On dit souvent que les jeunes ne s’intéressent pas à la vie locale. Partagez-vous ce constat ?
On pense que les jeunes ne s’intéressent pas aux élections, mais ils sont un miroir grossissant de l’ensemble du corps électoral. Les jeunes d’aujourd’hui sont forcément plus représentatifs des mutations sociales en cours, comme la désaffection à l’égard des instances politiques traditionnelles que l’on observe depuis plusieurs décennies. C’est amplifié chez eux, mais il faut arrêter de toujours les cibler, car cela va bien au-delà d’eux. La jeunesse possède également certaines spécificités : c’est une période de découverte, d’expérimentation et de changement. Mais le fait que les jeunes s’abstiennent et ne s’impliquent pas dans la vie locale ne perdure pas forcément.
Quel rôle joue l’école dans l’essor de la participation citoyenne ?
Elle est surtout importante pour les jeunes non sensibilisés à la vie et à la participation politique dans leur famille ou leur environnement social. Si l’école ne fait rien, elle contribue donc à renforcer les inégalités de participation politique. Mais d’autres corps intermédiaires jouent un rôle : syndicats, tissu associatif et réseaux sociaux.
Ces enseignements passent par l’éducation civique et morale. Est-ce suffisant ?
On présente souvent la France comme le champion européen de l’éducation civique, car elle est enseignée de la primaire au lycée. En réalité, cela ne représente que 30 minutes de cours hebdomadaire. En France, l’école est très centrée sur les savoirs et leur évaluation à travers les devoirs et les examens. L’éducation civique et morale compte peu dans l’évaluation des élèves et devient une matière faible.
Comment faire évoluer les choses ?
Si l’on veut redonner une place à l’éducation à la citoyenneté, il est nécessaire qu’elle pèse plus lourd en termes de volumes horaires et d’évaluation. Depuis la fin des années 90, les élèves sont censés y tenir des débats sur des sujets de société. Il faut que cela soit le cas ! L’actualité intéresse les élèves, ils doivent en discuter et comprendre pourquoi ces enjeux font l’objet de débats. Il faut leur donner des repères politiques, leur expliquer ce qu’est la gauche ou la droite, sinon comment pourraient-ils se sentir légitimes pour voter ?
En amont, il est impératif de former les enseignants à comment préparer, gérer et expliciter un débat pour que cela contribue à une plus grande familiarité des élèves avec la vie politique et sociale. Il est aussi important que les enseignants présentent la réalité des choses et pas seulement les grands principes démocratiques. Si l’on aborde la démocratie locale, c’est pour débattre de ce qu’elle apporte aux citoyens et de ses limites, pas uniquement pour détailler son fonctionnement.
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