Le rapport sur les déserts médicaux de la mission sénatoriale sur les perspectives de la politique d’aménagement du territoire et de la cohésion territoriale, publié fin mars, accorde une large place aux collectivités. Ses 32 propositions pour répondre au manque de médecins de ville dans les territoires misent sur l’incitation, l’organisation mais aussi la contrainte.
« Si rien n’est fait, le pire est devant nous, écrivent les auteurs du rapport. La perspective d’une décennie noire en termes de démographie médicale est une réalité ». Les membres de la mission sénatoriale menée par Bruno Rojouan (LR) réclament donc à l’unanimité « une combinaison ambitieuse et pragmatique de mesures d’équilibrage territorial de l’offre de soins, libératrices de temps médical et d’accroissement du nombre de professionnels de santé formés, en associant les collectivités territoriales, qui sont en première ligne ».
Echelon territorial
Le rapport consacre un chapitre et plusieurs mesures aux collectivités territoriales, qui « n’ont pas ménagé leurs efforts », face aux « carences de l’Etat ». Les auteurs du rapport estiment nécessaire, autour de la notion de « responsabilité populationnelle de territoire », de renforcer leurs moyens juridiques et financiers, dans la continuité des « avancées de la loi 3DS », pour que l’échelon territorial « puisse contribuer à la vision stratégique et à l’élaboration des mesures ». Les élus doivent selon eux être mieux associés dans l’organisation de proximité des soins.
Sur le plan des leviers mobilisables localement, la mission propose d’évaluer les incitations à l’installation pour ne conserver que celles qui sont efficaces. Et parce qu’on ne saurait « fonder une politique d’attractivité sur les seules aides financières », les auteurs préconisent de favoriser la création par les collectivités de « guichets uniques », véritables instruments d’attractivité médicale à destination des médecins et des étudiants.
Le rapport ne met tout de même pas de côté les incitations à exercer dans les zones sous-dotées. Il préconise en effet de créer une dotation de lutte contre la désertification médicale pour aider les collectivités territoriales dans leurs actions. Des incitations financières concernent aussi les médecins des zones sous-denses : majoration de l’aide au bénéfice, défiscalisation des permanences de soins, majoration des droits à la retraite…
Inciter, organiser… et contraindre
Les sénateurs n’hésitent pas cependant à préconiser une forme de contrainte, le conventionnement sélectif temporaire, pour promouvoir et faciliter l’exercice médical dans les zones sous-denses. Une mesure si controversée qu’un seul candidat à l’élection présidentielle, l’écologiste Yannick Jadot, l’a proposée, mais qui progresse manifestement chez les parlementaires. De plus, les membres de la mission demandent que l’installation d’un médecin en zone sur-dotée soit conditionnée à la cessation d’activité d’un autre de la même spécialité.
La proposition de créer un Conseil national d’orientation de l’accès territorial aux soins et des commissions départementales de la démographie médicale tranche aussi avec les propositions antérieures.
Et des mesures classiques
Certaines des 32 mesures proposées recoupent en revanche des préconisations déjà formulées sur le développement de la télémédecine, l’augmentation du nombre d’étudiants en médecine, de leurs stages en régions sous-dotées et du temps médical disponible des médecins ou encore la création d’une quatrième année de médecine générale professionnalisante en zone sous-dense.
Plus globalement, la mission estime nécessaire d’augmenter le tarif de la consultation de médecine générale à 30€ et les avantages du cumul emploi-retraite pour améliorer l’attractivité des professions médicales libérales.
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