Mantra des temps modernes, l’innovation doit mieux organiser établissements et services, réduire les coûts et optimiser actions et interventions. Lourde tâche. Où puiser l’innovation ? L’étymologie esquisse une réponse.
Du latin innovare, « in » pour le mouvement vers l’intérieur, et « novare » pour le rendre nouveau, le renouveler, le restaurer, le transformer, le mot témoigne de la nécessité de partir de ce qui existe, du retour sur le milieu et sur ses pratiques.
L’action d’innover introduit de la nouveauté dans ce qui existe déjà. Hugues Choplin et Eddie Soulier (1) la résument comme « un mouvement collectif, imprévisible, de rupture ».
C’est parce qu’une réponse normée ne satisfait plus un besoin social, n’apporte pas de solution à un « événement » que l’innovation se déploie. Elle est incertaine dans ses déterminants et risquée quant à ses résultats, mais porteuse d’espoir et d’avenir. L’innovation bouscule les positions établies, court-circuite les règles du jeu, change le modèle ou l’adapte.
Ce mouvement convoque l’intuition de ceux qui le déclenchent et transgresse les procédures habituelles. Le Moyen-Âge ne s’en méfiait-il pas parce qu’il y voyait de la subversion et une remise en cause de l’ordre établi ? Michel Serres en relève les effets sur le temps, l’espace et tous les aspects de la vie de l’homme : un bouleversement.
L’innovation est une invention qui connaît le succès par l’effet d’un processus d’appropriation, « la socialisation de l’invention », selon la formule de Bernard Stiegler. Mais dès lors que l’innovation se force, répond à l’injonction d’un pouvoir dominant, dans un « capitalisme de l’innovation ou de l’innovation intensive », citent MM. Choplin et Soulier, comment la penser ?
C’est par une mise en garde que Bernard Stiegler invite à y réfléchir, alertant sur « l’accélération de l’innovation », la disruption, selon lui « incompatible avec l’élaboration de la civilisation ».
Thèmes abordés
Notes
Note 01 « Le mi-lieu de l’événement innovant – À partir de Levinas et Deleuze », Hugues Choplin, Eddie Soulier, « Revue de métaphysique et de morale » 2014/3 (n° 83), p. 351-364. DOI 10.3917/rmm.143.0351. Retour au texte