A six mois de l’ouverture de l’Euro 2016 de football et en dépit des attentats sanglants qui ont frappé Paris et les abords du Stade de France à Saint-Denis, les fans zones, où seront rassemblés des milliers de spectateurs devant des écrans géants, ne sont pas remis en cause et leur sécurité sera accrue.
Pour les villes organisatrices, la mobilisation reste donc totale puisqu’il leur revient de les organiser comme l’impose l’Union des associations européennes de football (UEFA).
Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve a ainsi dissipé le doute planant sur leur organisation pendant l’Euro 2016 (10 juin-10 juillet) depuis les attentats du 13 novembre. Lors d’un comité de pilotage exceptionnel organisé le 24 novembre en présence du ministre des sports Patrick Kanner, du secrétaire d’Etat aux sports, Thierry Braillard, du maire de Bordeaux et président du club des villes et des sites d’accueil, Alain Juppé, et du président de la SAS Euro-2016, organisatrice de la compétition, Jacques Lambert, Bernard Cazeneuve a assuré que « nous ferons tout pour que ce grand évènement se passe dans les meilleures conditions et que les fans zones qui ont été souhaitées par les maires comme des espaces festifs puissent être organisées ».
Un maintien des fans zones justifiĂ© – Premières concernĂ©es, les 10 collectivitĂ©s hĂ´tes, par la voix d’Alain JuppĂ©, ont confirmĂ© qu’elles souhaitaient « maintenir les fans zones pour ne pas diminuer le caractère festif et populaire de l’évĂ©nement ». L’ancien Premier ministre a justifiĂ© leur maintien pour « ne pas risquer de voir se dissĂ©miner dans nos villes des regroupements plus difficiles Ă sĂ©curiser ».
Sur la même longueur d’onde, le maire de Saint-Etienne, Gaël Perdriau (Les Républicains) rappelait le même le cahier des charges « très strict et déjà très couteux » auquel les villes doivent se conformer. « S’il faut rajouter des moyens, il ne faudra pas hésiter à le faire. Car c’est plus facile effectivement de contrôler la sécurité dans un espace fermé qui rassemble 10 à 15 000 personnes que d’avoir ces mêmes personnes de toute façon présentes, mais réparties dans toute la ville ».
Seule dissonance enregistrĂ©e, le maire (LR) de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, n’a pas cachĂ© son scepticisme, se disant « pencher pour ne pas installer » de fans zones.
Mesures complĂ©mentaires – L’objectif de cette rĂ©union Ă©tait d’apprĂ©cier la situation dans ce nouveau contexte terroriste. L’occasion pour les ministres prĂ©sents de saluer le travail effectuĂ© par les parties prenantes de l’organisation depuis deux ans qui avait dĂ©jĂ permis d’anticiper « le renforcement de la menace terroriste, avec des dispositifs Ă©volutifs et rĂ©actifs ». L’heure Ă©tait venue de prendre des mesures complĂ©mentaires pour « construire une sĂ©curitĂ© maximale en vue de l’Euro 2016 ».
« L’engagement des pouvoirs publics d’assurer la sécurité a été réaffirmé. Les villes prendront pour ce qui les concerne les mesures nécessaires pour une sécurisation optimale des fans zones. Leur cadre et mode de fonctionnement va à présent être revisité avec un renforcement de la vidéo protection autour et au sein d’elles mais aussi aux abords des stades », a indiqué Frédéric Gil, conseiller technique d’Alain Juppé au club des villes et des sites d’accueil et directeur général adjoint à Bordeaux.
Evaluation permanente – Concrètement, l’instruction interministĂ©rielle de mars 2015 prescrivant les conditions de sĂ©curisation des fans zones sera complĂ©tĂ©e, notamment en matière de contrĂ´les des accès et de vidĂ©oprotection. « Jusqu’à prĂ©sent, nous Ă©tions dans une logique de mise en Ĺ“uvre des dispositifs de sĂ©curitĂ© autour des fans zones laissĂ©s Ă l’apprĂ©ciation des prĂ©fets selon une analyse des matches Ă risque. DĂ©sormais, l’approche est globale. En termes de contrĂ´les d’accès, il n’est pas exclu maintenant que l’Etat impose des palpations de sĂ©curitĂ© systĂ©matiques aux entrĂ©es des fans zones », explique FrĂ©dĂ©ric Gil. Une Ă©valuation permanente de la menace, et au cas par cas de l’organisation des fans zones sera conduite par les prĂ©fets et conduira Ă faire Ă©voluer nos dispositifs, a aussi annoncĂ© le ministre de l’IntĂ©rieur.
Des effectifs Ă la hausse – Pour sĂ©curiser les fans-zones, plusieurs collectivitĂ©s feront appel Ă des sociĂ©tĂ©s de sĂ©curitĂ© privĂ©es dans le cadre de marchĂ©s publics. Dans le contexte actuel qui a placĂ© les agents de sĂ©curitĂ© privĂ©e au premier plan, la question des effectifs disponibles durant l’Euro 2016 a ressurgi, par l’intermĂ©diaire du Conseil national des activitĂ©s privĂ©es de sĂ©curitĂ© (CNAPS), prĂ©sidĂ© par Alain Bauer. Il recommandait le 19 novembre, « pour ne pas disperser les ressources disponibles », de supprimer les fans zones « dès lors qu’elles ne pourraient pas ĂŞtre prises en charge directement par les organisateurs avec leurs moyens propres ».
Pour le club des villes, la capacitĂ© des sociĂ©tĂ©s de sĂ©curitĂ© privĂ©es Ă rĂ©pondre aux appels d’offres conditionnera la dimension des fans zones. « Les sociĂ©tĂ©s privĂ©es de sĂ©curitĂ© qui ont d’ores et dĂ©jĂ signĂ© les marchĂ©s avec les villes ont garanti des prestations. Aucun choix des villes ne se fera au dĂ©triment de la sĂ©curitĂ©. Il faudra Ă prĂ©sent certainement revoir les effectifs Ă la hausse, et notamment la prĂ©sence des personnels fĂ©minins », explique FrĂ©dĂ©ric Gil. Une Ă©valuation des besoins supplĂ©mentaires se fera ainsi site par site. La dĂ©lĂ©gation aux coopĂ©rations de sĂ©curitĂ© du ministère de l’IntĂ©rieur, dans une mission de mise en relation, effectuera sur chacun d’entre eux, avec les sociĂ©tĂ©s de sĂ©curitĂ©, un Ă©tat prĂ©cis des besoins et ressources en effectifs disponibles afin que les formations et les recrutements nĂ©cessaires soient engagĂ©s, avec le concours de PĂ´le Emploi.
Qui paiera la facture ? – Autre enjeu crucial, le volet financier a Ă©tĂ© Ă©voquĂ© lors de cette rĂ©union par le club des villes. Le surcoĂ»t des mesures de sĂ©curitĂ© additionnelles devrait ĂŞtre rĂ©parti entre l’Etat, les villes hĂ´tes et l’UEFA, organisatrice de la compĂ©tition via la SAS Euro-2016. « Le club sollicitera la participation financière de l’UEFA qui ne s’est pas interdit d’envisager de soutenir les villes pour l’organisation des fans zones », prĂ©cise FrĂ©dĂ©ric Gil. « Les fans-zones seront ce que les villes dĂ©cideront d’en faire », a insistĂ© Jacques Lambert. « Il n’y a pas de vision dogmatique mais une forme de souplesse et de flexibilitĂ© pour adapter la fans-zone au contexte budgĂ©taire. Ce qui ressort des exigences de sĂ©curitĂ© nouvelles, c’est que l’on ira peut ĂŞtre encore plus loin dans cette flexibilitĂ© », a-t-il ajoutĂ©.
Pas d’écrans gĂ©ants sur l’espace public – Par ailleurs, Bernard Cazeneuve a indiquĂ© que les moyens de vidĂ©o-protection allaient ĂŞtre renforcĂ©s autour du stade de France ainsi que sur l’ensemble des Ă©quipements sportifs, avec l’appui de l’Etat qui participera au financement via le fonds interministĂ©riel de prĂ©vention de la dĂ©linquance (FIPD) qui a Ă©tĂ© augmentĂ©. Autre point sensible : les rassemblements ou Ă©crans gĂ©ants hors des fans zones, partout en France, ne seront possibles que dans des lieux fermĂ©s du type stades et gymnases, sous rĂ©serve qu’ils respectent des prescriptions de sĂ©curitĂ© qui seront Ă©tablies dans les prochaines semaines, en lien avec les Ă©lus et les organisateurs. Ce comitĂ© de pilotage devrait dorĂ©navant se rĂ©unir tous les mois jusqu’au dĂ©but de l’Euro en juin prochain.



