C’est en présence de la ministre de la Santé que le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a présenté son avis sur les déserts médicaux. 5,3 millions de Français seraient concernés.
Et contrairement à la ministre de la Santé, le Cese estime qu’il est temps de recourir à des mesures coercitives. Face à un « manque de médecins dont le nombre va encore diminuer, il va falloir que les pouvoirs publics prennent le problème à bras le corps », a soutenu Marie-Andrée Blanc, présidente de la commission temporaire ″déserts médicaux″, lors d’une conférence de presse le 13 décembre.
À l’État de prendre ses responsabilités
Le Cese veut dès à présent réguler l’installation des spécialistes du deuxième recours en secteur 2 dans les zones sur-denses en conditionnant leur conventionnement à la réalisation de consultations « avancées » régulières dans ces zones.
Il estime par ailleurs nécessaire, en l’absence de résorption des déserts médicaux d’ici à trois ans, « de développer un réseau d’offre de consultation de premier recours associant centres, maisons de santé, centres hospitaliers et centres hospitaliers locaux ».
« Si la médecine libérale ne veut pas s’installer dans certains territoires, soit, mais c’est à l’État de prendre ses responsabilités », a renchéri Yann Lasnier, le rapporteur de l’avis.
La réaction ne s’est pas faite attendre. Dans un communiqué du même jour, l’Union nationale des professions libérales (UNAPL) a fait connaître son opposition à l’avis du Cese, jugeant ces mesures coercitives « inefficaces » et « dangereuse ».
Encourager les étudiants
Les neuf autres préconisations du Cese ne sont pas très novatrices. Elles s’inscrivent dans la lignée de celles présentées par la ministre de la Santé en octobre dans son plan pour « Renforcer l’accès territorial aux soins ». Parmi elles, favoriser une plus grande diversité géographique et sociale des étudiants en médecine pour équilibrer à terme leur répartition sur les territoires. Pour y parvenir, le Cese propose de construire dans les zones sous-denses des filières d’initiation et de préparations aux métiers de la santé dès le lycée, de faciliter les passerelles entre les autres cursus universitaires et les études de médecine, et de prendre en charge, dans les zones sous denses, les frais de logement et de transport des stagiaires internes de médecine générale lors de leur stage en médecine ambulatoire.
Mieux répartir les tâches
Le Cese suggère aussi d’augmenter, par des mesures financières immédiates, le temps médical disponible dans les zones sous-denses en aidant les médecins de secteur 1 à disposer d’un secrétariat médical mutualisé et en rendant plus attractif le cumul emploi-retraite.
Ou encore de mieux répartir les tâches entre les professionnels de santé notamment en attribuant légalement à des professionnels paramédicaux en pratique avancée l’exercice de nouveaux métiers en santé de niveau intermédiaire. Le déploiement de la télémédecine est également dans la liste des préconisations – non budgétées par le Cese – à déployer.
Auto-saisine
C’est la première fois que le Cese rend un avis sur un sujet identifié grâce au comité de veille des pétitions en ligne, mis en place en septembre dernier. Il a constaté, en observant les pétitions, que « les déserts médicaux préoccupent de nombreux Français », a fait savoir Patrick Bernasconi, président du Cese. « Pour nous, cet avis du Cese est une reconnaissance du travail fait par les pétitionnaires. C’est aussi une reconnaissance d’une autre voie par rapport à la médecine libérale qui s’essouffle », a soutenu le Dr Frédéric Villebrun, signataire de la pétition « Un réseau national de centres de santé pour lutter contre les déserts médicaux ».
Références
- L’avis du Cese sur les déserts médicaux, 13 décembre 2017.
- Plan gouvernemental "Renforcer l’accès territorial aux soins", 13 octobre 2017.
- Selon une estimation de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère de la santé (DRESS), 8% de la population se situe dans un désert médical en 2017, soit 5,3 millions de Français
- D’ici mai 2018, le Cese devra également s’atteler à la question d’un parcours de soins plus efficient pour l’usager, à la demande de la ministre de la Santé.
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