Le pragmatisme doit s’imposer lorsqu’il s’agit de définir son zonage dans un plan de prévention des risques d’inondation. Dans une décision du 24 novembre 2021, le Conseil d’Etat l’a encore rappelé, alors qu’un préfet a classé en zone rouge un terrain qui était pourtant protégé par un remblai. Certes, ce remblai avait été implanté irrégulièrement, mais il était là quand même. Le préfet ne pouvait pas l’ignorer pour ce seul motif.
Ouvrage dépassé
Le Conseil d’Etat avait déjà démontré à quel point il fallait être concret dans ces travaux de zonage.
Dans une décision datant de 2016 où il avait magistralement posé que lorsque les terrains sont situés derrière un ouvrage de protection, il faut prendre en compte « non seulement la protection que cet ouvrage est susceptible d’apporter, mais aussi le risque spécifique que la présence même de l’ouvrage est susceptible de créer, en cas de sinistre d’une ampleur supérieure à celle pour laquelle il a été dimensionné ou en cas de rupture, dans la mesure où la survenance de tels accidents n’est pas dénuée de toute probabilité ».
Il ne faut donc pas seulement s’assurer que l’ouvrage soit en bon état, mais aussi songer qu’il pourrait être dépassé. Par conséquent, la décision de novembre ne devrait pas étonner. Pour le Conseil d’Etat, la nature et l’intensité du risque doivent être appréciées de manière concrète, au regard notamment de la réalité et de l’effectivité des ouvrages de protection ainsi que des niveaux altimétriques des terrains en cause à la date à laquelle le plan est établi.
Caractère précaire
Ce ne sera pas le cas uniquement s’il est établi qu’un ouvrage n’offre pas les garanties d’une protection effective ou est voué à disparaître à brève échéance. Un ouvrage ne répond pas à l’un ou à l’autre de ces critères simplement parce qu’il a été établi dans des conditions irrégulières.
Ici, la cour administrative d’appel avait jugé que le préfet pouvait légalement s’abstenir de tenir compte, lors de l’élaboration de son document, de la modification de l’altimétrie de terrains résultant d’une opération de remblaiement car celle-ci avait eu lieu dans des conditions estimées irrégulières et présentait, à ce seul titre, un caractère précaire dans l’attente d’une éventuelle régularisation dont elle n’excluait pas la possibilité. C’était une erreur de droit bien heureuse pour le propriétaire du terrain.
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