En juin, il sera trop tard pour tirer le signal d’alarme ! Bien qu’ils ne jugent pas encore la situation « catastrophique », les parlementaires veulent alerter maintenant sur les retombées très incertaines des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) sur le tissu économique et associatif local. Chargés, depuis septembre 2022, d’une mission d’information, Stéphane Mazars (RE, Aveyron) et Stéphane Peu (PCF, Seine-Saint-Denis) n’ont pas caché leurs inquiétudes lors d’un point d’étape, mercredi 15 février, avant la remise de leur rapport définitif en juin prochain.
« Nous sommes convaincus que c’est une chance extraordinaire d’avoir ces Jeux et nous souhaitons que l’acceptabilité soit la plus large possible », assure le député aveyronnais. Mais pour y parvenir, il reste beaucoup à faire. Car Paris 2024 est encore loin de cocher toutes les cases et les députés réclament une coordination et une implication plus soutenue de l’État.
Les touristes loin de Paris ?
Le tourisme ? « Un impact important qui permet un retour sur investissement, mais il n’est pas facile de se projeter », reconnaît l’élu de la majorité présidentielle. Elles sont estimées entre 1,43 et 3,52 milliards d’euros, mais le Centre de droit et d’économie du sport (CDES) appelle à la prudence sur les prévisions.
Pour les députés, évaluer les retombées est même impossible, alors qu’il faudra tenir compte, notamment, des situations géopolitique et sanitaire du moment, du cours des devises, de la densité hôtelière, mais aussi du fait que les touristes et habitants vont peut-être « éviter » la capitale durant le double événement sportif, découragés par les effets de congestion ou l’augmentation des prix. « Cet effet d’éviction pourrait être très important et certains acteurs, comme France Tourisme à Paris, font déjà part de leurs inquiétudes », assurent les parlementaires.
Les hôtels et restaurants ? La dynamisation de l’activité touristique bénéficiera d’abord à ce secteur, mais tous les touristes olympiques ne contribueront pas aux retombées économiques à la même hauteur, notamment, les athlètes, hébergés au village. Dans le flou sur les zones d’accès et le périmètre neutralisé, les hôteliers et restaurateurs déplorent de ne pouvoir « anticiper les recrutements » alors que le secteur est déjà en tension. L’hôtellerie demande aussi que les plateformes touristiques soient assujetties aux mêmes obligations fiscales qu’elle, avec une application de la TVA pendant la période des Jeux.
Pour les chargés de mission parlementaire, s’impose « la nécessaire coordination des acteurs du tourisme dans un contexte de concurrence mondiale. L’anticipation est insuffisante à ce stade ». Ils réclament, « une stratégie de communication commune » pour Paris, la Seine-Saint-Denis, mais aussi « l’ensemble des collectivités locales accueillant des épreuves. »
Le tourisme réclame des transports et de la sécurité
Au-delà de ces incertitudes, « les points noirs ou d’interrogation » restent le transport et la sécurité, également soulevés dans le rapport de la Cour des comptes. « Ces deux enjeux sont intrinsèquement liés : la fluidité des déplacements est une question de sécurité publique. C’est le défi le plus important que la France aura à relever en terme de sécurité pendant plusieurs années », estime Stéphane Mazars. Et sans sécurité renforcée ni transports suffisants, les retombées économiques seront fragilisées. Les acteurs du tourisme en sont conscients, les parlementaires aussi. Il faudrait « 20 000 agents de sécurité. On ne les a pas et la question est de savoir si on va les avoir », s’interrogent les deux députés. « Pour le moment, on n’en a que 10 000 », précise le député de l’Aveyron.
Quant aux transports, Stéphane Peu rappelle que la candidature de Paris s’est appuyée sur l’assurance d’un maillage de transports en commun. Au-delà des objectifs non tenus en matière de construction de lignes, les députés alertent sur la nécessité « d’anticiper le transport de 13 à 15 millions de voyageurs. » Chaque jour, 600 000 spectateurs (dont 35 % en provenance de l’étranger) et 200000 personnes accréditées devront converger vers les sites olympiques. Or il manque encore actuellement à la RATP « 700 chauffeurs de bus et 300 autres pour le métro », affirment les parlementaires.