Avec les Jeux Olympiques et paralympiques de Paris 2024, la Cour des comptes n’évolue pas vraiment dans son couloir de nage. En préambule, mardi 10 janvier, devant la Commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, Pierre Moscovici, son premier président, l’a bien précisé : « Sur la forme, ce travail est inédit pour nous », en référence à « la mission de suivi et d’alerte » confiée à cette institution « de façon concomitante à la décision publique et non pas en contrôle ex post », comme c’est le cas plus habituellement.
À dix-huit mois de l’ouverture des JO, la Cour apparaît toutefois bien dans le rythme. Dans un rapport rendu public ce mercredi 11 janvier, elle dresse 15 recommandations pour bien sûr, « réussir l’organisation » des Jeux, mais aussi « en maîtriser les coûts ».
Sur l’aspect financier, elle précise que le « coût réel des Jeux reste à établir » ! Comme le développe son conseiller maître, « la Cour n’est pas en mesure pour le moment d’établir le coût réel des Jeux et son impact total sur les finances publiques, en l’absence de recensement exhaustif des dépenses d’investissement et de fonctionnement liées aux Jeux ». Et pour cause, « la communication retenue par les organisateurs des Jeux comme par les responsables publics dans le cadre de la candidature (…) consistant à additionner les budgets prévisionnels du comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojop) (en euros courants) et de la Solideo (1)(en euros constants) ne facilite pas la compréhension du coût réel des Jeux, ni celle de son évolution depuis la candidature de la ville de Paris »…
Pressions sur les organisateurs
Le coût global des Jeux annoncé en phase de candidature se situait à 6,9Md€. « Il s’établirait en euros courants, à 8,8Md€ après les révisions budgétaires intervenues fin 2022 », a glissé Pierre Moscovici. S’il pointe bien « des facteurs exogènes comme l’inflation et les difficultés d’approvisionnement », pour expliquer la majorité des surcoûts, il exhorte le Cojop à « rester mobilisé pour que les dépenses soient maîtrisées jusqu’au terme de la préparation des Jeux. D’autant plus que la réserve – 315 M€ – dont dispose le Cojop pour faire face aux mauvaises surprises est « limitée ».
Autre point important : « le passage de la phase de planification stratégique qui s’est dans l’ensemble bien passée, à la phase opérationnelle semble délicat », a-t-il ajouté, pointant cette fois, l’articulation entre le Cojop et les pouvoirs publics.
« L’accélération des opérations en 2022 et 2023 renforce le besoin de coordination, d’une part, entre le Cojop et la Solideo et, d’autre part, entre le Cojop et les pouvoirs publics, sous l’autorité du délégué interministériel aux Jeux olympiques et paralympiques (Dijop) », est-il noté dans le rapport.
Par ailleurs, la Cour préconise au Cojop de renforcer, dans la phase à venir de montée en puissance de ses activités, « la direction de l’audit, de la conformité et du cadre public, pour assurer un contrôle exhaustif des procédures d’audit et de contrôle interne ainsi que de prévention des risques déontologiques et de conflits d’intérêts ».
Sécurité privée : de « probables carences » ?
Sur la livraison des Jeux, la Cour des comptes met également la pression. Et d’insister sur l’importance de « signer dès le début de l’année 2023 toutes les conventions d’utilisation des sites et les marchés de livraison externalisés qui auraient dû l’être avant la fin de l’année 2022 ».
Enfin, Pierre Moscovici a rappelé que « la sécurité et le transport constituaient deux points de vigilance dans la phase opérationnelle ». Pour le premier thème, cela passe notamment par la finalisation « avant la fin du premier semestre 2023 », du plan global de sécurité des Jeux, mais aussi par la stabilisation des besoins de sécurité privée « et l’établissement de mesures alternatives pour pallier les probables carences ». Et pour le second, par la finalisation « avant la fin du premier semestre 2023, des plans de transport site par site et (l’engagement) de leur déclinaison opérationnelle et par « l’accélération des travaux relatifs à la gestion des flux et à l’information des usagers ». De quoi accélérer un peu plus le compte à rebours soumis aux organisateurs…
Des collectivités (bien) impliquées
Entre la ville de Paris qui a mis en place une délégation ad hoc, le département de la Seine-Saint-Denis, « qui s’est également doté d’une structure de pilotage de la préparation des Jeux », les établissements publics territoriaux (EPT) Plaine Commune et Paris Terres d’Envol ainsi que les communes directement concernées par la préparation des sites des Jeux (Saint-Denis, Saint-Ouen, L’Île-Saint-Denis, Aubervilliers, La Courneuve, le Bourget, Dugny), sans oublier Marseille et la Polynésie française… la Cour des comptes a salué le « lien étroit (entretenu) avec les collectivités-hôtes et les associations d’élus ». Et de conclure : « l’approche doit être poursuivie pour assurer la mobilisation des territoires à l’occasion des Jeux et les inscrire dans la politique d’héritage ».
Références
Rapport de la Cour des comptes, ici.
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