La mission sénatoriale sur la « judiciarisation » de la vie publique a rendu son rapport, le 5 avril, en partant d’un constat : « Un grand nombre de nos concitoyens ont le sentiment que leur vote n’a que peu de portée en raison de la place prise par les juges nationaux et européens dans le processus de prise de décision. »
Dans le viseur de cette mission, le renforcement du pouvoir juridictionnel : le contrôle de constitutionnalité (avec la question prioritaire de constitutionnalité), l’extension et l’approfondissement du contrôle exercé par le juge administratif, la création de procédures de référé et le développement du contrôle de conventionnalité.
Si les auteurs du rapport reconnaissent que cela a permis un approfondissement de la protection des droits fondamentaux et l’affermissement de l’Etat de droit, ils relèvent aussi l’envers de la médaille : la compromission de la capacité de mener des politiques publiques efficaces au service de l’intérêt général.
Mécanisme de Régulation
Les auteurs en concluent que « les juridictions exercent bien un pouvoir et elles tranchent des questions de nature politique ».
Heureusement, il n’est pas question dans ce rapport de revenir sur cet état de fait, mais de faire avec, de la meilleure façon qui soit, en réfléchissant à de nouveaux mécanismes de régulation. Evidemment, cela doit passer par un meilleur contrôle de la qualité de la production normative. Et que cette idée vienne de législateurs est très appréciable !
Prolifération
Il faut, selon ce rapport, résister à la tentation de créer une nouvelle infraction à chaque fois que survient un événement médiatique, mieux encadrer le recours aux ordonnances et que le Conseil constitutionnel exerce un contrôle de la qualité des études d’impact annexées aux projets de loi, ce qui obligerait le gouvernement à consacrer plus de temps à leur élaboration et, surtout, à réduire l’inflation normative.
Pour le rapporteur et sénateur du Tarn, Philippe Bonnecarrère (Union centriste), « la prolifération normative ouvre un espace pour le juge, contraint d’intervenir pour interpréter des dispositions ambiguës, contradictoires ou instables ».
Ce n’est pas nouveau : le Conseil d’Etat, dans ses rapports publics de 1992 et 2006, le Conseil national d’évaluation des normes ou, même, les agents et élus qui croulent sous les règles. Et si, enfin, on se posait et on s’y attelait ?
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