La mutualisation au sein du bloc local est concernée par le projet de loi de décentralisation. Est-elle reconnue comme une problématique à part entière ?
La mutualisation, question complexe, a été très présente dans le projet de réforme, notamment à travers les schémas de mutualisation. Leurs contenus ont été volontairement limités car chaque territoire connaît des situations différentes et il reviendra aux élus de décrire leur projet de mutualisation dans les débats d’orientation budgétaire. Concernant la notion de services communs dans un contexte de ressources publiques rares, il y a des cohérences à organiser, à repenser l’ingénierie du territoire visant à apporter de l’expertise au bloc local. Au final, la loi, moins précise, arrange tout le monde.
A quelle échéance envisagez-vous l’administration locale unique ?
C’est un objectif à long terme, mais la logique est bien là : le projet de loi tend à encourager la mutualisation des services communes/intercommunalités, comme le traduit la suppression de la mutualisation ascendante que nous souhaitions. La mutualisation ascendante a été utile, mais elle a atteint ses limites. Par ailleurs, la dimension financière avec la prise en compte des dépenses à la hausse va être un puissant facteur d’accélération. C’est un objectif politique affiché, il reste à voir avec quels mécanismes financiers.
Cela dit, le découpage en trois textes et le calendrier gouvernemental nous conduisent à être très réservés sur l’adoption finale des mesures permettant justement l’affirmation du bloc local à travers la suppression de la mutualisation ascendante et l’introduction du « bonus-malus ».
Pouvez-vous préciser la dimension financière et quel système d’incitation préconise l’ADGCF ?
Pour lever les résistances à la mutualisation, l’idée est de mettre en place un dispositif plus contraignant de type « bonus/malus » concernant à la fois les communes et les intercommunalités. Pour les communes, le système agirait sur leur dotation forfaitaire dont la baisse prévue (environ -3%) pourrait être modulée selon les cas : par exemple -1,5% pour les bons élèves et -4% pour les moins motivés.
Pour les communautés, il s’agirait de moduler les mécanismes de garantie de leurs dotations. Ainsi, le régime de garantie fixé à 95% applicable en 2012 pourrait être diminué à 85%, et à 80% pour les mauvais élèves. Le système actuel est une prime aux interco à coquille vide, sa modification permettrait de financer le bonus attribué aux communautés vertueuses.
Quelle serait la place de ces nouveaux mécanismes dans les schémas de mutualisation ?
Cette bonification pourrait être aussi envisagée dans les schémas de mutualisation impliquant davantage en amont les entités et donc les élus. Les schémas seraient évalués au bout de trois ans par un organisme externe, chambre régionale des comptes par exemple. Et selon le bilan réalisé, les dotations des communes à services mutualisables et des communautés pourraient être revues à la baisse.
Nous avons bien conscience de la difficulté de l’exercice, ce sera un processus long avec toutes les vicissitudes politiques et humaines inhérentes, mais qui reste une condition de l’administration locale unique. Les processus de mutualisation contribuent par leur caractère expérimental et évolutif à inventer une culture administrative en réseau fondée sur la collaboration et supposent des modes spécifiques de management.
Cet article fait partie du Compte-rendu
Jusqu’où doit aller la mutualisation des services dans les intercos ?
Sommaire du dossier
- Intercommunalité : vers des outils juridiques plus souples
- « La mutualisation est l’opportunité de repenser l’organisation de l’ingénierie du territoire » – Pascal Fortoul
- « La mutualisation nécessite une commande politique volontariste » – Olivier Ducrocq
- « La mutualisation douce a préparé le projet de Métropole lyonnaise » – Irène Anglaret
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