« A cause de mes arrêts “maladie”, on m’a annoncé qu’on n’allait pas me “stagiairiser” sur mon poste. Je n’ai plus la force de me battre. » Laure (1), assistante « petite enfance » dans une intercommunalité du Sud de la France, n’en finit plus de subir les conséquences de son Covid. Son parcours du combattant commence en janvier, quand elle contracte le virus, qui se transforme en Covid long.
« Malaises, palpitations, courbatures, l’impression de ne plus pouvoir respirer… » conduisent cette mère ayant quatre enfants à charge à enchaîner les arrêts de maladie, avant de demander un passage à 80 %. Sa collectivité lui propose un mi-temps thérapeutique, tout en lui annonçant la fin de son CDD, sans la “stagiairisation” attendue. « J’ai eu très peu d’écoute du côté des RH et de la médecine de prévention. Je me suis pris des murs. C’est Pôle emploi qui me permet de vivre et peut-être de me soigner », se désole-t-elle.
Pas de données officielles sur la pathologie
Comme elle, de nombreux agents en première ligne durant la crise ont contracté le Covid, certains sur leur lieu de travail, et ont développé cette pathologie aux contours mal définis appelée « Covid long ». « 10 à 30 % des personnes ayant eu le Covid, sans forcément être hospitalisées, peuvent être atteintes de Covid long, soit 800 000 personnes en fourchette basse, estime Jérôme Larché, médecin interniste qui a ouvert, en avril, à Montpellier, une unité de soins coordonnés pour les patients en Covid long. Il ne s’agit pas d’un problème de niche, mais de santé publique. »
Pourtant, impossible de connaître plus précisément l’ampleur du phénomène. L’Organisation mondiale de la santé a reconnu le Covid long en août 2020 et a appelé à la collecte de données pour ces patients souffrant de troubles ayant « de graves conséquences sur le plan social, économique, sanitaire et professionnel ». Mais les ministères de la Santé, de la Transformation et de la fonction publiques ainsi que du Travail, l’Inserm, l’enquête statistique Epicov (« épidémiologie et conditions de vie sous le Covid-19 »), Santé publique France et l’Assurance maladie ont adressé à « La Gazette » une fin de non-recevoir concernant notre demande de données sur le Covid long dans la territoriale. Les syndicats, qui réclament des chiffres, n’ont pas non plus eu gain de cause. En l’état, aucun chiffre public n’est disponible.
Parmi les trois critères définis par la Haute Autorité de santé en février sur le Covid long, figure le fait qu’aucun des symptômes ne puissent être expliqués par un autre diagnostic, au risque que les patients soient renvoyés de spécialistes en examens. Les symptômes peuvent d’ailleurs se confondre avec ceux d’une dépression et conduire à une errance médicale. Relayé par Après J20, association de patients atteints de Covid long, notre appel à témoignages a suscité un vif écho et les récits de dizaines de territoriaux ont afflué. Seules des femmes ont répondu, elles qui composent 61 % des rangs de la territoriale, selon le dernier rapport de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, et qui sont surreprésentées dans les filières sociale et médicosociale, administrative et médicotechnique (de 80 à 95 %).
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Gazette des Communes
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