Le parcours évoque le remède miracle des maux de la société. Il s’affiche avec insertion sociale et accompagnement, santé des personnes âgées et soin des patients, hébergement, intégration de la famille et placement du mineur ; il se proclame aussi de formation, professionnel, résidentiel, scolaire…
La panacée figure dans les textes plus de 500 fois depuis 1990, et est administrée au quotidien par les professionnels de l’action sanitaire, sociale et médicosociale. Le terme, polysémique, renvoie dans son sens le plus ancien au chemin parcouru par une voiture ou un fleuve, et au droit de faire paître son bétail.
Le Larousse en ligne y ajoute notamment les étapes par lesquelles passe quelque chose ou quelqu’un, en particulier dans sa carrière.
Alors, initiatique, du combattant, d’obstacles ou libre, le parcours est-il vraiment l’antidote attendu ?
Dans le contexte de crise économique et d’efficience des dépenses de l’État, le vocable ne tient pas à la biographie de l’individu mais à la norme sociale. Il cache l’injonction à suivre une voie que le bénéficiaire des politiques publiques doit coûte que coûte se tracer, quelles que soient ses capacités personnelles.
Il recèle en outre la mise sous condition de la redistribution sociale. Servet Ertul, Jean-Philippe Melchior et Philippe Warin (1) y voient « un subterfuge devant l’impuissance des politiques publiques ».
Devenu « institué », le parcours social conforme les bénéficiaires aux standards du libéralisme, pour « accéder à l’emploi, au logement, à la formation, à la santé, aux loisirs… ». Le mot traduit ainsi un nouveau modèle social, « l’accomplissement de soi ».
Il joue l’individu, sa responsabilisation et son autonomie, contre le collectif, la solidarité et la protection sociale. Il débouche, pour les moins armés, sur le non-recours et le repli sur soi. En un mot, l’immobilisme.
Thèmes abordés
Notes
Note 01 « Les parcours sociaux à l’épreuve des politiques publiques », Presses universitaires de Rennes, 2012. Retour au texte