Mais où est donc passé le « PrAB » ? Derrière cet acronyme se cache le dispositif de préparation au concours A et B, instauré par le décret n° 2017-1471 et expérimenté pour six ans depuis le 1er janvier 2018. Mais il a fait un flop. Début juin, le nombre de recrutements en contrat « PrAB » oscillait, sur le site « place-emploi-public.gouv.fr », entre six et huit offres… toutes dans la fonction publique d’Etat. « Le programme est peu utilisé et nous en demandons un bilan pour observer les freins à sa mise en œuvre », fait savoir Marie Mennella, secrétaire nationale à la fédération Interco-CFDT. Pour l’heure, personne ne semble en mesure d’avancer des chiffres sur son recours et le CNFPT ne propose aucun parcours fléché.
Recrutements comme contractuels
« Certaines collectivités ne le connaissent même pas », reconnaît Patrick Coroyer, président de l’Association nationale des DRH de territoires, qui a sondé les membres de son association. Interrogés par des élèves de l’Inet pour un rapport sur le recrutement dans les collectivités, en partenariat avec l’Association des DRH de grandes collectivités, des employeurs territoriaux avaient pourtant annoncé envisager de s’y investir pleinement pour diversifier les recrutements. Que s’est-il passé depuis ?
Ciblant des jeunes sans emploi de moins de 28 ans ou des demandeurs d’emploi de longue durée, le « PrAB » vise à faciliter l’insertion professionnelle. Les bénéficiaires sont recrutés comme contractuels pour douze à vingt-quatre mois. L’objectif étant d’aider les personnes retenues à préparer les concours de catégorie A ou B, quel que soit le versant. Pendant son contrat, l’agent bénéficie de l’accompagnement d’un tuteur et d’un parcours de formation adapté correspondant de 10 à 25 % de la durée de son contrat (hors temps de préparation personnel).
Echec de l’initiative
Ce mécanisme pourrait-il être à l’origine de l’échec de l’initiative ? « Le “PrAB” n’est sans doute pas adapté aux collectivités, qui ont besoin d’agents opérationnels tout de suite », se risque Cindy Laborie, responsable des affaires juridiques de la Fédération nationale des centres de gestion. « Tous concours confondus, plus de 80 % des lauréats sont déjà en poste en collectivité », relève Sabine Taler-Léonard, directrice du pôle « emploi-concours » au CDG du Rhône (lire ci-dessous).
Quant à la diversité des recrutements qu’était censé encourager le « PrAB » (visant en premier chef les résidents de quartiers prioritaires de la ville), les collectivités y œuvrent déjà. « Nous travaillons avec les maisons de l’emploi et Pôle emploi pour recruter dans ces quartiers et inscrivons les jeunes dans les cursus classiques de préparation au concours », indique Patrick Coroyer, également directeur du département « RH » de Nantes et de Nantes métropole (24 communes, 7 600 agents, 656 300 hab.).
Titularisation
Dans le cadre du Plan jeunes fonction publique, l’exécutif avait, en mars 2021, reconnu que le « PrAB » devait être amélioré. La CFDT proposait de faciliter la titularisation via l’exonération de tout ou partie des épreuves du concours sur la base des rapports du tuteur et du chef de service.
Un dispositif lancé à contretemps
[CDG du Rhône 430 collectivités affiliées, 12 000 agents] Au centre de gestion du Rhône, comme dans beaucoup d’autres, le dispositif « PrAB » est passé totalement inaperçu. « Que ce soit au niveau du service “emploi, carrière ou concours”, personne n’a été sollicité sur ce programme peu connu », convient Sabine Taler-Léonard, directrice du pôle « emploi-concours ». L’information a-t-elle été suffisamment bien relayée ? Le dispositif est-il seulement connu des candidats potentiels comme des collectivités territoriales ? « C’est un peu comme pour l’apprentissage : quand un dispositif n’est pas connu, forcément il n’est pas utilisé », avance la directrice. Celle-ci se demande si le « PrAB » n’aurait pas été lancé à contretemps.
« En 2018, il n’y avait pas autant d’offres d’emploi qu’aujourd’hui, avec un marché qui s’est fortement redynamisé depuis un an, impliquant même de gros problèmes d’attractivité pour les postes de la territoriale. Il y a quatre ans, l’époque était plutôt marquée par des politiques de réduction de la masse salariale », juge-t-elle. Entretemps, la pandémie a assiégé les DRH, imposant d’autres priorités.
Contact : Sabine Taler-Léonard, 04.72.38.49.78.
Pas de succès non plus pour la préparation des « C »
D’après le rapport annuel sur l’état de la fonction publique de 2019, le nombre de demandeurs d’emploi à la recherche d’un des métiers de la fonction publique était passé de 240 000 à 440 000, soit une hausse de plus de 7 % par an. Les personnes en recherche d’emploi sont davantage des diplômés. Seuls les métiers de la gestion de l’espace public (nettoyage, entretien de la voirie et des espaces verts) font exception, avec 81 % de non ou peu diplômés (de niveau inférieur au bac), contre 47 % pour l’ensemble des demandeurs d’emploi. Initié avant le « PrAB », en 2006, le Pacte, parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d’Etat, vise le même public, mais pour la préparation des concours de « C ». Il n’a pas rencontré le succès escompté.
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