Marc Bourquin, directeur Autonomie de l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France suggère que, si la coconstruction est aujourd’hui incontournable dans le domaine de la santé, elle nécessite un repositionnement du rôle des institutions publiques.
Associer usagers, aidants et opérateurs des politiques exige que chacun soit « à sa place », pour définir des objectifs, déterminer des moyens et procéder à l’évaluation ; la décision restant du ressort de l’institution à ses yeux…
Un système d’information interopérable
Il évoque deux exemples de coconstruction portés par l’ARS : le projet Snac (service numérique d’appui à la coordination), un système d’information interopérable au service des organisations sanitaires, médicosociales, sociales coordonnées au travers des dispositifs d’appui à la coordination (PTA, Paerpa, Clics, Maia, etc.).
Un appel à projets national a été lancé dans le cadre du volet numérique Territoires de soins 2021 et en Ile-de-France, ce sont les structures qui ont défini cinq (premiers) territoires sur lesquels ces systèmes seront implantés.
Autre exemple, la définition des objectifs et des indicateurs dans le cadre du projet régional de santé (quels indicateurs pour suivre le déploiement des soins en Ehpad ou le développement de l’accès aux soins des personnes handicapées ?).
Il faut une réflexion commune
Marie-Françoise Lavieville, directrice adjointe de la direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement (DRIHL), témoigne de la prégnance des questions de santé dans son secteur.
La DRIHL est régulièrement amenée à travailler avec l’ARS d’Ile-de-France, les collectivités et le secteur associatif pour les résoudre. Ainsi, des partenariats avec les maternités et les PMI ont été élaborés, pour éviter aux femmes enceintes sans solution d’hébergement le recours au 115 ou à l’hébergement hôtelier. Quelques dizaines de places ont été créées.
Pour les populations de SDF vieillissants, la DRIHL a travaillé avec l’ARS, pour qu’un poste soit dédié, dans une structure d’hébergement pour femmes, et le droit commun appliqué. Pour qu’il y ait coconstruction, dit-elle, il faut une réflexion commune pour repérer une problématique, identifier les moyens et les contraintes de chacun, et définir des solutions qui respectent le cadre des politiques publiques.
L’État a laissé les départements seuls
Pierre Stecker, administrateur de l’Andass et directeur de l’enfance et de la famille au conseil départemental de Seine-Saint-Denis, rappelle que la protection de l’enfance et de la famille relève de droit de la coconstruction, avec les instruments que sont les schémas programmatiques, les observatoires, et les appels à projets, les CPOM, etc. Ces derniers outils sont-ils adaptés à toutes les problématiques ? Probablement pas, la « crise » des mineurs non accompagnés en témoigne : l’État en dénombre 13 000 (+ 100 % en deux ans), la Seine-Saint-Denis en prend 1020 en charge (20 % du public de l’aide sociale à l’enfance). De quoi « percuter » le dispositif…
« L’État a laissé les départements seuls », accuse Pierre Stecker, à la croisée des politiques migratoires, de l’hébergement, des questions régaliennes de vérification de l’état-civil, de la protection de l’enfance, de l’insertion, etc.
Cette crise révèle selon lui un « impératif de coconstruction des politiques entre acteurs associatifs et pouvoirs publics, pour réinventer une logique de l’action » à la fois « agile et sobre ».
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