Prudence et scepticisme. Le discours du Premier ministre Michel Barnier sur les questions sociales et de santé, lors de sa déclaration de politique générale du 1er octobre, est loin d’avoir enthousiasmé. Si François Sauvadet, président de Départements de France, salue d’emblée la volonté du chef du gouvernement de « porter une attention particulière aux plus fragiles », il tempère aussitôt, soulignant que les conseils départementaux « attendent des mesures concrètes adaptées au rôle central qu’ils jouent au cœur des solidarités humaines, que ce soit le handicap, la pauvreté, les mineurs, les personnes âgées, etc. ». Et surtout alerte sur « l’intenable situation budgétaire » de ces collectivités, dont « un tiers » dans « une situation catastrophique ».
Un propos resté très général
Luc Carvounas, président de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (Unccas), se montre encore plus déçu par une déclaration de politique générale « restée très générale ». Or, sur un sujet tel que la santé mentale – « grande cause nationale de l’année 2025 », a annoncé Michel Barnier –, « il faut mettre des moyens », réclame le président de l’Unccas : « Treize millions de nos concitoyens sont concernés, et c’est le premier poste de dépenses de l’Assurance-maladie », sans oublier le grand nombre de postes de psychiatres non pourvus. Quant aux CCAS, qui ont « une population plus importante à accompagner désormais », « les collectivités ne peuvent les doter plus chaque année », faute de recettes fiscales depuis la suppression de la taxe d’habitation, proteste Luc Carvounas, appelant à « revoir la fiscalité des collectivités territoriales ».
Autre sujet de préoccupations majeures, les « déserts médicaux » contre lesquels le Premier ministre a promis de lutter. « Je ne suis pas totalement convaincu », euphémise Frédéric Chéreau, co-président de la commission santé de l’association des maires de France (AMF). L’élu s’interroge, entre autres, sur le « programme Hippocrate » annoncé par le Premier ministre, qui mise sur l’engagement « volontaire » d’internes français et étrangers à exercer leur métier « dans les territoires qui manquent le plus de médecins » : « Ils ne vont pas rester très longtemps », prédit celui qui est aussi vice-président de l’AMF, soulignant l’ampleur des problèmes – 6 millions de Français sans médecin traitant, la baisse du nombre de généralistes, une santé mentale « en perdition »… – et le besoin de « repenser le système de santé et son financement ».
Quid des agents ?
Pour la santé, Anne Terlez, vice-présidente d’Intercommunalités de France en charge de la cohésion sociale, demande aussi « des moyens », de même que pour le handicap ou le service public de la petite enfance, même si elle se veut, dans l’ensemble, responsable » et « modérée », insistant sur « l’inventivité » des collectivités locales. L’urgence, selon elle, pour assurer « la cohésion sociale », c’est de remédier à la pénurie d’assistantes sociales, d’éducateurs, d’animateurs, d’aides à domicile, etc. : « On n’arrive plus à recruter, quand bien même on en aurait les moyens », assure-t-elle.
Ces agents en premières lignes dans les services sociaux et de santé, n’ont pas trouvé leur place dans la déclaration de politique générale de Michel Barnier. Au grand regret de Sylviane Brousse, secrétaire fédérale de la CGT des services publics, qui s’inquiète des efforts demandés aux collectivités locales sur le plan budgétaire : « Cela va se répercuter sur les effectifs et les conditions de travail des agents », déplore la syndicaliste. Quant à Philippe Malaisé, secrétaire général adjoint de la CFDT Interco, il ne voit pas, dans la politique annoncée, de solutions face au manque de moyens dans l’accompagnement social des allocataires du RSA, des personnes « en détresse sociale », tout comme dans la protection de l’enfance, ou encore les territoires qui se désertifient et vieillissent le plus…
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