« L’accueil est chaleureux en entreprise, mais on n’a pas les mêmes repères. Des fois, on ne connaît pas », confie Moussa, originaire du Burundi, ayant obtenu le statut de réfugié en France. Grâce au projet Mercure, il a été embauché par Entreprise Métal Insertion (EMI), une structure de l’insertion par l’activité économique de la Métropole européenne de Lille. Garagiste dans son pays d’origine, Moussa se forme désormais à de nouvelles techniques. « Il pratiquait la soudure à l’arc. Nous l’initions à la soudure semi-automatique. Nous le familiarisons également avec le fonctionnement d’une entreprise française », explique Antoine Bobot, dirigeant d’EMI.
Un consortium d’entreprises et d’associations
A l’origine du projet Mercure, il y a Cooptalis, entreprise lilloise spécialisée dans la mobilité internationale, notamment l’accompagnement d’expatriés français. En 2019, elle décide de répondre à un appel à projet, lancé par le ministère du travail dans le cadre du Plan d’investissement dans les compétences (PIC), dédié à l’intégration de réfugiés par l’emploi. Cooptalis s’allie d’abord l’association Accueil – insertion – rencontre (AIR), spécialisée dans l’accueil des exilés. Elles s’associent ensuite à d’autres entreprises : Cleaning bio, API restauration, SINEO (réseau de français leader du nettoyage de voitures sans eau) et EMI. L’idée est de combiner un accompagnement social avec l’apprentissage de la langue, l’initiation à la vie d’une entreprise française, la découverte des métiers en tension.
Allier les expertises pour réussir l’intégration
« Nous avons une longue expérience dans l’accompagnement de demandeurs d’asiles et de réfugiés. Nous sommes la porte d’entrée de Mercure. Nous accueillons toute personne qui se présente, nous réalisons un diagnostic et si son profil correspond, nous l’orientons vers Mercure », explique Christine Aubourg, présidente d’AIR. L’association assure un accompagnement administratif d’accès aux droits et aux soins, aide les personnes à trouver un logement. Elle organise également des cours de Français langue étrangère (FLE). « Nous avons notre réseau associatif et social, Cooptalis dispose du sien, entrepreneurial. Sans eux, nous sommes moins efficaces, et vis versa. C’est de la coordination des deux que naît la richesse du projet », poursuite-t-elle.
Des personnes motivées et reconnaissantes
« On est sur un public qui a une motivation et une volonté très forte de s’en sortir. C’est impressionnant. Les personnes ont aussi une grande reconnaissance vis-à-vis de l’employeur », témoigne Antoine Bobot. De nombreuses entreprises sont à la recherche de ce type de profils. Ainsi, par exemple, les Partisans du goût, un réseau de marchés couverts. Son président et sa directrice des ressources humaines se sont rendus à la matinée d’échanges, organisée au mois d’octobre à Marcq-en-Barœul par Cooptalis. Sont présents une dizaine de réfugiés et une quinzaine de représentants d’entreprises. « Nous rencontrons de grosses difficultés de recrutement dans les métiers de la bouche. Nous recherchons des personnes motivées qui ont la notion d’engagement. Nous acceptons des personnes faiblement qualifiées, car nous avons les équipes pour les former. Nous sommes très intéressés, j’ai déjà distribué des cartes de visites », affirme Joaquim Pedreira, président des Partisans du goût.
Un soutien politique bienvenu
La matinée a pour objectif de sensibiliser les entreprises à la richesse des profils des réfugiés, de lever quelques appréhensions. « Nous souhaitons faire la promotion des réfugiés en entreprise. Les dirigeants ont peur et ne connaissent pas forcément. Ils font la confusion entre sans-papiers, migrants… Or le statut de réfugié donne le droit de travailler, il est très encadré », explique Olivier Desurmont, président de Cooptalis. D’ailleurs, l’adjoint (LR) au maire de Marcq-en-Barœul, Nicolas Papiachvili, est également présent. Issu lui-même de l’immigration, il tient à témoigner de la volonté de la commune d’accueillir des exilés. Olivier Desurmont confirme : « Le maire, Bernard Gérard, est attentif au sujet. Il nous a prêté des salles pour organiser des cours de français. C’est important d’avoir un soutien politique. »
Des résultats encourageants
Démarré début 2020, le projet a été mis en difficulté par le confinement et la crise sanitaire. « Les rencontres, c’est plus facile en présentiel », concède Olivier Desurmont. Mais, grâce à la mobilisation de tous les acteurs, les résultats sont au rendez-vous. Plus de 680 réfugiés ont été accompagnés sur le plan administratif, sanitaire et social. 155 personnes ont intégré le parcours d’accompagnement vers l’emploi. Autant ont appris le français. Les sorties positives (emploi ou formation diplômante) s’élèvent à 76. Parmi les secteurs d’activité les plus représentés : le nettoyage de bureaux (21%), le bâtiment (18%), la logistique (16%), l’informatique (14%). Quant à Moussa, venu témoigner à la matinée de son expérience, il rayonne. La dernière difficulté qu’il rencontre, c’est le logement. Mais elle devrait aussi être dépassée, assure la présidente d’AIR.
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