Le cabinet Service Public 2000 a mis en garde, lors d’un colloque le 20 octobre 2011, contre les « offres anormalement basses » des opérateurs, annonciatrices de dégradation du service et du patrimoine.
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« La guerre économique entre opérateurs semble basculer vers l’irrationnel », estime Loïc Mahévas, directeur général de Service Public 2000. La société de conseil aux collectivités constate une baisse de 20 % du prix du service proposé par les délégataires, sur les renouvellements de contrats d’eau et d’assainissement qu’elle a accompagnés depuis mi-2009.
Après des décennies de compétition insuffisante entre les majors, cette « hyperconcurrence » est jugée « préoccupante » par le cabinet, qui évoque une « délégation de service public (DSP) low cost ». Plusieurs facteurs sont évoqués pour expliquer cette évolution :
- une baisse du nombre de contrats,
- le recentrage de quelques acteurs sur le marché français,
- la concurrence de la régie,
- et l’extrême rivalité entre les opérateurs privés.
Baisse des prix malgré contraintes renforcées – « Comment les prix peuvent-ils baisser alors même que les exigences des autorités délégantes se renforcent et que leur non-respect donne lieu à pénalités ? », s’interroge Loïc Mahévas.
Pour le cabinet conseil, fondé par l’Association des maires de France (AMF) et la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), cet effet ciseau pose la question de l’avenir de la DSP. « On voit apparaître des chiffrages inférieurs aux référentiels de coûts (1) !, relève Loïc Mahévas. Ces offres anormalement basses indiquent clairement que des contrats ne seront pas rentables. Comme les délégataires ne pourront boucler leurs comptes, il se prépare une course aux avenants et des conflits avec leurs délégants. »
DSP « toxiques » – Le directeur général alerte donc les élus sur les « DSP « toxiques », qu’ils risquent de payer dans la durée : « une offre trop alléchante est annonciatrice de dégradation du service et du patrimoine. Le service d’eau potable chiffré à 1 euro ne sera jamais équivalent à celui facturé 1,5 euro. »
Du côté de la FP2E (Fédération professionnelle des entreprises de l’eau), qui représente les entreprises délégataires, ces risques ne sont pas avérés. On préfère voir dans cette baisse de la part du délégataire « un signal positif dont vont bénéficier les collectivités comme les consommateurs », explique Tristan Matthieu, président de la commission économique de la FP2E .
Modifier le cahier des charges – Dans ce contexte, SP2000 propose de faire évoluer la nature du cahier des charges de l’appel d’offres, en définissant des critères plus précis concernant le prix, en prenant en compte d’autres critères et en les pondérant. Il est aussi possible de réaliser un prévisionnel des coûts, afin de fixer un prix raisonnable pour le délégataire, et de juger alors la qualité de l’offre ; ou d’utiliser les enchères inversées en demandant aux entreprises de justifier les baisses de prix qu’elles proposent.
Une évolution à laquelle ne sont pas opposées les entreprises, qui seraient prêtes à s’adapter : « il est de la responsabilité des autorités organisatrices de pondérer le critère du prix et de mettre en appréciation d’autres critères comme le développement de l’emploi local ou l’innovation », conclut Tristan Matthieu.
Tout cela me parait bien naïf : la surenchère actuelle sur les contrats d’eau porte aussi bien sur le prix que sur la valeur technique : les offres sont d’un niveau de prix aussi bas que leur valeur technique est haute. Les entreprises – qui ne sont pas le petit artisan du coin – s’engagent ainsi sur des durées longues, par des contrats qui gravent dans le marbre le prix et la qualité du service qui sera offert. Elles sont pris en étau par la solution « régie », à prix comparable mais bien souvent à qualité technique moindre, ou à délai d’atteinte plus long de la même qualité technique. Les empêcher de proposer des prix plus bas que par le passé, associés à un niveau de service supérieur, c’est leur interdire d’être compétitives face à la solution « régie ». Elles doivent donc inventer un modèle d’organisation plus efficace pour faire face à cette compétition. De quel droit tel ou tel élu ou tel ou tel AMO empêcherait cette inéluctable adaptation ?
Les opinions toutes faites issues des marchés de travaux ou de prestations de services qui engagent ponctuellement une entreprise me paraissent totalement à côté de la plaque.