Dans le cadre de la réforme de l’encadrement de la fonction publique territoriale (FPT), la Direction générale des collectivités locales avait annoncé, en 2009, des textes réglementaires créant un cadre d’emplois d’ingénieur en chef. Dans l’attente de leur publication, l’Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF) et le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) se préparent au projet qui actera la scission entre les niveaux d’ingénieur en chef et principal.
Temps d’acculturation – Même s’il risque de favoriser la mobilité des ingénieurs en chef des ponts, des eaux et des forêts (Ipef), qui aimeraient retrouver dans la FPT des postes correspondant à leur grade (lire l’encadré ci-dessous), un corps technique dédié aux métiers de dirigeants, avec des modalités d’accès et de formation spécifiques, est souhaité par les acteurs territoriaux.
De moins en moins spécialiste, l’ingénieur en chef de demain doit être capable de mettre en commun plusieurs compétences techniques au service de projets complexes. Gilles Da Costa, ancien directeur de l’Institut national des études territoriales (Inet), aujourd’hui directeur général des services du conseil régional de Franche-Comté, a livré au CNFPT, en avril, un rapport d’expertise sur ce sujet.
Il considère, notamment, que la formation d’intégration de cinq jours, dont bénéficient les lauréats du concours d’ingénieur en chef, est insuffisante. La majorité des 50 candidats reçus chaque année (60 % en externe, 40 % en interne) ont besoin d’un temps d’acculturation aux spécificités de la FPT avant d’exercer leur métier. Ils pourraient l’obtenir, à l’issue du concours, dans le cadre d’une formation en alternance de douze mois comprenant des stages et un socle de compétences sur la FPT et le management, acquis en commun avec les administrateurs A+ et les conservateurs, à l’Inet. Le CNFPT a également imaginé des partenariats avec les écoles d’ingénieurs de l’Etat.
La revalorisation du cadre d’emplois s’inscrit dans la perspective du remplacement des cadres supérieurs à partir de 2015. « Le renouvellement interne ne suffira pas, il faudra compter sur les apports externes, observe Gilles Da Costa. Aujourd’hui, peu d’ingénieurs des grandes écoles ou d’universitaires scientifiques de niveau bac + 6 se présentent au concours d’ingénieur en chef. Or, la multiplicité des politiques publiques nécessite une diversité des profils. »
L’AITF est vigilante sur ce dernier aspect : « Il ne faut pas qu’il y ait un seul concours externe, de surcroît réservé à une liste limitée d’écoles, affirme Arnaud Bonnin, vice-président de la commission carrière. Il est bon de durcir la sélection, mais des ingénieurs déjà en poste, qui ont montré leurs capacités managériales, devront continuer d’avoir la possibilité de passer de A à A+, soit par concours, soit par promotion interne. »
Jury national – Enfin, le projet de réforme devrait servir à établir des règles de déroulement de carrière lisibles et équitables. L’AITF préconise, par exemple, un examen professionnel avec oral devant un jury national : « Est-il normal de passer d’un niveau à l’autre sans un minimum de règles communes entre les fonctions publiques ? L’accès au cadre d’ingénieur A+ dans la FPT, s’il doit conduire à la comparabilité de fonctions supérieures équivalentes, doit reposer sur des principes de reconnaissance et de forme identiques pour être crédibles », estime François Guillot, vice-président à l’AITF.
Coup de pouce à la mobilité des fonctionnaires d’Etat
La réforme du cadre d’emplois d’ingénieur A+ devrait aboutir à une homologie des statuts entre les ingénieurs en chef de la FPT et ceux de l’Etat (Ipef). Aujourd’hui, un Ipef est en grille indiciaire avec un indice terminal hors échelle C. Au même niveau, un ingénieur en chef territorial se situe hors échelle B. Si la réforme aboutit, l’ingénieur A+ territorial pourra terminer sur un indice comparable aux Ipef. Ces derniers pourront ainsi trouver dans les collectivités des postes et des statuts similaires à ceux qu’ils ne peuvent plus occuper dans la fonction publique d’Etat, compte tenu de la RGPP.
Références
- Décret n° 2007-1828 du 24 décembre 2007
- Décret n° 2007-39 du 10 janvier 2007.
- Décret n° 90-126 du 9 février 1990.
- Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
Cet article fait partie du Dossier
Filière technique : la réforme des ingénieurs en chef enfin relancée
Sommaire du dossier
- Filière technique : la réforme des ingénieurs en chef enfin relancée
- « Il est urgent d’élever encore le niveau de l’encadrement technique supérieur », Philippe Laurent, président du CSFPT
- « Nous souhaitons un statut attractif pour faciliter le recrutement de jeunes diplômés », Jean-Pierre Auger, président de l’AITF
- Ingénieurs en chef – Pour un cadre d’emplois spécifique
- Profil d’ingénieurs
- Jean-Paul Derinck, ingénieur au conseil général de la Côte d’Or – Portrait vidéo