Signé le 22 octobre 2013 et complété d’une circulaire du Premier ministre et de circulaires par versant, dont la territoriale, l’accord-cadre relatif à la prévention des risques psychosociaux (RPS) dans la fonction publique, oblige chaque employeur à réaliser un plan d’évaluation et de prévention des RPS, avec un diagnostic associant les agents et les membres des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).
L’échéance était fixée à 2015. Mais force est de constater qu’il y a encore du chemin à parcourir dans les trois versants de la fonction publique.
Action conjointe en Ile-de-France
Si les représentants de l’Etat ont surtout illustré leur action par des données statistiques par ministère et limitées à 2014, lors d’un comité de suivi organisé le 10 février, la fonction publique territoriale (FPT) était représentée pour les employeurs par les initiatives des centres interdépartementaux de gestion (CIG) de la petite et de la grande couronne Ile-de-France.
« Nous travaillons depuis dix-huit mois sur les RPS en Ile-de-France. En 2015, nous avons réalisé seize sensibilisations de directions générales. Dix-neuf accompagnements sont en cours pour les six départements de petite et grande couronne », indique Muriel Gibert, directrice générale adjointe du CIG petite couronne, qui présentait lors de cette réunion la méthodologie développée par les deux CIG.
« En 2016, nous avons déjà prévu dix accompagnements spécifiques. Nos préventeurs incluent systématiquement la problématique des risques psycho-sociaux dans la réalisation du document unique, autour de points de vigilance », explique la spécialiste.
Au CIG petite couronne, l’accent est mis notamment sur six indicateurs, soit moins que le nombre d’indicateurs proposés par la DGAFP. « Nous les choisissions avec la collectivité. Cela dépend de la direction concernée et de l’encadrement, car les RPS ne sont pas les mêmes dans un atelier ou dans une direction des finances », souligne encore Muriel Gibert, dont les propos ont été complétés par une présentation du guide sur les RPS mis au point par le CNFPT.
Formations de cadres et membres de CHSCT
Pour les autres versants, les représentants des organisations syndicales sont restés sur leur faim dans la mesure où les statistiques disponibles se limitent à l’année 2014, soit quelques mois seulement après la signature de l’accord. La présentation des récentes enquêtes de la Dares à partir des données Sumer de 2010 a été complétée d’un bilan déclaratif par ministère.
« Nous notons qu’il y a eu beaucoup de formations de cadres et de représentants des personnels dans les CHSCT. Sur la FPT, on a peu de visibilité car la transformation des CHS en CHSCT est récente », remarque Hervé Moreau, représentant la FSU dans les instances liées à la santé au travail et aux conditions de travail. S’il se satisfait, à l’issue de ce comité de suivi, d’avoir pu faire remonter des constats de terrain au ministère de la Fonction publique, il déplore la lenteur de la mise en œuvre de l’accord de 2013 et le fait que la prévention des RPS arrive souvent trop tard, à défaut de prévention primaire.
Prévention tertiaire
« Les services ressources humaines repèrent les personnes en difficulté, les exfiltrent le cas échéant ou les orientent sur le réseau PAS, un partenariat avec la MGEN qui permet une prise en charge des personnes en difficulté par des psychologues du travail. C’est essentiel. Mais on reste sur une prévention tertiaire. Comment faire pour passer à une réflexion sur l’organisation du travail ? Les réformes et restructurations ne sont jamais construites à partir d’une analyse du travail réel. On ne regarde pas ce qui se passe au niveau des conditions de travail », déplore ce représentant syndical.
Les réformes et restructurations ne sont jamais construites à partir d’une analyse du travail réel. On ne regarde pas ce qui se passe au niveau des conditions de travail
Au ministère de l’Education nationale, pour lequel il travaille, le manque de médecins de prévention est criant : seuls 67 équivalents temps plein exercent en France pour les rectorats, pour près d’un million d’enseignants ; alors qu’il en faudrait au moins 400. « Nous manquons d’outils et de moyens. La DGAFP a beaucoup d’ambition mais elle n’a pas d’outil pour contraindre les employeurs publics à mener la prévention des RPS ».
Soigner le travail
Dans le cas de l’Education nationale, les conventions passées avec des centres hospitaliers lui paraissent insuffisantes pour pallier le déficit de prévention. « On ne soigne pas seulement la personne, assure le représentant de la FSU. On doit être en mesure de soigner le travail ».
Reste à savoir si Annick Girardin, nouvelle ministre de la Fonction publique, poursuivra avec autant d’énergie ce vaste chantier lancé par sa prédécesseure, Marylise Lebranchu.
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