Le jugement du 26 juin 2015 par le TGI de Nanterre intervient au moment où les demandes d’aide sont traitées par le fonds de soutien et où, bientôt, les collectivités choisiront d’accepter le refinancement aux conditions indiquées ou de poursuivre l’action contentieuse si les conditions de refinancement ne leur apparaissent pas acceptables. Il revêt en ce sens un intérêt tout particulier.
Le litige engagé par la commune de Saint-Cast-le-Guildo portait sur un contrat de prêt structuré conclu en 2007, avec un taux fixe de 3,99 % de 2007 à 2010 et, pendant la 2e phase d’une durée de 24 ans, un taux structuré indexé sur la parité Euro / Francs suisses. Devant l’augmentation considérable du taux d’intérêt et du montant de l’indemnité de remboursement anticipé, rendant impossible tout refinancement, la commune a assigné DEXIA en 2011 en annulation du contrat et en responsabilité
Emprunteur non averti
Le tribunal a jugé que le produit souscrit était complexe et que ses caractéristiques et ses risques ne pouvaient être appréhendés que par un emprunteur averti ou conseillé par un professionnel de la finance de marché. Or, pour le juge de Nanterre, le caractère averti de la commune n’est pas établi. Elle n’a pas d’expérience particulière dans ce type d’emprunt à la date de signature du contrat.Ni l’expérience de l’adjoint aux finances, ancien directeur d’une agence du Crédit agricole, ni celle du chargé des finances à la mairie, ne permettaient à la commune la compréhension de la finance de marché et l’asymétrie d’informations était dès lors flagrante lors de la négociation du contrat avec la banque.
Obligation de mise en garde
La commune n’étant pas avertie, la banque avait « une obligation d’information et de mise en garde sur l’ensemble des caractéristiques, y compris ses aspects les moins favorables de nature à placer la commune en difficulté pour exécuter ses obligations ».En l’occurrence, le tribunal a constaté que la banque n’avait présenté à la commune qu’une seule proposition de prêt ;qu’elle ne lui avait pas fourni de test de sensibilité de nature à alerter sur les risques d’augmentation du taux d’intérêt et sur le mécanisme d’effet de levier. Il a constaté aussi l’absence de mention du caractère potentiellement illimité de l’augmentation du taux d’intérêt.
Selon le juge, les manquements aux obligations d’information et de mise en garde sont de nature à engager la responsabilité de la banque, « dès lors que les risques dont la commune n’a pas été informée, liés à l’évolution du cours de change EURO/CHF, se sont bien réalisés ».
Préjudice
Il restait à évaluer le préjudice subi par la commune. Rappelant que le préjudice résulte de la perte de chance, pour l’emprunteur, de ne pas contracter, le tribunal a estimé cette perte de chance à 50 %, compte-tenu de la baisse brutale du cours de change, de la survenue de la crise de 2008 non anticipée par les acteurs des marchés, de l’absence de prudence de la part de la commune ...
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