Si le taux d’emploi des seniors (55-64 ans) reste faible dans la population de salariés (58,4 % en 2023, au lieu de 82,4 % pour les 25-49 ans), avec une part importante de temps partiels (11 % des hommes, 32 % des femmes), c’est en partie parce que leur santé se dégrade. Signe tangible de cette dégradation : parmi les individus de 50-61 ans au chômage, 10 % sont inactifs pour raisons de santé.
Ces chiffres révélateurs ont posé les enjeux du vieillissement et, plus encore, de l’usure professionnelle des seniors, lors d’un forum intitulé « bien vieillir au travail », le 26 mars, organisés pour leurs agents par la ville de Caen (1 050 agents), son centre communal d’action sociale (607 agents) et sa communauté urbaine, Caen-la-mer (2 068 agents, 48 communes, 274 630 habitants, Calvados), avec l’organisme Prévention Santé & Travail (PST). Or, dans la fonction publique territoriale, sur un total de 1,94 million d’agents, 44 % ont 50 ans et plus.
Usure professionnelle
Les facteurs de vieillissement sont multiples, selon l’une des intervenantes au forum, Sarah Urien, infirmière en santé au travail de PST, qui les a détaillés lors du forum : augmentation de la pression artérielle, baisse de la force musculaire et de la capacité ventilatoire, amoindrissement des capacités digestives, diminution des hormones, réduction de l’acuité visuelle et auditive, allongement du temps d’apprentissage et de prise de décision…
Mais, tempère-t-elle aussitôt, « la pratique d’activités physiques et sportives régulières, de même que les stimulations cognitives quotidiennes, permettent de prévenir ce vieillissement. » Dans ce cas, « un senior peut être aussi performant qu’un salarié plus jeune », insiste-t-elle. D’autant qu’il est fort de son expérience et des compétences acquises.
En réalité, ce qui fragilise les seniors, c’est l’usure professionnelle. Celle-ci se définit, selon l’agence nationale d’amélioration des conditions de travail (Anact), comme « un phénomène d’altération de la santé dû au travail, qui se traduit par une accélération du processus de vieillissement », précise Patricia Le Taillandier de Gabory, infirmière coordinatrice en santé au travail de PST, ajoutant que « cela ne touche pas que les salariés âgés ».
Une mauvaise santé, par exemple le surpoids, est l’un des facteurs de désinsertion professionnelle identifiés par la Haute Autorité de Santé, dans un rapport publié en 2019, cité par les intervenantes du forum. Mais il y a d’autres facteurs : des maladies professionnelles telles que les troubles musculosquelettiques (mal de dos, etc.) – sachant qu’une sur deux touchent des salariés seniors –, ou encore les cancers et d’autres pathologies, en particulier cardiovasculaires, à l’origine d’une fatigabilité accrue.
De même, « un travail soutenu, répétitif, pénible, le port de charges lourdes, le travail précaire » favorisent la désinsertion professionnelle, ainsi que « les contraintes temporelles (cadence élevée…) », « les horaires atypiques (travail de nuit, le week-end), le bruit, les risques psychosociaux…», indique aussi Patricia Le Taillandier de Gabory.
Le plus inquiétant est que « 37 % des salariés, en 2019, ne se sentent pas capable de faire leur travail jusqu’à leur retraite », souligne-t-elle. Il s’agit le plus souvent « des métiers les moins qualifiés ou les plus en contact avec le public », relève-t-elle, or ils sont nombreux dans la fonction publique territoriale.
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