Elle n’a pas de nom. Elle n’a pas de visage. Elle n’a pas de parti. Pourtant, elle gouverne, l’administration. Telle est la rengaine qu’a entonnée Emmanuel Macron, au détour de sa fameuse interview au « Parisien », le 4 janvier.
Le Président ne s’est en effet pas contenté d’« emmerder » la population non vaccinée. « Moi, je ne suis pas pour emmerder les Français. Je peste toute la journée contre l’administration quand elle les bloque », a-t-il aussi dit au préalable. Une pique contre l’ensemble de ses services, après des coups de griffe plus ciblés, infligés à « l’Etat profond ». En clair : à la technostructure.
Sur les platebandes de Valérie Pécresse
Le propos prête à sourire, venant d’un énarque. Avant lui, Jacques Chirac avait usé de ce registre. L’électorat libéral s’inscrit toujours dans cette veine-là, remonté comme une pendule contre une administration « en roue libre » et une armée de « ronds de cuir » qui empêcheraient le pays profond de libérer son énergie.
A la veille de la présidentielle, la petite phrase d’Emmanuel Macron entre aussi en résonance avec le propos de l’homme le plus riche de France, Bernard Arnault, qui déclarait en 2016 : « Les emplois publics ne sont pas de vrais emplois. » Elle marche, enfin, sur les platebandes de Valérie Pécresse, qui entend rayer du tableau des effectifs 200 000 agents de « l’administration administrante ».
Trois protocoles sanitaires en huit jours
Mais le risque, c’est que cette petite phrase passe aussi pour un aveu d’impuissance, pour ne pas dire un exercice de défausse. Si, à l’issue de son mandat, le chef de l’Etat en est toujours à pester « toute la journée » contre ses propres troupes, c’est bien que Jupiter a perdu de sa superbe. L’administration a beau générer des lourdeurs, ce n’est pas elle qui, à l’école, impose trois protocoles différents en l’espace de huit jours.
Les familiers des collectivités le savent mieux que quiconque. Toute administration, en République, procède du pouvoir politique. Et non l’inverse. Emmanuel Macron, qui a renouvelé 90 % de ses directeurs d’administration centrale, l’illustre d’ailleurs à merveille. Tout au long de ses cinq ans à l’Elysée, il a fait ses choix. Il est majeur et vacciné. A lui, maintenant, d’assumer ses décisions devant les Français.
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