Engagé depuis 2009 dans la décarbonation de ses infrastructures routières, le département de la Haute-Garonne a noué un partenariat avec le Laboratoire Matériaux et Durabilité des Constructions (LMDC) de l’Insa Toulouse pour poursuivre l’innovation dans ce domaine.
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Un chantier près de Merville utilise le procédé Biophalt avec enrobé tiède intégrant un liant végétal et 55 % d’agrégats.
« L’intelligence collective et l’innovation doivent être mises au service des grands enjeux environnementaux », a affirmé Sébastien Vincini, le président du Conseil départemental de Haute-Garonne, lors de la validation par la commission permanente le 16 novembre du partenariat entre sa collectivité et le Laboratoire Matériaux et Durabilité des Constructions (LMDC) de l’Institut national des Sciences appliquées de Toulouse (Insa) et de l’université des sciences Paul-Sabatier de Toulouse. Ce dernier est le plus gros laboratoire de génie civil de France qui emploie une cinquantaine d’enseignants-chercheurs et autant de doctorants.
L’idée de ce partenariat est née de la rencontre il y a un an d’Erick Constensou, chef du service Techniques et Environnement de la route au département, et de Martin Cyr, directeur-adjoint du LMDC. « Le département se veut une collectivité exemplaire et sa vice-présidente Martine Croquette m’a poussé à établir ce partenariat avec l’Insa car nous avons des intérêts communs, signale le Monsieur Routes du département depuis trois décennies. Mais le département n’a pas la volonté de décarboner que les routes : il gère aussi plus de 100 collèges, ce qui représente beaucoup de béton… »
Tester à grande échelle
Le premier intérêt que voit l’enseignant-chercheur à ce partenariat, c’est « d’avoir un endroit où tester nos solutions à grande échelle, aux intempéries. » Ça tombe bien, « le département a plein de délaissés, de bouts de terrain, de bâtiments techniques », répond Erick Constensou, ajoutant que « nos routes sont déjà un terrain de jeux pour des industriels qui nous sollicitent pour tester de nouvelles solutions. » Par exemple récemment des planches d’essai avec de nouveaux liants végétaux issus de la sylviculture, ou un enrobé tiède avec 55% d’agrégats.
« Ma problématique, c’est l’analyse du cycle de vie de ces nouveaux procédés, poursuit Erick Constensou. Aujourd’hui, je ne sais pas si les couches d’enrobés avec du liant végétal mises en place il y a deux ans vont durer aussi longtemps que l’enrobé traditionnel. Je parle aux entreprises de cette analyse de cycle de vie, mais la présence d’un laboratoire comme celui de l’Insa serait plus rassurante sur cette question. »
Le chef de service voit aussi dans ce partenariat un moyen de lutter contre la résistance au changement. « La réglementation bouge, mais ce n’est pas encore entré dans le quotidien des équipes… Changer les pratiques, c’est loin d’être gagné ! », se désole-t-il.
Projets à venir
Pour l’instant, la relation entre les deux parties prend la forme d’un accord-cadre sans projets concrets mais qui permettra d’aller plus vite le moment venu. « On ne sait pas combien de projets vont être concernés. On a listé un certain nombre d’applications comme le béton bas-carbone ou le biosourcé et j’ai présenté l’accord à mon laboratoire pour voir si des chercheurs sont intéressés », indique Martin Cyr. On parle aussi de matériaux de revêtement diminuant le phénomène d’îlot de chaleur, végétalisables, économes en eau ou infiltrants pour les pistes cyclables…
Erick Constensou raconte à son interlocuteur qu’Enedis a des milliers de poteaux en béton à recycler à partir desquels l’entreprise a commencé à produire des granulats de 0/20mm avec une gravière locale. « Depuis qu’on a modifié nos règlements de voirie au niveau des remblaiements de tranchées, on demande des matériaux autocompactants, détaille-t-il. On a dit à Enedis que pour être auto-compactant, il fallait un liant dedans. Les équipes du LMDC pourraient les aider à trouver un liant végétal bas-carbone ! » Martin Cyr est ravi de la nouvelle. « C’est typiquement des problèmes pour lesquels les entreprises nous appellent. Pour les poteaux d’Enedis, on pourrait lancer une étude et un partenariat avec un financement incluant le Conseil départemental. »