La santé mentale est « un état complet de bien-être », rappellent la Défenseure des droits, Claire Hédon, et son adjoint, le Défenseur des enfants, Eric Delemar, dans leur rapport sur la santé mentale des enfants, publié le 16 novembre. Elle nécessite un accès aux soins, mais aussi à la culture, à l’éducation, à la justice, à la sécurité, soulignent-ils, particulièrement mis à mal pour les 2,9 millions d’enfants qui vivent sous le seuil de pauvreté. Et elle est d’autant plus déterminante que « l’enfance, période de construction de l’individu, joue un rôle déterminant dans la santé mentale tout au long de la vie », note l’institution indépendante.
« Mal-être structurel »
Or, selon elle, la crise sanitaire a mis en lumière « un mal-être structurel » et l’a accentué – et pas seulement parmi les enfants vulnérables, en situation de précarité ou de handicap. Au fil des confinements, les troubles anxieux et dépressifs ont pris en effet une ampleur inédite, dans un contexte où les professionnels ayant en charge les moins de dix-huit ans souffrent d’un manque criant d’effectifs, ainsi que d’un défaut de coordination.
C’est pourquoi l’institution administrative indépendante a énoncé, dans son rapport, une série de recommandations qui visent à redonner des moyens suffisants à tous les dispositifs d’accueil ou d’accompagnement. Des centres de protection maternelle et infantile aux centres médico-psycho-pédagogiques et médico-psychologiques, en passant par la médecine scolaire, la pédopsychiatrie, ou encore les maisons des adolescents, la Défenseure des droits préconise une forte augmentation des dispositifs et du nombre de professionnels, ainsi qu’un renforcement de la coordination entre les multiples acteurs. Il s’agit aussi de définir des socles communs d’intervention, notamment pour repérer dès le plus jeune âge les troubles psychiques des enfants, les manquements des parents, et permettre une prise en charge précoce.
Jeunes aidants
Pointant l’absence de dispositifs dédiés aux 6-11 ans, elle suggère leur création « sur le modèle éprouvé des maisons des adolescents ». Ce serait « un espace de parole neutre (hors école et hors famille) où s’exprimer et être entendu », souligne-t-elle. « La libre expression des enfants » est en effet un objectif majeur de la Défenseure des droits qui, dans son rapport, a donné largement la parole aux moins de dix-huit ans.
Autre point faible : le manque d’accompagnement des « jeunes aidants », alors qu’ils représenteraient « 17% des lycéens », selon une étude récente. Aussi faudrait-il « sensibiliser les professionnels du secteur médico-social et ceux de l’Éducation nationale » à leurs difficultés et mettre en place des actions de soutien.
Enjeu majeur de l’ASE
Néanmoins, la protection de l’enfance reste au cœur des préoccupations. La prévalence des troubles psychiques y est en effet cinq fois plus élevée qu’en population générale, et même huit fois plus en prenant en compte les enfants placés reconnus en situation de handicap. « La prise en charge de la santé mentale des enfants confiés doit constituer un enjeu majeur », insiste la Défenseure des droits.
Elle recommande « de renforcer la pluridisciplinarité et le partenariat dans la prise en charge des enfants protégés », de rendre effective l’obligation d’établir un projet pour l’enfant, de signer des « protocoles opérationnels portant sur la santé » de ces enfants, ou encore « de renforcer la présence de professionnels de santé dans l’ensemble des établissements d’accueil relevant de la protection de l’enfance, en recrutant un infirmier ».
La Défenseure des droits préconise aussi d’améliorer « la prise en charge éducative et médicale », aujourd’hui « particulièrement défaillante », des mineurs étrangers non accompagnés, la plupart ayant beaucoup souffert, et pas seulement pendant leur exil. Et elle souligne la nécessite de prendre soin des jeunes placés dans les lieux d’enfermement. Pour que tous les enfants voient respecté « leur droit au bien-être ».
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