Les débats autour de l’article 32 TER A de la Loppsi 2, qui préconise l’expulsion administrative des terrains privés, donnent une grande importance au cas particulier de Frédéric Lievy.
Depuis 2007, ce dernier essuie des refus systématiques à toutes ses demandes de permis construire concernant le terrain familial où il développe un élevage de poules. Ce père de six enfants, qui cotise à la mutualité sociale agricole, tient à cette activité complémentaire, agrée par les services vétérinaires et fiscaux. Il l’assure en plus de son travail à temps partiel de directeur commercial dans une entreprise locale.
Mais, la chambre d’agriculture jugeant l’exploitation trop petite a rendu des avis défavorables à ses demandes de logement de fonction.
Sur cette base la préfecture et la mairie de Frouzins demandent au juge l’expulsion de ce terrain familial situé en zone agricole.
Accélération des procédures – Frédéric Lievy est par ailleurs responsable de l’association de gens du voyage « Goute d’eau » qui connait des conflits avec le maire et d’autres élus locaux ayant par ailleurs des responsabilités dans la chambre d’agriculture, au sujet des aires d’accueil. Les ennuis personnels qu’il rencontre ne seraient, selon lui, que la conséquence des ces polémiques.
Ce militant écologiste, partisan d’une micro agriculture de proximité interprète aussi la soudaine accélération des procédures à son encontre comme une préfiguration de la loppsi 2…
Appartenance ethnique et opinion de l’administré – La commune de Frouzins se défend de tenir compte dans cette affaire de l’appartenance ethnique et des opinions de son administré. « La Loppsi2 n’a rien à voir dans le cas présent car nul ne met en doute la salubrité de cette installation », se défend Céline Boleat, directrice générale adjointe de la commune.
En effet, ce terrain familial est cité en exemple pour la qualité de son aménagement par les services du conseil général. « La parcelle étant en zone agricole, il ne peut y habiter sans l’avis favorable de la chambre d’agriculture. Selon nos documents d’urbanisme, il ne peut de toute façon pas vivre en permanence dans une caravane sauf sur l’aire d’accueil des gens du voyage. Nous ne opposons pas non plus à ce qu’il fasse une demande de logement social », précise la DGA.
Des propositions repoussés par Frédéric Lievy. «Je ne suis pas itinérant. Je ne vais pas prendre la place de ceux qui en ont besoin. Je ne suis pas non plus en difficulté économique. Tant que je peux exploiter mon élevage, je ne vais pas non plus à priver une autre famille d’un logement», estime Frédéric Levy qui estime que ses animaux ne survivraient pas sans présence humaine.
Un PLU entaché d’irrégularité ? – « Le PLU de Frouzins est sans doute entaché d’irrégularité car il ne permet pas la diversité des types d’habitat. Rien ne s’oppose à ce qu’un terrain familial articulé autour de caravanes et de constructions annexes reçoivent un permis de construire », explique l’architecte Luc Monnin.
Pour la députée européenne Catherine Grèze, cette affaire illustre les obstacles que rencontrent les gens du voyage pour s’intégrer. « A l’heure où l’Europe se penche sur l’insertion des tsiganes tous les efforts d’intégration de cette famille sédentarisée de manière exemplaire, risquent d’être détruits », martèle l’élue.
Habitations légères de loisirs : article R111 du code de l’urbanisme
La loi du 5 juillet 2000, distingue entre le stationnement des résidences mobiles des gens du voyage sur le domaine public dans le cadre de terrains spécialement aménagés, et l’installation sur des terrains privés soumises à autorisation d’urbanisme.
Une définition du terrain familial est quant à elle donnée dans la circulaire du 17 décembre 2003. « Mais cette circulaire ne mentionne que les terrains familiaux aménagés dans le cadre de l’habitat adapté pour les personnes défavorisées. Rien n’est véritablement précisé pour les familles économiquement indépendantes, propriétaires de leurs propres terrains. Il est en général possible de trouver des solutions dans le cadre de permis de construire considérant la caravane comme étant un habitat adapté à la manière dont les habitants utilisent l’espace dans leur vie quotidienne et pas uniquement comme un moyen de mobilité », explique l’architecte Luc Monnin.
Références
Résidences mobiles terrestres occupées à titre d’habitat principal :
- Loi du 5 juillet 2000,
- article 1013 du code des impôts modifié par la loi de finance rectificative de décembre 2010
- Circulaire du 17 décembre 2003 (définition d’un terrain familial)