Alors que le gouvernement envisage de rendre facultative l’existence même des centres communaux d’action sociale (CCAS), nous, les associations de solidarité engagées au quotidien auprès des publics en difficulté, tirons la sonnette d’alarme.
Les associations connaissent le terrain. Elles agissent en lien étroit avec les CCAS, siègent au sein de leurs conseils d’administration, travaillent de concert dans l’urgence comme dans la durée avec ces établissements publics. C’est pourquoi nous affirmons avec force : supprimer les CCAS reviendrait à déstabiliser toute l’aide sociale de proximité et à fragiliser plus encore les plus précaires.
Un rôle structurant pour détecter, coordonner, accompagner
Le CCAS n’est pas un simple guichet ou un service administratif. Il incarne un service public de proximité indispensable en matière d’accès aux droits et d’accompagnement des plus âgés ou des plus précaires. Travailler de concert avec le CCAS est pour nous, associations, un gage de réponse coordonnée, fondée sur nos complémentarités, face à des besoins sociaux complexes, en constante augmentation. Sans les CCAS, c’est toute l’action sociale de proximité qui se fragmentera, les ruptures de parcours qui augmenteront, des personnes isolées qui seront livrées à elles-mêmes.
Le risque d’un appauvrissement de la réponse sociale
La situation sociale appelle plus que jamais à conforter nos complémentarités. Pas à se passer de la valeur ajoutée d’un acteur qui agit grâce à des équipes engagées avec lesquelles nous échangeons au quotidien.
Les difficultés d’accès aux soins, à une alimentation saine et durable ou au logement, pourtant essentiels, compliquent considérablement la vie quotidienne d’un nombre trop important de nos concitoyens. La FAS rappelle que 24,5 % des chômeurs sont exposés à la pauvreté et qu’une personne handicapée sur cinq est pauvre. Faut-il rappeler que la demande de logements sociaux a dépassé les 2,7 millions de ménages en 2024, tandis que la production de nouveaux logements sociaux a chuté à environ 84 000, contre 124 000 en 2016 ?
Dans une société fracturée, affaiblir les CCAS, c’est reculer face à l’urgence sociale.
La fin des conseils d’administration : une atteinte à la démocratie sociale
En rendant facultatifs les CCAS, le gouvernement fait le choix de rayer d’un trait de plume toute la singularité de leur conseil d’administration, composé pour moitié d’élus et pour moitié de représentants associatifs. Cette gouvernance paritaire a fait ses preuves. Si demain ces conseils devaient être remplacés par de simples commissions municipales, c’est toute la richesse de l’action sociale, alimentée par ces précieux espaces de dialogue, qui s’en trouverait amoindrie.
Un report de charge probable sur les associations
Si les CCAS venaient à disparaître, qui prendrait le relais ? D’autres services municipaux moins spécialisés ? Les départements, exsangues ? L’État, dont on sait qu’il n’a plus les moyens de ses ambitions ? Inévitablement, les associations devront faire face à davantage de demandes d’aide et d’accompagnement d’urgence. Mais avec quels moyens ? Avec quels personnels ? Dans quelles conditions ? Les associations ne peuvent ni absorber le désengagement de la puissance publique, ni pallier l’abandon d’un outil aussi structurant que le CCAS.
Nous appelons au retrait immédiat de cette mesure.
Nous, associations signataires, demandons au gouvernement et aux parlementaires de renoncer à cette mesure aussi incohérente que mortifère, qui menace de fragiliser plus encore le lien social et d’accentuer les inégalités territoriales.
Renforcer les CCAS n’est pas défendre un totem administratif. C’est garantir un accès égal aux droits et à la dignité pour toutes et tous, dans chaque commune de France.
Signataires :
- Luc Carvounas, maire d’Alfortville (Val-de-Marne), président de l’Union nationale des CCAS (Unccas)
- Isabelle Vatinel, présidente de l’Association des cadres territoriaux de l’action sociale (Actas)
- Didier Duriez, président du Secours Catholique
- Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), conseiller municipal de Malakoff (Hauts-de-Seine)
- Daniel Goldberg, président de l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss)
- Marie-Reine Tillon, présidente de l’Union nationale de l’aide,
des soins et des services aux domiciles (UNA) - Anne Géneau, présidente des Petits Frères des Pauvres
- Bernard Tranchand, président de l’Union nationale des associations familiales (Unaf)
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