, sur demande des autorités organisatrices de mobilité (AOM), donneurs d’ordre des opérateurs. Peu ont pris la balle au bond. « Le mouvement paraît inéluctable et interroge le rôle de l’Etat qui organise les conditions pour faciliter la montée en puissance du secteur privé, estime cette même source. « On est opérateur de transport public, c’est déjà pas mal ! » lançait fin 2019 Christophe Merlin, alors directeur sûreté de Keolis (aujourd’hui à la SNCF). Il réfléchissait à l’externalisation complète de la sûreté. « C’est l’AO qui décide. Si on veut vraiment changer la donne, la stratégie sûreté doit être écrite noir sur blanc dans l’appel d’offres et dans le contrat », reprend le directeur exécutif « sécurité » de Keolis, Jacques Damas.
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