« Le temps des incantations doit faire place à celui des réalisations », « il nous faut revivifier le modèle républicain », « nous reconstruire comme administration »… Tels sont les éléments de langage du discours prononcé par le vice-président du Conseil d’Etat, Jean-Marc Sauvé, lors du colloque organisé, le 26 novembre 2015, par le ministère de la décentralisation et de la fonction publique à l’Université Paris-Ouest Nanterre La Défense intitulé « Incarner, défendre et promouvoir les valeurs de la République, pour refonder nos services publics et notre fonction publique ».
Ces valeurs républicaines sont, pour le vice-président du Conseil d’Etat, « une éthique vivante et une règle d’action » pour tout fonctionnaire. Pour ce faire, ce dernier doit se plier à une triple exigence : « incarner ces principes et valeurs », « les combattre pour lutter contre toutes les formes d’intolérance et de violence » et les « promouvoir ».
Mais loin d’être un discours lisse rempli de bonnes intentions, les propos tenus par le vice-président du Conseil d’Etat sont ceux d’un haut fonctionnaire qui connaît les maux de son corps et qui ne se prive pas de dresser un portrait au vitriol du fonctionnaire d’aujourd’hui.
Fonctionnaire, un malade imaginaire ?
Pour ce faire, Jean-Marc Sauvé reprend les « maladies curiales » issues du discours du Pape François prononcé en décembre 2014 devant la Curie romaine mais en les infligeant aux fonctionnaires.
Parmi ces maladies, figurent notamment le « fonctionnarisme » c’est-à-dire « le manque d’imagination et d’audace et de la propension aux habitudes stériles ».
Ensuite, la « schizophrénie existentielle » qui conduit « à proclamer des grands principes sans chercher à les réaliser concrètement ni à se les appliquer ».
Viennent ensuite s’ajouter « la maladie de la rivalité et de la vanité » et, peut-être la pire des maladies, celle du « visage funèbre » qui selon le vice-président du Conseil d’Etat, « pousse à traiter ceux qu’on est censé servir avec hauteur et arrogance et à perdre tout sens de la proximité ».
Pour guérir de ces maladies, Jean-Marc Sauvé en appelle à réfléchir et à « rompre avec un certain confort et conformisme intellectuel et professionnel ». Si le « courage » semble être le maître-mot des moyens mis à disposition du fonctionnaire pour se réformer, l’évolution législative du statut de la fonction publique peut en être un outil pragmatique.
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Adopté le 9 octobre par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée et renvoyé à la commission des lois du Sénat, le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires veut, pour la première fois, consacrer dans la loi les valeurs, reconnues par la jurisprudence, qui fondent la spécificité de l’action des agents : neutralité, impartialité, probité et laïcité.
La guérison par la législation, donc.
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