ExaspĂ©rĂ©s par le trafic constant dans leurs immeubles et le climat de violence gĂ©nĂ©ral, des habitants du quartier sevranais des Beaudottes, classĂ© en ZSP depuis l’automne 2012, ont dĂ©cidĂ© d’occuper leur hall d’immeuble la semaine dernière pour gĂŞner les dealers.
Mardi 9 avril au soir, « on est tous descendu. Les jeunes Ă©taient en colère », raconte une membre de l’amicale des locataires, sous couvert d’anonymat. Le lendemain, ils retrouvent des pneus crevĂ©s sur quatre de leurs voitures. Une vingtaine de voisins, furieux, partent se plaindre auprès de la mairie. « Les jeunes nous ont dit: « Vous voulez la guerre? Vous aurez la guerre… » », raconte une dame qui ne veut pas que son nom soit citĂ©.
Les mobilisations d’habitants de citĂ©s contre les trafics et l’insĂ©curitĂ© se sont multipliĂ©es ces derniers mois en Ile-de-France, mais celle des Beaudottes a provoquĂ© la venue du ministre de l’IntĂ©rieur vendredi 12 avril. Leur « appel au secours » a « touchĂ© » Manuel Valls, qui leur a promis des renforts de CRS, rĂ©clamĂ©s par le maire StĂ©phane Gatignon (EE-LV).
Des violences rĂ©currentes – En juin 2011, c’est dans un autre quartier de la ville, Montceleux, que des balles sifflaient, notamment Ă proximitĂ© d’une Ă©cole primaire. Le maire avait alors demandĂ© au ministre de l’IntĂ©rieur de l’Ă©poque, Claude GuĂ©ant, une « prĂ©sence de l’armĂ©e 24 heures sur 24 ». Quatre-vingt dix CRS avaient Ă©tĂ© dĂ©ployĂ©s et M. GuĂ©ant s’Ă©tait engagĂ© Ă ce « que les voyous payent ».
Après leur dĂ©part, « le trafic, qui existe toujours, est devenu encore plus perturbateur », observe le dĂ©putĂ© Front de gauche François Asensi. « Les habitants ont dĂ©passĂ© leur crainte » en dĂ©fiant les dealers, « il faut les soutenir », estime-t-il, tout en soulignant que les forces de l’ordre ne rĂ©soudront pas tout dans cette ville oĂą le taux de chĂ´mage des jeunes atteint, selon la mairie, jusqu’Ă 40%. « Ce qu’il faut, c’est du travail pour les jeunes », a plaidĂ© vendredi un habitant, apostrophant le ministre.
Les associations veulent que l’Etat agisse – Mais aux Beaudottes, tous ne soutiennent pas l’occupation des halls d’immeubles. « On n’a pas Ă se substituer Ă l’Etat », estime Jaouad Dahmani, jeune père de famille et prĂ©sident de l’Amicale des locataires.
« Quand les CRS Ă©taient lĂ , ça a eu un impact. Mais une ville ne peut pas vivre avec des CRS », estime Mohamed Ghilli, de l’association IdĂ©es qui coache des jeunes gravitant autour du trafic des stupĂ©fiants. « Il faut des actions qui touchent Ă la racine du problème », considère cet analyste financier de 32 ans.
Samedi, une quinzaine d’associations organisait un tournoi de football inter-quartiers destinĂ© aux 10-16 ans, en mĂ©moire d’Ahmed, 22 ans, abattu Ă la kalachnikov un dimanche soir de janvier aux Beaudottes. Une affaire dans laquelle deux hommes originaires de la citĂ© de la Muette Ă Garges-lès-Gonesse (Val-d’Oise), ont Ă©tĂ© mis en examen fin mars.
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