En septembre, une école de production (EDP) en chaudronnerie ouvrira ses portes au cœur de la zone industrielle de Montoir-de-Bretagne, commune de Loire-Atlantique de 7 000 habitants située à vingt kilomètres de Saint-Nazaire. « Le projet a été proposé à l’occasion de la signature du protocole “territoires industrie” et nous avons saisi l’occasion », indique Béatrice Priou, vice-présidente chargée de l’emploi, de l’insertion et de l’enseignement supérieur de la communauté d’agglomération de la région nazairienne et de l’estuaire (10 communes, 125 900 hab.).
Sur ce territoire industriel, avec deux grands pôles – construction navale et aéronautique –, près de 2 000 salariés travaillent dans la fabrication de pièces métalliques. Selon Pierre Sallenave, directeur général de l’entreprise CNI - Le sur-mesure métallique et président de la future école de production de l’agglomération nazairienne (Epan), « les difficultés d’embauche imposent de trouver de nouvelles formes de recrutement ».
Les EDP sont attractives car elles allient deux priorités essentielles des territoires : s’atteler aux problématiques d’insertion et répondre aux attentes en matière d’emploi des entreprises. Ces établissements d’enseignement technique privés dispensent des formations qualifiantes du CAP au bac pro. Elles sont séduisantes pour les jeunes, puisque 60 % du temps d’enseignement sont consacrés à la fabrication, dans les murs de l’établissement. Les élèves usinent des pièces à la demande des sociétés dans un atelier équipé comme en entreprise.
Le faire pour apprendre
« Toutes les productions sont valorisées, correspondent à des commandes, sont réalisées selon des délais et doivent respecter des normes de qualité. L’école de production se situe entre la formation à temps plein dans un lycée et un apprentissage en entreprise », ajoute Pierre Sallenave. Pour l’instant, cinq entreprises se sont engagées à passer commande et leur nombre devrait s’étoffer.
Comme l’EDP de Montoir-de-Bretagne, la future école de production d’usinage de Dunkerque (86 300 hab.) fait partie des 34 lauréats (dont seize vont ouvrir à la prochaine rentrée) de l’appel à manifestations d’intérêt lancé en mai 2021 par le ministère chargé de l’Industrie. La première année, la nouvelle structure accueillera douze jeunes encadrés par un maître professionnel. « L’idée est de recevoir 36 jeunes au bout de trois ans », explique Fabienne Bouchart, chargée de projet et future directrice de l’école.
Chaque étape de la création de l’école sera validée par la Fédération nationale des écoles de production, qui s’assure que la pédagogie est basée sur « le faire pour apprendre ». « A ce stade, mon travail consiste à effectuer du sourcing auprès du public, à recruter l’équipe et à engranger des partenariats pour donner une formation permettant d’apprendre un métier mais aussi à développer l’ouverture d’esprit des jeunes », ajoute Fabienne Bouchart.
Agés de 15 ans, les nouveaux arrivants sont en échec scolaire ; ils vont recevoir une pédagogie individualisée sans notation traditionnelle. « A Dunkerque, nous sommes favorables à une orientation choisie ; pour certains jeunes, le système traditionnel d’enseignement n’est pas adapté et nos entreprises ont besoin de main-d’œuvre », complète Christine Decodts, adjointe au maire, chargée du travail et de l’insertion professionnelle, et présidente de l’association abritant l’école de production de la région dunkerquoise. Sur la zone d’emploi de Dunkerque, 136 entreprises proposent au moins un poste requérant des compétences en usinage. Elles portent 727 emplois salariés dans ce domaine (hors intérim), majoritairement dans les zones industrielles de la façade littorale.
Ressources variables
Le financement des futures écoles reste à définir : plusieurs partenaires sont connus par les porteurs de projets, comme TotalEnergies Foundation, la Banque des territoires ou la BPI, les régions, l’Etat… Les acteurs de l’insertion comme ceux de l’entreprise sont aussi sur la liste. « Nous prévoyons un budget de 2 millions d’euros sur trois ans avec la montée en puissance du nombre des élèves et des machines à acheter », résume Fabienne Bouchart. Alexis Guilmain, directeur de l’Epan et ancien directeur de l’EDP de Besançon, précise que « les formations sont plus ou moins capitalistiques et nécessitent des financements variables ». Les ressources dégagées de la production participeront au budget de fonctionnement.
Selon Pierre Sallenave, « on ne peut pas parler de concurrence avec nos entreprises car ce sont des petits volumes. Cette production pourra nous permettre de nous dégager d’une partie qui ne nous intéresse pas. Et, pour 80 % des jeunes, c’est l’assurance de trouver un emploi pérenne dans les sociétés avec lesquelles ils ont travaillé. Donc tout le monde est gagnant ».
Au-delà du besoin de main-d’œuvre, une logique de responsabilité sociétale
[CC intercom de la Vire au Noireau (Calvados) 17 communes • 46 900 hab.] Sur le territoire de l’intercom de la Vire au Noireau, la future école de production textile, qui ouvrira en 2023, va former des opérateurs de confection et apporter une nouvelle passerelle avec l’enseignement existant. Le lycée Jean-Mermoz propose un baccalauréat professionnel et un brevet de technicien supérieur (BTS) dans les métiers de la mode. Le territoire compte trois entreprises dans le textile. « Nous sommes au centre d’une zone très riche entre la Manche et l’Orne, allant de la fabrication des tissus à la mode. L’un des industriels qui nous soutient est Linportant, une société de fabrication de tee-shirt en lin. On peut aussi citer Liste rouge, Tricots Saint-James, l’association Normandie Habillement qui regroupe des entreprises de la mode, Filix créative solutions, Bagster et Le Préau », énumère Philippe Neuville, chargé de mission « développement économique » à la communauté de communes. Si l’idée du projet revient à cette dernière, l’école va être pilotée par les entreprises qui, au-delà du besoin de main-d’œuvre, sont intéressées par le caractère social de leur engagement dans une logique de responsabilité sociétale des entreprises. Dans le cadre de l’appel à manifestations d’intérêt, la Banque des territoires verse 50 000 euros pour le recrutement du chargé de mission. « C’est une première étape donnant droit à de nouveaux financements. L’association qui portera l’école est composée de trois collèges : collectivités, entreprises et acteurs de la formation », conclut Philippe Neuville.
Contact : service du développement économique, dev.eco@vireaunoireau.fr
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