Depuis de nombreuses annĂ©es les entreprises tĂ©lĂ©chargent les dossiers de consultation, mais très peu rĂ©pondent sous forme Ă©lectronique. CĂ´tĂ© collectivitĂ©s, la dĂ©matĂ©rialisation complète de la chaĂ®ne des marchĂ©s publics peine aussi Ă s’imposer. Le SecrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral pour la modernisation de l’action publique (SGMAP) organise donc une prĂ©figuration avec quinze organismes reprĂ©sentant plus de 110 pouvoirs adjudicateurs. En septembre 2016, ils seront rejoints par de nouveaux volontaires. Cette prĂ©figuration est l’application de la recommandation 3 du programme DcANT (dĂ©veloppement concertĂ© de l’administration numĂ©rique territoriale) annoncĂ© fin octobre 2015 et qui vise Ă Ă©tudier les conditions d’une dĂ©matĂ©rialisation totale de la procĂ©dure de passation des marchĂ©s publics Ă l’horizon 2018.
« Pour les collectivitĂ©s, l’intĂ©rĂŞt de dĂ©matĂ©rialiser leurs marchĂ©s publics est notamment de pouvoir harmoniser leurs procĂ©dures, de gagner du temps et probablement aussi, in fine, de rĂ©aliser des Ă©conomies », explique Laure de la Bretèche, secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale du SGMAP. Cette prĂ©figuration, va lui permettre, en accompagnant des collectivitĂ©s, de voir les blocages et de faire une Ă©tude d’impacts poussĂ©e. Elle disposera d’Ă©lĂ©ments concrets qui devraient lui permettre de convaincre les associations d’Ă©lus de l’importance de cette dĂ©matĂ©rialisation.
« L’objectif de cette prĂ©figuration est d’expĂ©rimenter la dĂ©matĂ©rialisation complète des marchĂ©s, depuis la passation jusqu’au contrĂ´le de lĂ©galitĂ© et l’envoi au trĂ©sorier payeur. Nous avons sĂ©lectionnĂ© une dizaine de membres, rĂ©partis sur tout le territoire (1). Chacun s’est engagĂ© Ă imposer les rĂ©ponses Ă©lectroniques sur un pĂ©rimètre donné » explique Daniel Coissard, chef de projet salle des marchĂ©s du GIP e-bourgogne (notamment chargĂ© d’aider les collectivitĂ©s Ă progresser dans la dĂ©matĂ©rialisation). Ainsi, le conseil rĂ©gional Bourgogne France-ComtĂ©, par exemple, va le faire sur les marchĂ©s de formation professionnelle. « La prĂ©figuration DcANT (dĂ©veloppement concertĂ© de l’administration numĂ©rique territoriale) est lĂ pour nous permettre de trouver des solutions Ă de petits blocages avant qu’il n’y ait une gĂ©nĂ©ralisation de la dĂ©matĂ©rialisation des marchĂ©s publics en 2018 », ajoute Flora Vigreux, directrice adjointe du GIP Maximilien, en Ile-de-France.
Homogénéiser les pratiques des trésoreries et préfectures
Les services de l’Etat concernĂ©s participent aux rĂ©unions avec les prĂ©figurateurs et sont donc informĂ©s des difficultĂ©s rencontrĂ©es au niveau local. Le plus souvent, les collectivitĂ©s qui ont dĂ©matĂ©rialisĂ© certains de leurs marchĂ©s sont obligĂ©es de les rĂ©imprimer car leur prĂ©fecture ou leur trĂ©sorier n’acceptent pas leur version numĂ©rique. Par exemple, la mĂ©tropole de Toulouse qui a rendu obligatoire la rĂ©ponse Ă©lectronique Ă ses marchĂ©s de prestations intellectuelles et de communication en 2015, tĂ©lĂ©-transmet ces marchĂ©s Ă la prĂ©fecture mais pas Ă son trĂ©sorier.
« Nous n’avons pas pu dĂ©matĂ©rialiser avec le comptable public, car celui-ci n’accepte que si nous sommes en mesure de tĂ©lĂ©-transmettre l’intĂ©gralitĂ© de nos marchĂ©s, ce qui nous obligerait Ă numĂ©riser tous ceux oĂą nous n’avons pas imposĂ© une rĂ©ponse Ă©lectronique », regrette Catherine Humbert, directrice de la commande publique de la ville et la mĂ©tropole de Toulouse. Anthony Patheron, son homologue Ă la CommunautĂ© d’agglomĂ©ration dracĂ©noise (Var), lui, vient seulement de signer un avenant avec sa prĂ©fecture alors qu’il a totalement dĂ©matĂ©rialisĂ© ses MAPA (marchĂ©s Ă procĂ©dure adaptĂ©e) depuis dĂ©but 2015. Il les rematĂ©rialise toujours pour son comptable.
Cette prĂ©figuration est aussi l’occasion d’essayer d’homogĂ©nĂ©iser les procĂ©dures au niveau national, car il existe une grande hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© des pratiques. « Nous Ă©tudions les normes avec la DGCL afin de voir quels documents doivent rĂ©ellement ĂŞtre tĂ©lĂ©-transmis lors du contrĂ´le de lĂ©galitĂ©. Par exemple, certaines prĂ©fectures ne rĂ©clament pas le mĂ©moire technique alors que d’autres si », souligne Flora Vigreux.
Coup de pouce des nouvelles règles des marchés publics
Les nouvelles règles des marchĂ©s publics, entrĂ©es en vigueur le 1er avril 2016, arrivent fort Ă propos. Elles devraient en effet faciliter les rĂ©ponses Ă©lectroniques, en levant un frein important : il n’y a plus obligation pour les entreprises de signer Ă©lectroniquement leur rĂ©ponse et donc de possĂ©der un certificat Ă©lectronique au moment oĂą elles candidatent. DorĂ©navant, seule l’attribution du marchĂ© doit ĂŞtre signĂ©e Ă©lectroniquement. « Le dĂ©calage de la signature Ă l’attribution assure aux collectivitĂ©s qu’elles ne discriminent pas les entreprises qui n’ont pas de signature Ă©lectronique. Il faudra cependant prĂ©voir un dĂ©lai suffisant pour que l’entreprise retenue puisse se procurer un certificat Ă©lectronique si elle n’en a pas dĂ©jĂ un », explique Flora Vigreux.
Relancer le marché public simplifié
Le dispositif marchĂ© public simplifiĂ© (MPS), qui a Ă©tĂ© lancĂ© dès 2014, permet aux entreprises qui se sont enregistrĂ©es de ne plus avoir Ă produire les informations et documents dĂ©jĂ connus ou produits par une administration ou un service public. Leur seul numĂ©ro de SIRET suffit. Les collectivitĂ©s pourraient, avec MPS, imposer des rĂ©ponses Ă©lectroniques, mais très peu le font. Ce dispositif reste mĂ©connu : seuls 8000 MPS ont Ă©tĂ© publiĂ©s (par 900 organismes) depuis 2014, alors que 20 000 Ă©taient espĂ©rĂ©es. « Il faut vraiment accompagner les acheteurs publics et les rassurer, leur dĂ©montrer que le service est juridiquement sĂ©curisĂ©. Il faut les convaincre, leur proposer un nouveau règlement de consultation… Le fait que MPS, contrairement au DUME, ne soit pas mentionnĂ© dans le dĂ©cret du 25 mars 2016 est regrettable. Cela aurait fini de lever tous les doutes », note Flora Vigreux.
Ne pas craindre les marchés infructueux
MPS est un service mĂ©connu mais performant : « 80% des entreprises ayant eu recours Ă MPS se sont dites très satisfaites ou satisfaites, et, la moitiĂ© d’entre elles Ă©taient des PME et PMI. Le BTP y est bien reprĂ©sentĂ©. Certains acheteurs publics craignent d’avoir des appels infructueux si ils obligent les entreprises Ă passer par MPS et Ă rĂ©pondre Ă©lectroniquement, mais, a priori ce n’est pas le cas », souligne Laure de la Bretèche. D’ailleurs, sa volontĂ© est qu’au 31 dĂ©cembre 2016, MPS devienne le service de candidature par dĂ©faut pour les marchĂ©s de l’Etat.
Avoir des rĂ©ponses Ă©lectroniques est le seul moyen efficace de dĂ©matĂ©rialiser la chaĂ®ne des marchĂ©s publics. Les prĂ©figurateurs qui l’ont dĂ©jĂ imposĂ© le confirment : les entreprises s’adaptent vite. « Sur les 100 consultations que nous avons lancĂ©es depuis janvier 2015, oĂą les rĂ©ponses Ă©lectroniques Ă©taient obligatoires, une seule a Ă©tĂ© infructueuse sur deux lots, mais, a priori, ce n’Ă©tait pas liĂ© Ă cette obligation. J’ai d’ailleurs Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©, car très peu d’entreprises nous ont appelĂ© pour que nous les aidions », raconte Anthony Patheron. Catherine Humbert, elle non plus, n’a pas constatĂ© une baisse du nombre de rĂ©ponses sur ses marchĂ©s de prestations intellectuelles.
Un gros travail de sensibilisation
Mais pour que cela se passe bien, il est nĂ©cessaire de bien prĂ©parer le terrain. « Nous avons organisĂ© en septembre 2015 une journĂ©e de formation auprès des entreprises pour leur montrer de manière très pratique comment utiliser notre plate-forme », confirme Catherine Humbert. Au niveau local, les collectivitĂ©s soulignent que les CCI et les services de l’Etat ne sensibilisent que très peu les entreprises et leurs fĂ©dĂ©rations Ă MPS. e-Bourgogne sillonne son territoire et organise nombre de forums et confĂ©rences avec des dĂ©monstrations. « Nous formons aussi des formateurs et leur octroyons un label. Nous les assistons lors de leur deux premières formations », ajoute Daniel Coissard. Des opĂ©rations indispensables pour que la mayonnaise prenne mais qui pèsent lourd sur les services marchĂ©s des collectivitĂ©s qui ne sont pas au sein d’un groupement tel que e-bourgogne, Megalis Bretagne ou Maximilien…
Un rencontre sur la transparence de la commande publique
La transparence de la commande publique fait partie du pĂ©rimètre de la prĂ©figuration. Aussi, le SGMAP organise, le 9 mai 2016, un Ă©change de bonnes pratique sur le sujet Ă Rennes. Il s’appuie sur les travaux menĂ©s par l’Association Breizh Small Business Act en faveur de l’ouverture des donnĂ©es des marchĂ©s publics. Le but de cette journĂ©e sera de dĂ©battre sur les sujets suivants :
- L’élaboration d’un référentiel national de données essentielles de la commande publique,
- La mise à disposition des données sur la plate-forme data.gouv.fr,
- Le déploiement généralisé et le passage à l’échelle du prototype My Breizh Open Data,
- Les data-sciences et la création de services à valeur ajoutée.
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Thèmes abordés
Notes
Note 01 Région Bourgogne Franche-Comté, Conseils départementaux de Côte d’Or, Nièvre, Saône-et-Loire, Yonne, les communautés de communes de Plaine Dijonnaise et du Grand Autunois Morvan, la communauté d'agglomération de l’Auxerrois, les villes d'Auxerre, Cosne-sur-Loire, Nevers, Quetigny, le centre hospitalier William Dumorey, Nièvre Habitat, l'OPAC de Saône-et-Loire, Domanys et SICECO Retour au texte




