Aux Assises nationales des Ehpad 2019 organisées les 12 et 13 mars par le Mensuel des maisons de retraite, c’est devant la brochette des ministres qui l’ont précédée dans la fonction – Roselyne Bachelot, Marie-Anne Montchamp, Michèle Delaunay et Laurence Rossignol – que s’est exprimée Agnès Buzyn, l’actuelle ministre de la Santé et des Solidarités en charge des personnes âgées. Celle-ci y a vu non seulement « le signe d’une continuité d’actions, mais aussi celui que les défis à relever transcendent très largement les clivages partisans ».
Un Ehpad-bashing injuste et contre-productif
La ministre en poste a d’abord tenu à « dire solennellement sa reconnaissance et son admiration » aux professionnels du secteur et à l’assurer de son « indéfectible soutien et de [sa] confiance ».
Elle a qualifié l’Ehpad-bashing auquel se livrent certaines émissions de télévision ou livres « d’injuste », alors que les quatre ministres, soutenus par les conseils départementaux et les professionnels, ont beaucoup œuvré pour renforcer l’exigence de qualité des établissements accueillant les personnes âgées dépendantes, et de « contre-productif », insistant sur le besoin de soutien et d’apaisement de familles qui culpabilisent de l’entrée de leur parent en établissement.
Le grand âge, une question émergente du Grand débat national
La ministre a détaillé les sources d’inquiétudes et d’angoisse des Français, entendues dans les réunions du Grand débat national auxquelles elle a assisté et relevées dans les toutes premières conclusions : les freins au maintien à domicile, le poids financier du reste à charge en établissement, le doute sur la qualité de la fin de vie en établissements sanitaire ou médicosocial, la peur d’être un fardeau pour ses proches, la dégradation des conditions de travail des professionnels et les difficultés d’accès à l’information relative aux droits et à l’offre de prise en charge pour les personnes âgées et leurs proches aidants.
Un pessimisme alimenté par la conscience des inégalités
Ces constats sont proches de ceux issus de la consultation menée à la fin de l’année 2018 sur la question de l’autonomie et du grand âge. En guise de « bande-annonce » du rapport de Dominique Libault qui lui sera remis le 28 mars 2019 sur le sujet, et non au titre d’une « avant-première », a plaisanté Agnès Buzyn, la ministre a notamment expliqué que « le pessimisme des Français quant aux conditions futures de prise en charge de leur perte d’autonomie » était alimenté par le sentiment « d’inégalités accrues avec des prestations dépendant des ressources, la perte du lien social et l’isolement à domicile ».
Elle a également indiqué la demande pour une égalité de traitement face à la diversité des pratiques des conseils départementaux.
Des mesures de rupture et de crédibilisation
Agnès Buzyn s’est voulue rassurante en évoquant les conclusions « pertinentes et inventives » des dix groupes de travail qui ont planché pour nourrir le rapport commandé à Dominique Libault.
Elle a cité, à titre d’exemples, des propositions pour simplifier la tarification ternaire complexe, décloisonner des organisations en tuyau d’orgues, adapter des métiers et des formations ainsi que les ratios d’encadrement en Ehpad.
« Tout concourt à penser que nous sommes dans la bonne direction et dans le bon rythme », a-t-elle ajouté. La ministre « souhaite des mesures fortes pour faire la différence dès 2019 ».
Elle annonce une loi Grand âge et autonomie porteuse, d’une part, de « mesures immédiates de rupture et de changement de modèle » et, d’autre part, de solutions de plus long terme, évoquant la « crédibilisation de la politique du grand âge », « une citoyenneté pleine et entière de la personne âgée », sa « dignité » et « de bonnes conditions de vie ».
Faire de la vieillesse un moment privilégié
« Nous devons pouvoir répondre », a-t-elle affirmé, aux demandes d’orientation et d’information, de liberté de choix pour sa prise en charge quels que soient ses ressources, de nombre suffisant d’un personnel bien formé qui trouve un sens à son métier.
En matière de prévention de la perte d’autonomie, « je veux que nous puissions y répondre », a déclaré la ministre.
« Une société se grandit, a-t-elle conclu, quand elle est capable de faire de la vieillesse un moment privilégié. » Cette « conviction » ne se traduira toutefois en réalités que si le gouvernement accepte d’y réserver une partie des richesses produites dans le pays.