Le discours prononcé par Emmanuel Macron en clôture du 103e congrès des maires, le 18 novembre, devrait faire la joie des politologues. Il est en effet extrêmement rare qu’un chef de l’Etat partage aussi précisément ses convictions, et surtout tout le mal qu’il pense de la décentralisation. Venant d’un inspecteur des finances qui n’a jamais été maire, ni élu local (« comme le général de Gaulle » a-t-il pris soin de rappeler), la charge n’est pas surprenante. De la part d’un président en exercice (et en campagne), devant les élus « préférés des Français », ça l’est davantage.
Un débat avorté
La démonstration se veut imparable. Premier acte : le maire et l’Etat, c’est pareil – quand bien même ces fonctions d’agent de l’Etat ne sont qu’une petite partie des compétences des maires. Opposer élus et Etat est donc « un débat mortifère », insiste Emmanuel Macron, sous-entendant que, en usant de leur autonomie constitutionnelle, les élus locaux affaibliraient l’Etat.
Deuxième acte : la véritable décentralisation n’existe pas. Pour le président de la République, l’autonomie financière et fiscale tant réclamée par les élus locaux, « ça creuse l’inégalité entre les territoires ». En outre, nous confondons, en France, « la décentralisation avec la délégation de compétences », puisque les règles restent établies au plan national. « Ayons le débat ! » exhorte-t-il pour, aussitôt, le tuer dans l’œuf : « Est-ce que, dans notre pays, on vote pour avoir 100 politiques sociales ? Non. »
Réarmer les préfets
Troisième acte : « Je crois véritablement à court terme à une déconcentration », qui s’appuie sur les préfets, réarmés pour ajuster l’action publique en fonction des besoins de chaque territoire. Et si l’action des collectivités n’est pas décentralisée, elle peut être contractualisée. Une pratique quasi systématisée sous le quinquennat d’Emmanuel Macron, qui y voit une « vraie révolution », mais évacue d’un revers de la main les critiques formulées par les élus locaux à l’encontre de la contractualisation.
Dans le grand auditorium du congrès des maires, les édiles n’étaient pas outrés, et certains, même, plutôt convaincus. Voilà la décentralisation enterrée. Baissez le rideau.
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